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Histoire de l'Italie : ep 9 - L'essor des Etats territoriaux

 


En 1260, Manfred l’oncle de l’empereur Conradien, s’arroge la couronne de Sicile, étend sa domination sur le sud de la Péninsule et la Sardaigne. Il s’allie avec Florence et Sienne pour conquérir une partie de la Toscane. Effrayé, le Pape sollicite le soutien de Charles d’Anjou détenteur de plusieurs seigneuries dans le Piémont. Le 26 février 1266, le Français écrase les armées impériales à Beneventi. Manfred meurt au cours de la bataille. Conradien se rend en Italie. Battu à son tour, il est décapité le 29 octobre 1268. Sa mort laisse le trône vacant. La Germanie sombre dans les luttes de pouvoir, délaissant l’Italie. Devenu roi de Sicile, Charles d’Anjou fonde la dynastie angevine. Il doit d’abord s’imposer vis-à-vis de la noblesse. Pour ce faire, il doit combattre et nommer des administrateurs français. Charles d’Anjou développe l’industrie textile et modernise les ports.

Le lundi de Pâques 1282, une rixe entre Français et des Siciliens embrase Palerme. Les villes siciliennes forment une ligue prônant l’indépendance. Elles sollicitent le soutien du Pape. Profitant de l’occasion Pierre III d’Aragon débarque sur l’île en se portant en libérateur. Il reçoit le soutien de la population. En 1302, le Pape établit un compromis. L’Aragon conserve la Sicile et les Angevins le royaume de Naples.

Au XIIIe siècle, l’affaiblissement du pouvoir impérial et papal permet la montée en puissance de nouveaux acteurs, tels les Visconti à Milan. En 1309, la Curie quitte Rome pour se réfugier en Avignon. Il faut attendre 1377 et l’élection de Grégoire XI, pape italien, pour voir le souverain pontife regagner Rome. Durant cette période, le Pape se tient à l’écart des affaires de la cité.

Au début du XIVe siècle, l’Italie compte 12 millions d’habitants. Les grandes villes regroupent jusqu’à 50.000 personnes. Elles sont les plus peuplées d’Europe. Les guerres incessantes et les mauvaises récoltes engendrent une sous-alimentation, qui constitue un terrain favorable au développement des épidémies. Les premiers cas de peste sont attestés en Sicile en 1347. En quelques mois, toute la péninsule est touchée suite à l’arrivée des navires marchands. En un siècle, la population passe de 11 à 8 millions d’habitants.

En Italie, les marins, les hommes d’affaires et les entrepreneurs occupent une position dominante dans l’économie. La mise en place de nouvelles formes de pouvoir dans les villes s’effectue dans un contexte de fortes tensions sociales. La noblesse militaire et marchande affronte une bourgeoisie faite de petits marchands et d’artisans. En juillet 1378, à Florence se déroule le tumulte de Ciompi. Il s’agit d’un assaut du palais de la Seigneurie par des artisans dirigés par un contremaitre Michele di Longo. Ils instaurent un gouvernement populaire. Incapables de s’entendre, ils sont battus en septembre. Les chefs sont exécutés à l’exception de di Longo qui réussit à quitter la ville. La tentative démocratique précipite la formation d’un régime oligarchique. Dans le piémont, la révolte des Tuchins (1386-1390) oppose les paysans aux propriétaires terriens. Après avoir pillé plusieurs châteaux, les Tuchins sont battus par le comte de Savoie. L’évolution politique des villes s’opère selon deux modèles : le principat dynastique et la république oligarchique.

La famille Visconti dirige Milan. En 1272, l’archevêque Ottone Visconti est appelé pour défendre la cité contre l’empereur. Le prélat mène une politique d’équilibre entre les factions, tout en vidant les institutions de leur substance. Il se forge une armée de mercenaires. Son neveu Matteo Visconti la dirige, avant de lui succéder. Sa descendance règne sur le duché durant 150 ans.

Au XIVe siècle, Venise est en rivalité avec Gênes. Les cités maritimes se livrent une guerre économique sur fond de piraterie, accompagnée de quelques batailles maritimes. Venise s’étend sur son arrière-pays, afin de former un glacis protecteur, contrôler les routes alpines et développer son agriculture. A l’inverse, Gênes ne réussit pas à se doter d’institutions stables. Face aux désordres internes se succédant, elle fait appel à Milan ou des souverains étrangers, dont le roi de France. Pise ne se relève pas de la défaite de la Melona en 1384, suite à laquelle elle perd de nombreux comptoirs. Les factions se disputent le pouvoir. La maladie ravage la cité. Florence assène le coup de grâce en 1406.

Florence adopte une république sur le modèle vénitien. La bourgeoisie d’affaire détient le pouvoir. La cité cherche à étendre son territoire. Les guerres permettent d’unir les citoyens à une cause commune, d’accroitre les richesses, d’affaiblir les cités rivales et de contrôler les routes commerciales. Avec la prise de Pise, elle se dote d’une marine et établit des filiales dans les ports européens.

Au pied des Alpes, il existe une série de comtés et de marquisats, dirigés par des familles aristocratiques, tels les Montferrat en Savoie. Celles-ci sont vassales de l’empereur germanique.

 

Sources

Texte :MILZA Pierre, Histoire de l’Italie des origines à nos jours, Fayard, Paris, 1024p.

Image :  Wikipédia

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