Napoléon Ier et la campagne de Russie
En 1807, Napoléon Ier domine une
grande partie de l’Europe. La paix avec la Russie est signée. Le traité prévoit que la Russie doit déclarer la
guerre au Royaume-Uni, ennemi des Français, et cesser de commercer avec eux.
Seulement le tsar Alexandre Ier continue d’ouvrir ses ports aux navires
britanniques. Ce commerce est vital pour l’économie de son pays. De plus, il ne
voit pas d’un bon œil la résurrection de la Pologne et la présence de troupes françaises sur
sa frontière occidentale.
Napoléon considère cette décision
comme la preuve du non respect du traité. Le 24 juin 1812, 600.000 soldats
traversent le fleuve Niémen, sans compter les civils (ingénieurs, médecins,
marchands, artisans, femmes et enfants des officiers). Toutes les langues
européennes sont parlées dans cette armée, car la France enrôle ses soldats
dans tout l’empire.
Napoléon souhaite mener une
guerre rapide pour forcer le tsar à respecter les engagements du traité. Depuis
Austerlitz, Alexandre Ier sait qu’il n’est pas un grand chef militaire. Il
laisse le commandement de l’armée au général Koutouzov. L’armée russe est
composée essentiellement de paysans enrôlés pour 25 ans en échange de leur
liberté à la fin de leur service. Ils savent que les chances de revenir vivant
sont faibles. Le régiment devient une nouvelle famille, ce qui explique la
force de l’armée russe. Koutouzov fait de cette guerre une lutte patriotique
pour la Russie
et contre la tyrannie de Napoléon sur les peuples russes et français. Dans les
villages, les Français placardent des affiches pour exhorter les habitants à se
rebeller contre le servage et l’autoritarisme de la noblesse. Seulement, les
Russes n’ont pas connu d’invasions depuis trois siècles. Ils assimilent les
Français aux hordes tartares du XVIe siècle et demeurent fidèles malgré leur
condition sociale très rude.
La première véritable
confrontation se déroule le 27 juin près de Vilnius et se solde par une
victoire française. Les Lituaniens accueillent Napoléon en libérateur et
espèrent réintégrer le duché de Pologne. Les Russes ne cessent de battre en
retraite. Napoléon enrage contre ces pleutres. Il est privé d’une grande bataille
qui lui apporterait à coup sûr la victoire. Les Russes pratiquent la politique
de la terre brûlée. L’armée française manque de fourrage pour les chevaux et de
blé pour le pain. Les animaux meurent. Les hommes tombent malade. Les pluies
torrentielles de juillet ruinent le moral des troupes. En revanche, le mois
d’août est caniculaire et l’eau manque. En deux mois, l’armée s’est réduite à
cause des morts, des malades, des déserteurs et des troupes laissées en arrière
pour tenir les territoires occupés.
Le 16 août 1812, les Français
assiègent Smolensk. Les combats engendrent des incendies. La ville, construite
en bois, se consume dans les flammes. Les habitants meurent brûlés ou
asphyxiés. La population russe commence à se demander pourquoi son armée
n’intervient pas. Les soldats ont honte de reculer sans cesse face à l’ennemi.
Au début du mois de septembre
1812, Alexandre Ier somme Koutouzov de défendre Moscou. Le général installe ses
positions à Borodina à 125km de la ville sur les rives de la Moskova. 300.000 hommes
se retrouvent. Napoléon jubile de voir les Russes enfin décidés à se battre. Il
lance l’attaque le 6 septembre. Au prix de lourdes pertes de part et d’autres
(45.000 morts russes et 28.000 français), les Français enfoncent les défenses
russes. Koutouzov, ayant perdu un tiers de son armée, préfère se replier sur
Moscou.
Le 14 septembre, Napoléon pénètre
dans la capitale désertée par l’aristocratie et les notables. Il s’installe au
Kremlin. Des incendies se déclarent dans la ville. Après enquête, l’Etat major
découvre que ces incendies sont volontaires. Le comte Rostopchine, gouverneur de
la ville, a ordonné à des repris de justice de détruire tout ce qui peut être
utile aux Français. 60% des maisons sont détruites. L’université, le théâtre et
les églises partent en fumée. Avec l’incendie de Moscou, Alexandre Ier perd le
soutien de son peuple. Il attribue les incendies aux Français. Un nouvel élan
patriotique se lève pour lutter contre ces envahisseurs ne respectant rien et
détruisant la capitale historique de la Russie.
Les Français procèdent aux exécutions des Moscovites accusés
d’allumer les incendies.
Ayant pris la capitale, Napoléon
Ier considère qu’il est victorieux et que, de ce fait, Alexandre Ier n’a pas
d’autres choix que d’entamer les pourparlers de paix. Seulement, le tsar refuse
toutes négociations. Signer la paix reviendrait à capituler et il risquerait
d’être renversé par l’armée et le peuple russe. Napoléon ne souhaite pas passer
l’hiver dans une ville dévastée et être absent de Paris trop longtemps. Comprenant
qu’Alexandre ne changera pas d’avis, il se résigne à quitter Moscou le 17
octobre.
Koutouzov lance sa cavalerie
légère pour harceler le convoi français et l’obliger à passer par le même
chemin qu’à l’aller. L’armée napoléonienne emprunte une route où ils ont déjà
consommé toutes les ressources. Les Français retraversent les champs de
bataille de la Moskova. La
terre, transformée en boue, laisse les cadavres apparents. Les soldats
s’interrogent sur l’utilité de tels sacrifices.
Au début du mois de novembre, la
neige commence à tomber et les températures à descendre en dessous de zéro. Les
chevaux sans fer clouté avancent avec peine et nombreux sont ceux qui meurent
d’épuisement. Les hommes ne sont pas équipés pour affronter les rigueurs de
l’hiver, vu que la campagne a débuté en été et qu’elle ne devait pas excéder
deux mois. La colonne se disloque. Les trainards, qui ne meurent pas de froid,
sont abattus par les cosaques.
Le 6 novembre, Napoléon regagne
Smolensk avec le reste de son armée, soit 40.000 hommes. Koutouzov le talonne
avec 80.000 hommes. Le général russe attend des renforts du Nord devant couper
la route des Français. Une seconde armée installe des défenses à Borisov sur la
rivière la Bérézina. Les
Français ne peuvent la traverser, car les Russes ont détruit le pont. Les
éclaireurs découvrent à treize kilomètres au nord un passage à gué.
Le 26 novembre, Napoléon ordonne
de réparer le pont de Borisov. En réalité, il s’agit d’une diversion pour
attirer l’attention des Russes, tandis que les Français construiront des ponts
au niveau du gué, afin de pouvoir s’échapper. Le 28, les Russes comprennent la
supercherie et se mettent en mouvement prenant les Français en tenaille de
chaque côté de la Bérézina. Napoléon
donne l’ordre de détruire les ponts pour empêcher les Russes de déferler sur
ses arrières. Les Russes massacrent les personnes n’ayant pas eu le temps de
traverser. Certains Français meurent noyés en voulant traverser la rivière
gelée. Après d’âpres combats sur l’autre rive, les Français parviennent à
s’échapper. Le 12 décembre 1812, Napoléon regagne l’Allemagne avec 30.000
survivants, soit 5% de l’effectif initial. Les Russes ont perdu 300.000 hommes
dans cette guerre.
Bien qu’il ait remporté toutes
les batailles, Napoléon a perdu la guerre de Russie. En France, le prestige de
l’empereur n’est pas terni. C’est la première fois que l’empereur perd une
bataille en douze ans et l’opinion publique ne lui en tient pas rigueur. De
plus, c’est l’hiver rigoureux qui a terrassé les Français et non pas l’armée
russe. Néanmoins, cette défaite marque le début du déclin de l’empire. Pour les
autres nations d’Europe, Napoléon n’est plus invincible.
La campagne de Russie a donné
naissance à l’expression française « c’est une Bérézina », décrivant
un échec cuisant ou une situation compliquée et désagréable.
Sources
Texte :
HOURLIER Fabrice, Napoléon : la
campagne de Russie, France, 2014, 100min
Image :
La retraite de Russie illustrée par Adolph Northen ; http://fr.cdn.v5.futura-sciences.com
Retrouvez notre article sur la bataille de Smolensk
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