Pharaons Cachés pendant 3000 ans : L'Histoire de la Cache de Deir el-Bahari
À la fin du XIXe siècle, l’Égypte est au cœur d’une véritable frénésie archéologique. Depuis que les premières grandes expéditions européennes ont révélé au monde les merveilles de l’Égypte ancienne, des centaines d’archéologues, de marchands d’art, et de passionnés se pressent dans les ruines et les nécropoles à la recherche de trésors millénaires. Les découvertes se multiplient, mais les sites sont souvent mal protégés, exposés aux pilleurs locaux et à la convoitise de certains chercheurs peu scrupuleux. C’est dans ce contexte troublé que la famille Abdel Rasul, modeste famille de bergers du village de Gournah, dans la région de Thèbes, fait une découverte qui changera le cours de l’égyptologie. En 1871, ils révèlent l’existence d’une tombe secrète à Deir el-Bahari, renfermant des dizaines de momies royales et de trésors intacts, dissimulés depuis plus de trois mille ans. Cette découverte inattendue, aussi précieuse que fragile, suscite la curiosité et la crainte des autorités égyptiennes, qui craignent une vague de pillages. Rapidement, l’égyptologue Gaston Maspero, épaulé par son collègue Émile Brugsch, se mobilise pour préserver ce trésor inestimable. Mais le temps presse, et une opération d'urgence va être lancée pour sauver la cachette des pharaons, enterrée depuis des millénaires.
En 1871, un certain Ahmed Abdel Rasul, membre d'une famille locale d'explorateurs clandestins, vivait dans la région de Louxor. Comme de nombreux villageois de la région, les Abdel Rasul avaient une longue tradition de fouilles dans la Vallée des Rois. Mais cette fois, la découverte allait surpasser tout ce qui avait été mis à jour jusqu'à présent. L’histoire que racontait Ahmed Abdel Rasul a tout d’un mythe. Selon lui, il gardait ses chèvres dans la vallée de Deir el-Bahari, une zone connue pour ses temples magnifiques, quand l’une de ses bêtes s’éloigna du troupeau. En la poursuivant à travers les collines rocheuses, il aurait trébuché sur une crevasse. Curieux, Ahmed serait descendu dans l’ouverture. Ce qu'il découvrit alors défia l’imagination : une tombe gigantesque, remplie de cercueils, de statues, et de trésors enfouis depuis des millénaires. Ce récit, savamment brodé, permettait à Abdel Rasul de masquer la véritable histoire de la découverte, une histoire de fouilles plus organisées et illégales menées par sa famille. Quoi qu'il en soit, la rumeur de la découverte finit par se répandre. Ce qui avait d'abord été le secret bien gardé d'une famille se transforma en une légende si puissante qu'elle atteignit rapidement les oreilles des autorités égyptiennes.
Ce n'est qu'en 1881 que l'égyptologue Gaston Maspero, alors directeur des Antiquités en Égypte, commença à soupçonner la présence d'une cache secrète. Les antiquités royales apparaissant sur les marchés clandestins s'avéraient trop précieuses, trop anciennes et, surtout, trop nombreuses pour provenir de fouilles isolées. Une source unique alimentait ce commerce florissant. C’est alors que Maspero envoya son collègue, l’archéologue allemand Émile Brugsch, à la tête d’une expédition dans la région de Deir el-Bahari. Brugsch et son équipe parvinrent à convaincre les membres de la famille Abdel Rasul de les conduire à la tombe. Lorsqu'ils pénétrèrent dans la nécropole, ils furent saisis d’émerveillement : la cachette, aujourd'hui nommée TT320, renfermait plus de cinquante momies royales et des centaines d'artefacts soigneusement conservés. Parmi les momies, on comptait des noms emblématiques de l’Égypte antique : Ahmôsis, le premier pharaon de la XVIIIe dynastie, Thoutmôsis III, le grand conquérant, Ramsès II, l'un des plus grands rois de tous les temps… Une véritable nécropole royale, dissimulée sous terre pendant plus de trois mille ans !
Une découverte d'une telle ampleur n’allait pas rester longtemps secrète. Le problème était que la tombe TT320 se trouvait à la merci des pilleurs. Et malgré les efforts de l'équipe, il était impossible de protéger ce trésor dans une région aussi exposée. Conscient de l’urgence de la situation, Émile Brugsch décida d’agir rapidement.
L'opération de sauvetage des momies royales reste un des épisodes les plus extraordinaires de l’histoire de l’archéologie. Dès que Brugsch réalisa l’ampleur de la découverte, il prit une décision radicale : en moins de 48 heures, toutes les momies devaient être exhumées et transportées à la sécurité du musée de Boulaq, au Caire.
Le 6 juillet 1881, au lever du soleil, l'expédition commença à sortir les corps vénérables des pharaons de leur sommeil millénaire. Imaginez le spectacle : des dizaines de cercueils royaux, ornés d’inscriptions et de dessins d’or, portés par des hommes fatigués mais conscients de la grandeur de leur tâche. Les momies étaient hissées une à une hors de la tombe, enveloppées dans des draps de lin et placées sur des felouques (bateaux à voiles) prêtes à descendre le Nil. Les tensions étaient palpables. Brugsch savait que la découverte attirerait rapidement des foules de curieux, de pilleurs et d’aventuriers de tous bords. Il n’avait que peu de temps pour sauver ces trésors de la rapacité humaine. Malgré la chaleur brûlante et les défis logistiques, l’opération fut un succès. Les momies furent transportées en secret au Caire où elles restèrent cachées jusqu’à ce que leur existence soit officiellement annoncée.
Mais une question demeure : pourquoi ces momies royales, autrefois enterrées dans la Vallée des Rois avec tous les honneurs, ont-elles été déplacées dans cette cachette anonyme de Deir el-Bahari ?
Les égyptologues pensent que la réponse se trouve dans les troubles de la fin du Nouvel Empire. L'Égypte, affaiblie par des conflits internes et externes, était en proie à des vagues de pillages. Les tombes royales de la Vallée des Rois, autrefois inviolables, devinrent la cible des voleurs avides de richesses. Pour préserver ces corps sacrés de la profanation, les prêtres de la XXIe dynastie prirent une décision audacieuse : les dépouilles royales de leurs glorieux ancêtres furent exhumées de leurs sépultures d’origine et secrètement réenterrées à Deir el-Bahari. Les momies étaient ainsi regroupées dans des cercueils anonymes, certaines déplacées plusieurs fois avant de trouver leur dernier repos dans la tombe TT320. Là, les pharaons reposaient dans l’ombre, protégés par la main vigilante des prêtres, jusqu'à ce que le monde moderne les redécouvre.
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