Louis XVI (6/9) : le Ministère Brienne ou l’impossible révolution royale (1787 – 1788)

 


 

Après Calonne, l’archevêque de Toulouse, Etienne-Charles de Loménie de Brienne, arrive aux affaires. Pourquoi souriez-vous ?
Brienne était un fervent opposant aux réformes. Lorsqu’il s’est retrouvé aux commandes, il a découvert la véritable situation et s’est rangé à mon avis. Il défendait des réformes qu’il critiquait hier. Et bien entendu, ses anciens amis sont devenus ses nouveaux ennemis. Cocasse comme situation. Il est plus aisé de critiquer et de s’opposer que de construire.

Vous lui ordonnez de faire enregistrer la version revisitée du projet au Parlement.
Le parlement valide le principe de la libre circulation des grains et la mise en place d'assemblées provinciales et municipales. Il enregistre également l’édit de tolérance, rédigé par Malesherbes, conférant aux protestants un état civil et le droit d’exercer leur culte en privé. Néanmoins, il refuse de valider la création de la subvention territoriale, arguant que seuls les états généraux peuvent consentir à un nouvel impôt perpétuel.

Le bras-de-fer s’engage avec les magistrats, jusqu’à la rupture. Vous convoquez un lit de justice pour enregistrer de force ces édits. A ce moment, le Parlement prononce la nullité du lit de justice.
C’était inouï ! Du jamais vu ! Les bras m’en sont tombés. C’était tout à fait inédit dans l’histoire de la monarchie. Où allions-nous ? Je vous le demande.

Bah…
Ne répondez pas. J’exile tous ces magistrats licencieux à Troyes. Le peuple les soutient, leurs collègues de province aussi. Pour calmer les esprits, je renonce à l’édit de subvention territoriale, promet la convocation des Etats généraux pour 1792 et autorise les magistrats à revenir à Paris. Cependant, il faut toujours trouver un autre moyen de renflouer les caisses.

Vous convoquez le parlement pour voter un nouvel emprunt. Les débats sont houleux, pour ne pas dire explosifs.
Mon cousin, le duc d’Orléans a même eu l’outrecuidance de dire que la procédure était illégale, ce à quoi j’ai répondu : « C’est légal parce que je le veux ! ». Je l’exile sur ses terres. Suite à ce coup de force, j’envisage, avec l’appui de mes ministres Brienne et Lamoignon de cantonner les pouvoirs du parlement aux seules questions de justice, afin de pouvoir faire avancer les choses. Je réserverai la vérification et l’enregistrement des actes royaux au profit d'une « cour plénière » dont je nommerai les membres.

Les magistrats s'insurgent contre cette idée. A ce moment, il y a un acteur nouveau que la monarchie n’a pas su prendre en considération, ou du moins trop tardivement, c’est l’opinion publique. Les parlementaires recevront le soutien du peuple parisien en publiant une déclaration des lois fondamentales du royaume, dans laquelle ils rappellent qu'ils sont seuls gardiens des lois et que la création de nouveaux impôts est du ressort des Etats généraux.
Non mais on marche sur la tête ! J’ordonne l’arrestation des instigateurs de ce mauvais libelle. Ensuite, je convoque un lit de justice pour enregistrer la réforme. La plupart des parlements de province entrent en résistance. Des émeutes éclatent en Province, notamment à Grenoble, suite à la répression de la tenue illégale d’une assemblée provinciale.

Il s’agit de la journée des Tuiles du 7 juin 1788. La situation est bloquée. Le Parlement n’enregistre plus les lois et les nommés refusent de siéger à la cour plénière.
Et cerise sur le gâteau, le royaume est à la limite de la banqueroute. Le clergé a refusé de procéder à un nouveau don et réclame la tenue des Etats généraux. Eh bien, ils les auront leurs Etats généraux.

La situation est inextricable.
Tous ces obstacles insurmontables m’épuisent. Je suis usé par tous ces aristocrates et magistrats de haute cour, arc boutés sur leurs privilèges de classe, intéressés uniquement par leur intérêt personnel en faisant fi du bien-être général. La mélancolie m’atteint. Je passe de plus en plus de temps à la chasse. Je délaisse une partie des affaires. La reine me supplée. Elle commence par renvoyer Brienne et rappelle Necker. Il ne manquait plus que cet arrogant.

Partie 7 : 1789 => 

<= Partie 5 : le Ministère Calonne

Sources

Texte :
- PETITFILS Jean-Christian : Louis XVI, Perrin, 2021, 1183p
- Louis XVI, Historia thématique, n°99, janvier-février 2008, 88p.
- Louis XVI, Marie-Antoinette et la Révolution : la famille royale aux Tuileries, exposition aux Archives Nationales, Paris, 2023.

 

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