7 septembre 1812 : La Bataille de la Moskova - L'Enfer de Borodino lors de la Campagne de Russie de Napoléon

Le 7 septembre 1812, une clameur guerrière déchira le silence des plaines russes autour du village de Borodino, près de la Moskova. Ce jour-là, la Grande Armée de Napoléon affronta les forces de l’Empire russe dans une confrontation titanesque qui restera gravée dans l'histoire comme l'une des batailles les plus sanglantes des guerres napoléoniennes. La bataille de la Moskova, ou bataille de Borodino, fut un véritable cataclysme humain où des dizaines de milliers de soldats perdirent la vie pour quelques kilomètres de terre brûlée.


En 1812, Napoléon Bonaparte régnait sur une grande partie de l'Europe. Son ambition démesurée l’avait poussé à vouloir subjuguer toutes les puissances continentales, et la Russie était l'un de ses derniers obstacles. L’alliance franco-russe, scellée en 1807 après la bataille de Friedland, avait progressivement périclité. L’Empereur Alexandre Ier de Russie, résistant à la pression du blocus continental imposé par Napoléon contre l’Angleterre, refusait de se plier aux volontés de l'Empereur des Français. Irrité et déterminé à forcer la Russie à se soumettre, Napoléon lança une gigantesque expédition en juin 1812, avec plus de 600 000 hommes constituant la Grande Armée, un rassemblement cosmopolite de soldats venus de tout son empire. La campagne de Russie s'avéra être une entreprise hasardeuse et brutale. Les vastes étendues russes se transformèrent en piège mortel, avec des conditions climatiques extrêmes, des routes mal entretenues, des ressources rares, et une armée russe pratiquant la politique de la terre brûlée, ne laissant que des villages désertés et des champs incendiés dans leur retraite. Cependant, Napoléon, imperturbable, poursuivit sa marche vers Moscou, espérant forcer les Russes à une bataille décisive qui mettrait fin à la guerre. Cette confrontation inévitable eut lieu à Borodino.


Les forces françaises atteignirent les environs de Borodino début septembre. Devant elles, l'armée russe, sous le commandement du général Mikhaïl Koutouzov, s'était retranchée sur une position défensive solide. Avec environ 120 000 hommes et plus de 600 canons, l’armée russe avait l’avantage du terrain, notamment grâce aux redoutes fortifiées comme la Grande Redoute, ou redoute Raïevski, et les flèches de Bagration, qui formaient une ligne défensive redoutable.


Napoléon, bien que souffrant de fièvre, inspecta le champ de bataille à cheval et décida de lancer un assaut frontal massif. Avec environ 130 000 hommes et 587 canons, il espérait briser la ligne russe par une démonstration de force brute. Cependant, contrairement à ses habitudes, il se montra réticent à déployer la Garde impériale, son unité d'élite, préservée pour l'éventuel moment décisif. Le plan de Napoléon reposait sur la pression constante et une attaque méthodique. Dans l'aube grise et froide du 7 septembre, l'ordre fut donné.

Dès 6 heures du matin, les premières salves d'artillerie secouèrent le sol comme le grondement d'un orage. Les Français avancèrent, dirigés par le maréchal Davout, sur le flanc droit russe. L’air était saturé de fumée noire, et le fracas des canons et des fusils créait une cacophonie dantesque. Les hommes de la Grande Armée s'élancèrent à travers champs, sous le feu nourri des batteries russes. Le sang commença à couler sur la terre de Borodino, et la boue se mêla aux cadavres. Les combats autour des flèches de Bagration furent parmi les plus intenses de la journée. Ces redoutes, défendues avec acharnement par les troupes russes, devinrent un abattoir où chaque mètre carré de terrain fut disputé avec rage. Les colonnes françaises avançaient, étaient repoussées, puis revenaient à la charge dans un cycle infernal de feu et d’acier. Le maréchal Ney, surnommé "le Brave des Braves", mena personnellement plusieurs attaques, galvanisant ses hommes par son courage.


Pendant ce temps, au centre du dispositif russe, la Grande Redoute, sous le commandement de l’énergique général Raïevski, résista comme un roc. Les Français tentèrent à maintes reprises de prendre cette position clé. L’infanterie, soutenue par l’artillerie et la cavalerie, se heurta à des murailles de feu et de baïonnettes. La redoute changea de mains plusieurs fois, chaque assaut laissant des centaines de morts et de blessés sur le sol.

Vers midi, malgré les pertes horribles de part et d’autre, aucune percée décisive n'avait encore été réalisée. Napoléon, observant la bataille depuis une colline, hésitait à engager sa Garde impériale. Cette force intacte aurait pu faire pencher la balance en faveur des Français, mais l'Empereur redoutait une contre-offensive russe et préférait garder sa réserve stratégique. Cette hésitation de Napoléon est souvent critiquée par les historiens comme une occasion manquée de remporter une victoire éclatante. Néanmoins, il lança la cavalerie lourde de Murat, les cuirassiers, dans des charges dévastatrices pour tenter de briser la résistance russe au centre. Les charges, bien que spectaculaires, furent finalement repoussées avec de lourdes pertes.


Enfin, dans l’après-midi, un ultime assaut français mené par les divisions de Ney, Davout et Eugène de Beauharnais réussit à capturer la Grande Redoute. Cet exploit, au prix d’une boucherie sanglante, força les Russes à reculer légèrement. Toutefois, la fatigue, les blessures et le manque de renforts empêchèrent les Français de poursuivre leur avantage.


À la tombée de la nuit, la bataille s’éteignit peu à peu, comme le souffle d’un vent de mort. Les deux camps étaient épuisés, brisés par la violence inouïe de la journée. Sur le champ de bataille, près de 70 000 hommes gisaient, tués, blessés ou portés disparus. La Grande Armée de Napoléon perdit environ 30 000 hommes, tandis que l’armée russe, qui avait subi d’intenses bombardements et des assauts répétés, comptait près de 40 000 pertes. La bataille de Borodino devint le symbole de la futilité d'une guerre d'attrition, où la gloire militaire se mêlait inextricablement à l’horreur. Bien que les Français aient pu revendiquer une victoire tactique en occupant le champ de bataille, l’armée russe ne fut pas détruite. Koutouzov ordonna une retraite stratégique le lendemain, préservant ainsi ses forces pour continuer à harceler la Grande Armée. Napoléon, quant à lui, entra à Moscou quelques jours plus tard, mais la ville était vide, ses habitants l’ayant abandonnée et incendiée.

La bataille de la Moskova marqua un tournant décisif dans la campagne de Russie. Ce qui semblait être une victoire se révéla un piège fatal. L’armée française, loin de ses bases, épuisée par les combats et minée par la faim et la maladie, était incapable de maintenir son occupation. La retraite de Russie, l’un des épisodes les plus tragiques de l’histoire militaire, vit la Grande Armée se désintégrer sous les coups du général Hiver et des incessantes attaques russes. Napoléon, ayant sous-estimé la ténacité des Russes et les défis logistiques colossaux d’une telle campagne, vit sa Grande Armée se réduire à une ombre de ce qu’elle avait été. La bataille de Borodino, bien que remportée, signa en réalité le début de la fin pour l'Empire napoléonien.


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