Bataille d'Adoua (1896) : Comment l'Éthiopie a vaincu l'Italie coloniale et marqué l'histoire
Table des matières
- Introduction : Un jour gravé dans l’histoire
- Le contexte : L’Europe, l'Afrique et la soif d’empire
- Portraits croisés : Ménélik II et Baratieri
- La veille d’Adoua : La nuit des décisions
- La bataille : Quand la terre trembla
- Après le fracas : L’écho d’Adoua dans le monde
- Mémoire vivante : Adoua aujourd'hui
- Conclusion : L’éternelle victoire
- Source bibliographique
Introduction : Un jour gravé dans l’histoire
À l'aube du 1er mars 1896, la terre éthiopienne retenait son souffle. Dans les montagnes rocailleuses d'Adoua, là où le soleil naît sur des pics d'obsidienne, deux mondes se faisaient face. D’un côté, l’Italie, parée des fastes de la modernité européenne. De l’autre, un peuple millénaire, attaché à sa terre, décidé à ne pas céder son âme.
Dans quelques heures, un affrontement sans merci allait inscrire en lettres de feu le nom d'Adoua dans l'histoire universelle. Pour la première fois depuis des siècles, une armée africaine allait repousser une armée coloniale européenne. Et bouleverser à jamais le regard du monde sur l'Afrique.
Le contexte : L’Europe, l'Afrique et la soif d’empire
La fin du XIXᵉ siècle est l'ère du "Scramble for Africa" – la grande ruée coloniale. Les grandes puissances européennes, avides de terres, de richesses et de prestige, se taillent sans vergogne des empires aux dépens des peuples africains.
L'Italie, tardivement unifiée, rêve elle aussi de gloire impériale. Elle s'empare de l'Érythrée, lorgne sur l'Éthiopie voisine, perçue comme faible, désunie, vulnérable.
Un traité est signé en 1889 : le traité de Wouchalé. Mais une subtile différence dans la traduction change tout : en italien, il implique un protectorat italien sur l'Éthiopie ; en amharique, il laisse à l'empereur son indépendance.
Ménélik II, qui lit l'avenir dans les courants du temps aussi bien que dans les parchemins, comprend rapidement la manœuvre. Et prépare son peuple à défendre sa souveraineté, coûte que coûte.
Portraits croisés : Ménélik II et Baratieri
Ménélik II : Le lion sage
Ménélik II n'est pas un chef de guerre ordinaire. Charismatique, diplomate rusé, stratège visionnaire, il modernise son royaume avec méthode : chemins de fer, télégraphes, canons Krupp venus d'Allemagne.
Son épouse, l’impératrice Taitu, partage sa fougue. Elle commande elle-même une partie des forces et inspire un profond respect aux troupes. Ménélik ne veut pas la guerre, mais il sait que l'indépendance se défend avec le sang.
Baratieri : Le général sous pression
Oreste Baratieri, vétéran des campagnes coloniales, croit pouvoir écraser les Éthiopiens rapidement. Mais il est acculé : ses hommes sont épuisés, ses vivres rares, ses lignes étendues sur un territoire hostile.
À Rome, le gouvernement exige la victoire, immédiate. Baratieri, pris au piège de l'orgueil et de la peur, décide d'attaquer, malgré ses doutes.
La veille d’Adoua : La nuit des décisions
La nuit du 29 février est glaciale sur les hauteurs d'Adoua. Sous un ciel d'encre, les colonnes italiennes avancent péniblement, divisées en plusieurs détachements selon un plan ambitieux mais irréaliste.
Les soldats trébuchent dans les ravins, perdent leur chemin. La discipline se délite. Les officiers crient dans la nuit, mais le vent emporte leurs ordres.
À l'opposé, dans les collines, l'armée éthiopienne est calme. Autour de feux de camp discrets, les guerriers prient, chantent doucement, affûtent l'acier de leurs lances. La rumeur court parmi eux : "Demain, nous écrirons l’histoire."
La bataille : Quand la terre trembla
À l’aube, un halo rougeâtre nimbe les montagnes. Et soudain, un son monte : les cloches d'Adoua sonnent à toute volée. C’est le signal. La terre semble vibrer alors que des dizaines de milliers d'hommes jaillissent des collines.
Le choc
Les Italiens, épars, n’ont pas le temps de se reformer. Les régiments sont submergés en vagues successives. Les balles sifflent, les lances percent, les sabres étincellent. Le sang rougit la poussière.
Les officiers italiens tentent de tenir. Certains, encerclés, meurent sabre au clair. D’autres jettent les armes et fuient, poursuivis par des cavaliers amhara hurlant leur fureur.
Le courage des Éthiopiens
Les pertes éthiopiennes sont lourdes. À chaque mètre gagné, des dizaines tombent. Mais ils avancent, inlassables, poussés par une foi immense.
Ras Makonnen, cousin de Ménélik et père du futur empereur Haïlé Sélassié, mène l'une des charges décisives, brisant les lignes ennemies comme une tempête fracasse un barrage.
À midi, tout est terminé. L'armée italienne est anéantie. Plus de 7 000 morts, des milliers de prisonniers. La bannière de l'Éthiopie flotte sur Adoua.
Après le fracas : L’écho d’Adoua dans le monde
La défaite d'Adoua est un séisme. À Rome, c’est la panique. Le gouvernement italien tombe. Les journaux européens parlent de "catastrophe" et de "bérézina africaine".
Ménélik II impose ses conditions : le traité d'Addis-Abeba est signé. L’Italie reconnaît pleinement l’indépendance de l’Éthiopie.
Le souffle d'Adoua
Aux États-Unis, les journaux afro-américains exultent. À Kingston, Port-au-Prince, Dakar, la victoire est chantée comme un espoir : l’homme noir peut vaincre l’homme blanc.
Adoua galvanise toute une génération de penseurs panafricains : Marcus Garvey, W.E.B. Du Bois, Kwame Nkrumah verront dans l'Éthiopie une étoile à suivre.
Mémoire vivante : Adoua aujourd'hui
En Éthiopie, le souvenir d'Adoua est sacré. Chaque 1ᵉʳ mars, les rues d'Addis-Abeba se remplissent de cortèges, de tambours, de chants patriotiques.
Statues, chansons, romans : la bataille est partout présente dans l'imaginaire collectif. Elle enseigne que la liberté est un combat quotidien. Que la dignité ne se négocie pas. Qu'un peuple uni, même face aux plus grandes puissances, peut écrire sa propre destinée.
Conclusion : L’éternelle victoire
La bataille d’Adoua n’est pas une relique figée dans le passé. C’est une flamme vivante, une leçon universelle.
Elle rappelle à l'Afrique — et au monde entier — qu'aucun empire, aussi puissant soit-il, ne peut écraser à jamais un peuple décidé à vivre libre.
En chaque battement de tambour, en chaque chant d'Adoua, résonne le même message : "La liberté n'est pas un don. Elle est conquise par ceux qui osent la revendiquer."
Source bibliographique
Lieutenant-colonel Jules Petetin, La bataille d'Adoua, 1er mars 1896. Étude tactique, Paris, réédition en impression à la demande.
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