La bataille de Gergovie

 


- Bonjour chers lecteurs et lectrices. Je suis heureux de vous retrouver en cet été -52 sur l’oppidum de Gergovie en Averne (Auvergne) à quelques kilomètres au sud de l’actuelle Clermont-Ferrand, où les troupes gauloises de Vercingétorix subissent un siège des Romains mené par Jules César. Pour commenter avec moi ce siège et nous faire part de ses précieuses analyses, je suis en compagnie de Jean-Jacques Rageux, notre expert militaire. Bonjour Jean-Jacques. Avant de commencer, pouvez-vous nous expliquer comment nous en sommes arrivés à cette situation ?

- Bien sûr. Au début de l’année -52, les tribus du centre de la Gaule se sont soulevées. L’insurrection a débuté par le massacre de citoyens romains à Orléans (Cenabum). A l’hiver, César a pénétré en Gaule. Au printemps, il s’est emparé des villes d’Orléans et de Bourges (Avaricum) les a pillées et a massacré la population. Vercingétorix, jeune miliaire averne dont la légitimité semble s'être accrue, a pris la tête de la coalition. La défaite d'Avaricum a forgé son discernement et son sens stratégique, sans entamer le moral des Gaulois, dont les pertes sont annulées par des ralliements. Refusant la bataille rangée, Vercingétorix s’est réfugié dans l’oppidum (ville fortifiée) de Gergovie. Les Romains ont investi la plaine, installant un camp à 2.5 kilomètres en contrebas de la place forte.

- Oui, cela fait une multitude de tentes. Il en faut pour loger les 24.000 hommes des 6 légions. En face, le décompte exact des forces est inconnu. Il y a des Avernes, des Bituriges, des Nitiobriges, des Ruthènes, des Gabales. Au début, il n’y a eu que de petites escarmouches. Le premier gros contact a été la lutte pour s’accaparer cette colline là-bas.

- Tout à fait, rappelons que les Gaulois bénéficient de l’avantage du terrain, car ils sont positionnés en hauteur. César cherchait à améliorer ses positions. Il a employé deux légions pour déloger une troupe gauloise d’une colline située à 1.5km de l'oppidum. Il y a fait installer un petit camp ainsi qu'un double fossé de douze pieds de large qui permet aux Romains de circuler entre les deux camps en étant protégés des forces ennemies. Profitons-en pour saluer les prouesses des légionnaires romains capables de dresser un camp militaire en un temps record.

- Le deuxième gros accrochage s’est déroulé pendant l’absence de Jules César. Oui ! Mesdames et Messieurs, vous avez bien entendu ! Jules César est parti durant le siège !

- Il n’est pas parti en vacances. Il s’est porté à la rencontre des 10.000 cavaliers Eduens, des Gaulois alliés à Rome.

- Je me suis laissé dire que l’alliance est fragile. Il paraitrait que le chef Convictolitavis essaye de convaincre les autres aristocrates que l’intérêt de son peuple est plutôt d’aider les Gaulois luttant pour l'indépendance de leur territoire.

- Vous faites bien de souligner ce point. Derrière les motivations de ce retournement, il faut deviner un basculement politique dans le cadre de luttes politiques internes aux cités gauloises. La défection possible des Eduens serait un rude coup pour les Romains. Non seulement elle réduirait leur force militaire, mais elle est pourrait prendre à revers les assiégeants. César en est conscient. C’est la raison pour laquelle il s’est porté avec quatre légions à la rencontre de la cavalerie des Eduens menée par Litaviccos. Deux légions seulement restent aux camps, dirigées par le légat Caius Fabius.

- Durant l'absence de César, les Gaulois ont attaqué les camps romains. Bien qu'inférieures en nombre aux assaillants gaulois, les troupes de Fabius ont tenu. César est maintenant de retour avec les troupes éduennes. Ah ? Et on dirait qu’il est bien décidé à agir. J’aperçois des mouvements de troupes à l’Ouest. Eh ! Mais un instant ! Ce ne sont pas de véritables soldats ! Ce sont des muletiers déguisés !

- César crée une diversion pour dégarnir les défenses de l’oppidum. Pendant ce temps, il fait passer discrètement le gros de ses troupes du grand camp au petit camp.

- Vous avez tout à fait raison Jean-Jacques. Alerté par les défenseurs de la ville, Vercingétorix sort avec sa cavalerie pour défendre le flanc Ouest. César lance l’assaut sur le flanc Sud depuis le petit camp. Au centre, les légionnaires franchissent facilement la première ligne de défense sur les pentes du plateau. Ils se heurtent à un premier rempart de 1.8 mètres de haut. César, qui voit ses soldats rejetés, sonne la fin du combat. Mais ? Pourquoi ne bougent-ils pas ? Il semble que les Romains n'entendent pas le signal. Ils continuent à se battre jusqu'au-dessous des remparts. Les Eduens attaquent par la droite en sortant du grand camp. Mais que font-ils ? Les Romains attaquent les Eduens ! C’est incompréhensible ! Ils les confondent avec les assiégés.

- Dans la confusion des combats, les légionnaires ont oublié le signe de ralliement des Eduens : la manche de la tunique relevée.

- Vercingétorix, parti défendre le camp gaulois attaqué, revient vers Gergovie. Il lance une charge de cavalerie qui disloque les légions romaines, lesquelles doivent ensuite à nouveau faire face à l'infanterie gauloise. Les soldats parvenus à pénétrer dans la ville tentent de fuir. La retraite s'opère dans de très mauvaises conditions. Les Romains essuient des pertes importantes. César déploie une ligne de défense près de ses positions. Vercingétorix ne lance pas de poursuite plus avant, il tient la victoire. Les Gaulois sont donc vainqueurs, malgré des pertes inconnues mais néanmoins jugées faibles et inférieures à celles des Romains et de leurs alliés. Les premiers chiffres tombent. On fait état de 746 morts dans le camp romain.

- Il convient de prendre ce chiffre avec suspicion. César tient sans nul doute à cacher l’ampleur du désastre, afin de garder la confiance du Sénat. Le siège n'est plus tenable et les risques sont trop grands, compte tenu des maigres troupes rassemblées par César. De plus, ce chiffre omet les pertes éduennes. Je pense que plus de mille d’entre eux ont péri sous le double impact des Avernes et des Romains, se trompant d'adversaires.

- Selon vous Jean-Jacques, quelle sera la suite des évènements ?

- Après un tel coup, les Eduens se rangeront du côté des Avernes. Avec aussi peu d’hommes, César ne pourra pas maintenir le siège. Il cherchera une bataille rangée à l’extérieur. Vercingétorix ne lui fera pas ce plaisir. Il quittera la région pour remonter vers le Nord, afin de chercher du renfort. Quant à Vercingétorix, il se rendra à Bribacte, pour recevoir le commandement suprême des armées gauloises et poursuivre la lutte.

- Eh ben, merci Jean-Jacques pour vos précieuses analyses. Il est de nous quitter. Je vous dis à tous à très bientôt !

Sources

Texte : Visite du Musée de l’oppidum de Gergovie aout 2023

Image : https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/antiquite-guerre-gaules-bataille-gergovie-5616/

 

 

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