Quand les habitants de Bologne volaient les dents des saints pour soigner leurs maux au Moyen Âge

Découvrez comment, au Moyen Âge à Bologne, les fidèles volaient les dents des saints pour apaiser leurs douleurs. Une histoire vraie, insolite et fascinante.
Le saviez-vous ?
À Bologne, au cœur de l’Italie médiévale, les habitants n’hésitaient pas à arracher les dents… des saints eux-mêmes, pour soulager leurs douleurs dentaires ! Cette curieuse habitude, mêlant foi ardente et superstition populaire, a marqué les chroniques du XIIIe siècle.
Ce geste peut sembler absurde aujourd’hui, mais il révèle la profondeur du rapport entre le corps, la foi et la souffrance dans la culture médiévale. À une époque où la médecine était balbutiante, l’espérance de soulagement s’enracinait davantage dans le miracle que dans la science.
Les saints dentaires de Bologne
Au Moyen Âge, les douleurs dentaires étaient redoutées : sans anesthésie ni soins modernes, une simple carie pouvait devenir un calvaire. Les Bolognais, réputés pour leur érudition avec leur université fondée en 1088, n’en restaient pas moins profondément croyants. Et quand la douleur devenait insupportable, ils se tournaient vers des remèdes… pour le moins singuliers.
Les praticiens de l’époque, souvent des barbiers-chirurgiens, proposaient des extractions brutales, sans aucune hygiène. Face à cela, les croyants plaçaient tous leurs espoirs dans l’intercession divine, espérant que les saints puissent les guérir à distance, à défaut d’un bon dentiste.
Dans certaines églises de la ville, les fidèles se pressaient autour des reliquaires contenant des ossements de saints. Les plus populaires étaient ceux de saint Apollinaire et sainte Apollonie, tous deux associés aux maux de dents. Mais certains dévots franchissaient les limites : ils glissaient une main discrète dans le reliquaire pour subtiliser… une dent du saint ! Une fois chez eux, ils plaçaient la précieuse relique sous leur oreiller ou la frottaient contre leur joue endolorie, persuadés qu’elle agirait comme un baume miraculeux.
On croyait que les reliques transmettaient la « vertu » du saint, une énergie sacrée capable d’agir directement sur le corps du malade. Les témoignages de guérisons miraculeuses circulaient de bouche à oreille, renforçant le prestige des églises qui en possédaient.
Un trafic de dents sacrées
Quand la piété flirte avec le vol
Les prêtres, d’abord médusés, finirent par remarquer les disparitions étranges. Des dents manquaient, parfois même des petits fragments d’os. À croire que les saints se décomposaient d’eux-mêmes ! Mais les soupçons montèrent vite : un commerce parallèle de « fragments de saint » s’était développé dans la ville.
Les ecclésiastiques finirent par tenir un inventaire méticuleux des reliques, notant toute disparition suspecte. Cette surveillance accrue témoigne d’une inquiétude réelle : les fidèles risquaient de tomber dans une forme de superstition incontrôlée, menaçant la doctrine orthodoxe de l’Église.
Une foi qui n’avait pas froid aux dents
Ce phénomène atteignit un tel point que certains sanctuaires commencèrent à fixer les reliques avec du fil de fer, voire à les sceller dans des vitrines de verre. Mais les plus malins parvenaient toujours à prélever un petit éclat, même minuscule, convaincus que la puissance divine s’y trouvait tout entière. Dans une chronique du moine Salimbene de Parme, on rapporte même qu’un dentiste de fortune aurait proposé de tailler les reliques en minuscules morceaux, vendus comme des « pilules de sainteté »… à prix d’or.
La croyance populaire, quant à elle, n’établissait pas de frontière claire entre foi, magie et médecine. En réduisant les reliques en poudre ou en fragments, on tentait littéralement d’ingérer le sacré pour mieux se protéger de la douleur ou de la maladie.
Un sourire médiéval un peu grinçant
Si l’histoire prête à sourire aujourd’hui, elle révèle à quel point la frontière entre foi et superstition pouvait être ténue au Moyen Âge. L’obsession pour les reliques, typique de cette époque, prenait parfois des formes cocasses, voire absurdes. Les habitants de Bologne n’étaient pas fous : ils étaient simplement désespérés, prêts à tout pour un peu de soulagement… même à arracher les dents des morts les plus sacrés.
Cette anecdote illustre aussi le contraste entre la haute théologie scolastique qui se développait dans les universités italiennes et les pratiques populaires, plus instinctives. Les érudits condamnaient ces abus, mais peinaient à enrayer des croyances aussi profondément ancrées dans les mentalités.
Heureusement, les progrès médicaux ont depuis relégué ces pratiques aux oubliettes. Mais l’anecdote subsiste, nous rappelant que la douleur — surtout celle d’une dent — peut pousser l’homme à des actes aussi pieux qu’insolites !
Aujourd’hui encore, certaines églises italiennes conservent ces reliques mutilées, témoins silencieux d’une foi aussi intense que physique. Elles rappellent que le Moyen Âge n’était pas seulement une époque d’ignorance, mais aussi de ferveur corporelle et d’imagination religieuse débridée.
Source :
Pour approfondir ce sujet, vous pouvez consulter l’article suivant :
Croyances dentaires médiévales : saints et reliques – Histoire & Médecine
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