Bataille de Patay : le jour où l'avant-garde et Jeanne d'Arc renversèrent le destin de la France
Patay, 1429 : l'aube d'une revanche inattendue
Le 18 juin 1429, une journée qui semblait ordinaire dans la campagne française allait devenir l'un des plus grands tournants de la guerre de Cent Ans.
Le ciel, d'un bleu laiteux, laissait filtrer un soleil timide. Les champs de blé ondulaient sous la brise, inconscients de l'orage de métal et de sang qui allait bientôt s'abattre sur eux. Sur les sentiers cahoteux, des milliers d'hommes avançaient, poussiéreux, armés de lances, d'épées et d'arcs. Parmi eux, une silhouette rayonnante : Jeanne d'Arc, la jeune pucelle de Domrémy, portée par une foi que rien ne semble pouvoir ébranler.
Depuis sa première apparition à la cour de Charles VII quelques mois auparavant, Jeanne avait changé la face de la guerre. Là où régnait le découragement, elle insufflait espoir et combativité. Ses victoires récentes à Orléans, Jargeau, Meung-sur-Loire et Beaugency avaient fait d’elle bien plus qu’un symbole : elle était devenue l’âme vivante de la résistance française.
Pour les paysans, pour les artisans, pour tous ceux qui souffraient des lourdes impositions de la guerre, Jeanne n'était pas seulement une guerrière : elle était une promesse. Celle d'une France qui renaîtrait.
Le contexte désespéré d'une France morcelée
Depuis près de 90 ans, la France est déchirée. Les descendants des Plantagenêt revendiquent la couronne française, soutenus par les Bourguignons. L'invasion anglaise a plongé le royaume dans la division, la ruine, la désolation.
Les campagnes sont désertées. Les forêts sont devenues des repaires de pillards. La peste noire, survenue quelques décennies plus tôt, a laissé un peuple exsangue, apeuré.
La cour de Charles VII, repliée à Bourges, est surnommée "la cour du petit roi de Bourges", tant son autorité paraît dérisoire. Ses conseillers hésitent, ses généraux doutent, ses partisans s’amenuisent.
Mais en ce printemps de 1429, contre toute attente, une lueur jaillit.
Avec Jeanne à leur tête, les Français réalisent l’impensable : lever le siège d'Orléans, bastion stratégique tenu par les Anglais. Ce succès enclenche une dynamique nouvelle. La Hire, Xaintrailles, Dunois et d'autres chefs de guerre retrouvent espoir. La France reprend son souffle.
L'armée anglaise en déroute
Face aux coups portés par Jeanne et ses compagnons, les Anglais sont contraints de se retirer vers le nord. John Talbot, Thomas Scales et John Fastolf rassemblent leurs forces autour de Patay, dans l'espoir de ralentir l'avance française.
Ils comptent réutiliser la recette de leurs succès passés : fortification rapide du terrain, position défensive renforcée par des archers protégés par des pieux. La stratégie a fonctionné à Azincourt. Elle a anéanti la fleur de la chevalerie française en 1415.
Mais Patay ne sera pas Azincourt.
Le rôle décisif de l'avant-garde française à Patay
Alors que l'armée française approche, La Hire et Xaintrailles mènent une avant-garde de cavaliers expérimentés. Ils progressent discrètement à travers la campagne, écoutant, observant.
C'est alors que le hasard intervient : des archers anglais, poursuivant un cerf imprudemment, révèlent leur présence par leurs cris.
Les éclaireurs français tendent l'oreille. La Hire sourit : l'ennemi est vulnérable.
Sans attendre l’arrivée du gros des troupes, l’avant-garde française se lance. La charge est immédiate, sauvage, irrésistible. Les archers, pris au dépourvu, sont massacrés avant de pouvoir planter leurs défenses.
En quelques minutes, l'équilibre de la bataille bascule.
La furie française : la charge de cavalerie
Dans la poussière soulevée par les sabots, la cavalerie française s’abat comme une tempête. Les chevaliers, les lances abaissées, traversent les lignes anglaises comme le vent renverse les hautes herbes.
Les archers tombent. Les fantassins fuient ou sont piétinés.
Talbot, fidèle à son courage, tente de regrouper ses hommes mais est rapidement submergé et capturé. Fastolf, lui, tourne bride et prend la fuite, abandonnant ses compagnons à leur sort.
Le massacre est total : près de 2 000 morts anglais contre quelques dizaines de Français.
Jeanne d'Arc : la flamme qui guide
Au cœur du tumulte, Jeanne n'a pas besoin de croiser le fer. Son rôle est plus grand : elle inspire, elle élève.
Elle circule parmi les soldats, brandissant son étendard, criant des paroles d'encouragement. Pour tous, sa simple vue suffit à chasser la peur.
Elle est la bannière vivante de la reconquête.
Sa voix, douce mais ferme, s'élève au-dessus du tumulte : "Avancez hardiment ! Dieu combat pour nous !"
Vers Reims : la marche triomphale
La victoire de Patay ouvre un boulevard vers Reims.
De villes en villes, la marche du roi Charles VII est une procession triomphale. Troyes, Châlons, Auxerre se soumettent sans résistance.
Le 17 juillet 1429, la vieille cathédrale de Reims retentit de chants et d’allégresse.
Charles VII, longtemps moqué comme "le roi de Bourges", est sacré roi de France. À ses côtés, Jeanne d'Arc, le visage baigné de larmes et de lumière, sait qu'une partie de sa mission est accomplie.
Les conséquences durables de Patay
Patay n’est pas qu’une victoire. C’est un séisme.
Les Anglais, jusqu’alors dominateurs, ne parviendront jamais à retrouver l’élan d’antan. Les Bourguignons commencent à douter de leur alliance avec l’Angleterre.
La confiance renaît dans les campagnes françaises. Le mythe de l’invincibilité anglaise s’effondre définitivement.
Charles VII, désormais roi couronné, peut entamer la longue reconquête du royaume.
L'ombre de Jeanne : mythe et tragédie
Hélas, la gloire de Jeanne est aussi éphémère que fulgurante. Capturée à Compiègne en 1430, elle est vendue aux Anglais. Son procès, orchestré par des ennemis politiques et religieux, la condamne comme hérétique.
Le 30 mai 1431, à Rouen, Jeanne est brûlée vive.
Mais ni le bûcher, ni l'oubli n'auront raison d’elle. Son nom traverse les siècles, plus vivant que jamais.
Après Patay : la reconquête d'une France meurtrie
Patay ne met pas fin à la guerre. Mais elle en change définitivement le cours.
Les années suivantes voient la reconquête méthodique du territoire français :
- Paris, longtemps sous domination anglaise, tombe.
- La Bourgogne finit par se rallier à Charles VII.
- En 1453, la bataille de Castillon met fin à la guerre de Cent Ans.
Ce mouvement aurait été impossible sans le choc psychologique provoqué par Patay.
Grâce à Patay, la France a pu redevenir maîtresse de son destin.
Conclusion : Patay, la bataille qui fit renaître la France
La bataille de Patay n'est pas seulement une victoire éclatante. Elle est le symbole d'un peuple brisé qui retrouve la foi en son avenir.
Sous l'étendard d’une simple bergère devenue guerrière, la France a brisé ses chaînes. Et son rugissement, ce jour-là, résonne encore à travers l'Histoire.
Sources
Stéphane Gondoin, Du siège d'Orléans à la bataille de Patay – 1428-1429, Histoire & Collections, 2000.
Découvrez l'histoire de Jeanne d'Arc en cliquant: ici
Retrouvez-nous sur Facebook et Instagram.
Un message à nous envoyer : lesitedelhistoire2@laposte.net
L'image d'illustration appartient à l'auteur. Si vous voulez l'utiliser, merci de bien vouloir demander l'autorisation par mail.
Commentaires
Enregistrer un commentaire