L’alliance Berlin - Tokyo durant la Seconde Guerre mondiale
La Seconde Guerre mondiale oppose les Alliés (États-Unis, Royaume-Uni, URSS, France) aux forces de l’Axe (Allemagne, Italie, Japon). L’alliance entre Berlin et Tokyo n’est pas naturelle. En effet, à la fin du XIXe siècle, les deux pays sont en concurrence pour se tailler des colonies dans la zone pacifique. Lors de la Première Guerre mondiale, le Japon choisit le camp des Britanniques et des Français. La marine japonaise a attaqué des navires allemands. L’armée leur a pris Tsingtao en Chine. Lors du Traité de Versailles en 1919, Tokyo reçoit les possessions allemandes du Pacifique. Durant l’entre-deux guerres, Berlin soutient l’armée chinoise en lutte contre l’oppresseur nippon.
La politique expansionniste du Japon en Chine lui attire l’animosité des puissances occidentales. Pour rompre son isolement Tokyo se tourne vers l’Allemagne nazie. Les deux pays partagent des valeurs et des sentiments communs : ultranationalisme, volonté expansionniste, culte de la force et de la violence. Hilter admire le caractère ancien de la civilisation japonaise et l’importance du sacrifice dans la culture nippone. Il existe néanmoins des différences. Les Japonais se posent en libérateurs du colonialisme blanc, tandis qu’Hitler ne dissimule pas sa volonté de réduire certains peuples en esclavage. Au Japon, on n’assiste pas à la prise du pouvoir par un parti unique. C’est l’armée qui dirige le pays. L’empereur garde son rôle de symbole national et d’arbitre suprême. En Allemagne, Hitler n’a personne au-dessus de lui. Enfin, l’antisémitisme est étranger à la mentalité japonaise, ce qui n’exclut pas le racisme surtout envers les Chinois. Les atrocités perpétrées par les troupes nippones sont aussi barbares que celles commises par les SS. Pour les Japonais, comme pour les Allemands, il s’agit de s’emparer par la force de territoires étrangers pour en faire des foyers de peuplement. Les deux Etats estiment avoir été lésés dans le grand partage colonial du monde. Les Japonais, contenus dans leur étroit archipel, manquent cruellement de matières premières (charbon, pétrole, caoutchouc). Le pacte tripartite découpe le monde en trois zones d’influence : le Pacifique pour le Japon, la Méditerranée pour l’Italie et l’Europe pour l’Allemagne.
Hitler perçoit le Japon comme un élément susceptible de détourner les forces britanniques et américaines d’Europe. Dès le 25 novembre 1936, le Japon et l’Allemagne signent un pacte permettant de prendre l’URSS en tenaille. Cependant, le Japon manque de chars et d’artillerie pour affronter les Soviétiques. En revanche, il dispose d’une marine et d’une aéronavale capables d’organiser des débarquements dans les îles. Aussi le Japon préfère renoncer aux plans d’une attaque conjointe de l’URSS. Le 27 septembre 1940, le Japon renforce ses liens avec l’Allemagne et l’Italie par le pacte tripartite. Dans les faits, cette alliance n’a que peu d’effets. Jamais durant le conflit, Allemands et Japonais se battent côte à côte. A l’inverse, Américains, Britanniques et Soviétiques multiplient les manœuvres combinées. Berlin et Tokyo ne disposent pas du contrôle des mers qui leur aurait permis de transporter du matériel et des troupes. De plus, 9000 km séparent les deux capitales. La coopération se fait exclusivement sur l’instruction et le renseignement. Des ingénieurs de la Luftwaffe sont venus observer l’aviation japonaise, tandis que des officiers de la marine japonaise sont venus inspecter les U-Boat. Il existe une seule base germano-nipponne, se situant en Malaisie qui a vu transiter six sous-marins parcourant le trajet entre les deux pays pour transporter des personnalités, des prototypes d’armes et des plans techniques. Par ailleurs, la confiance est loin de régner. L’invasion de l’URSS par les Allemands a été une surprise pour Tokyo. De même que l’attaque de Pearl Harbor a pris de court Berlin. Aucun des deux partenaires n’a jugé utile d’avertir l’autre de ses intentions. Par la suite, Japonais et Allemands ont eu tendance à se mentir, à exagérer leur succès et à minimiser leurs revers en prenant soin de cacher leurs crimes de guerre.
<= Précédemment : le basculement du Japon vers un Etat autoritaire
Source :
Texte : « Le Japon de l’Empire conquérant à la puissance économique (1868-1989), Géohistoire, n°33, janvier 2012, pp66-69.
Image : https://twitter.com/PhotosHistos/status/1015891250766077952
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