Chang’An : mégalopole du Moyen-âge
Chang ’An, en Chine, est l’une des villes les plus
importantes et les plus prospères du monde entre le VIIe et le IXe siècle. Elle
compte 150.000 habitants à sa création. Sa population culmine à 2 millions
d’habitants sous les Tang.
Plan et voies de circulation
En 582, l’empereur Wendi fait édifier une nouvelle
capitale. Il charge son architecte Yumen Kai de dessiner les plans et de superviser
les travaux qui durent neuf mois seulement. Elle se compose de trois
éléments : la cité interdite, le palais impérial et le reste de la ville.
Dès la conception de la ville, les autorités ont décidé de l’emplacement des
zones résidentielles et commerciales.
La ville est conçue selon un plan en quadrillage.
Les rues se coupent en angle droit, qui divisent l’agglomération en 108
quartiers. Trois avenues partent des portes méridionales pour aboutir à la cité
impériale et les trois rues reliant les trois portes de l’est aux trois portes
de l’ouest sont les six artères principales canalisant la circulation. Leur
largeur varie entre 55 et 155 mètres et entre 35 et 65 mètres pour les rues
ordinaires.
Toutes les rues sont bombées au milieu, afin de
permettre l’écoulement des eaux dans les fossés creusés de chaque côté. Au
début des planches de bois recouvrent ces fossés. Par la suite, un pavage en
céramique s’y substitue. Recouverte de terre battue, les rues sont bordées
d’arbres au feuillage abondant et aux fleurs odorantes. Les arbres procurent
ombre et fraicheur et masquent les puanteurs. La ville est dotée d’un grand
nombre d’espaces verts.
Enceintes et remparts : une ville à la pointe de la sécurité
La ville est enfermée dans une immense enceinte
longue de 40 km. L’épaisseur des murs varient entre 9 et 12 m. A l’extérieur,
une douve fait le tour de l’enceinte. Trois portes s’ouvrent dans chacun des
quatre murs d’enceinte.
De plus, chaque quartier de la ville est entouré
d’un haut mur de défense et constitue ainsi une unité isolée facilement défendable
et contrôlable par les autorités. Ces quartiers ne peuvent pas s’agrandir et
sont donc destinés à accueillir un nombre prédéterminé de personnes. Les
remparts internes limitent les risques d’insurrection.
Il est interdit de circuler dans la ville après le
coucher du soleil. Des roulements de tambour annoncent le début puis la fin du
couvre-feu. Toute personne découverte dans la rue durant le couvre-feu est
arrêtée. Exception faite des membres de la sûreté, des médecins et des
habitants se rendant pour une urgence auprès d’un médecin. Les moyens de
transport les plus répandus restent la charrette et le cheval. Les femmes se
déplacent généralement dans un char à bœuf aux rideaux fermés.
Se loger et se divertir à Chang'An
Les habitations ouvrent sur des ruelles ou des
petits passages. Il n’y a aucune ouverture sur les rues principales.
L’intérieur est ainsi protégé de la poussière, du bruit et des regards
indiscrets. Il n’y a pas de table, ni de chaises. On s’assoit sur le lit ou on
s’agenouille sur un tatami. Les lits sont très grands, plats et durs. Ils
s’élèvent à 60 cm du sol. Un tabouret sert de marchepied.
Les vêtements constituent des indications quant à
la profession, au grade administratif et au statut social. Par exemple, les
roturiers portent du blanc, les soldats du jaune et les marchands du noir.
Parmi les dizaines de jeux existant, l’un des plus
populaires est le changxing (la longue marche) : sur un tableau en
fonction de ce qu’indiquent les dés, les joueurs déplacent des jetons noirs et
jaunes. Un autre est le shuang lu (double six).
Comédiens et danseurs interprètent de nombreuses
pièces tant chinoises qu’étrangères. Des jongleurs et autres saltimbanques
arpentent les rues. Les combats de coqs sont également très en vue. Le polo,
originaire de Perse, est un sport très répandu. Il se joue à cheval, avec des
maillets munis de longs manches et une petite balle que chaque équipe s’efforce
de pousser vers les buts adverses. Les Chinois fabriquent eux-mêmes des balles
en bois, recouvertes de cuir. La partie se déroule sur un vaste terrain comme
celui du Jardin du Poirier.
Une fois par an se déroule la fête des lanternes : pendant trois
nuits de suite la ville ne connait pas de couvre-feu, afin que tous les
habitants puissent admirer les illuminations dans les rues.
Faire ses courses à Chang'An
Les deux marchés occupent chacun une superficie
équivalente à deux quartiers. Situé à proximité des quartiers riches, le marché
de l’est est le plus paisible et le moins encombré. Le commerce est uniquement
réalisé dans ces deux espaces. Chaque marché compte 220 boutiques, dont les
étalages regorgent de marchandises variées. Certaines proviennent du
Proche-Orient via la route de la Soie. Le bureau des marchés abrite les
services administratifs. Leur mission consiste à s’assurer des horaires
d’ouverture et de fermeture des marchés (de midi au coucher du soleil).
On trouve au marché de l’ouest, une nouvelle
boisson qui fait fureur : le vin de raisin. Cette boisson possède un gout
plus délicieux que les boissons fermentées à base de céréales (riz ou orge). Le
raisin est un fruit exotique et rare apporté de l’Occident. Les Chinois ne boivent
jamais de vin durant le repas. Cette boisson est consommée en digestif. Lors
d’un banquet, la coutume veut que chaque convive boive une coupe de vin tour à
tour. La coupe faisait « la tournée ». On continuait ainsi jusqu’à ce
que l’un des convives n’arrive plus à boire. Le perdant recevait un gage.
Les habitants boivent beaucoup de thé. Le
gouverneur Changguan invente une méthode particulière pour préparer de la pâte
de thé moulue. Exposées à la vapeur, les feuilles étaient ensuite passées au
four puis réduites en poudre. Cette poudre n’existe plus en Chine, mais on
l’utilise encore au Japon lors de la cérémonie du thé. Côté nourriture solide,
les pâtisseries au froment connaissent un grand succès.
Les productions des joaillers perses sont également
appréciées. D’ailleurs deux quartiers possèdent chacun un grand temple
zoroastrien destiné aux Persans adorateurs du feu. Ces bâtiments prouvent que
la communauté persane est assez importante.
Fastueuse capitale de l'empire chinois du VIIe au IXe siècle, Chang'An attire à elle les populations, les ressources et les produits de l'Orient et de l'Occident. Elle est l'une des plus grandes villes du monde et, à ce titre, elle peut être considérée comme l'un des centres du monde.
Sources
Texte :
- Henry SOONG : « Chang’An : un âge d’or dans le céleste
empire », in Les Grands Civilisations disparues, Reader’s Digest, Paris, 1980, Pp 232-243
- Nota Bene : « Chang’An : la plus grande ville médiéval »,
vidéo publiée en janvier 2025, https://www.youtube.com/watch?v=bKoKxICqigQ
Image : https://www.imdb.com/fr/title/tt27922374/mediaviewer/rm4046923009/
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