La villa Cavrois (Croix – Nord 59)

 


Paul Cavrois est un riche industriel de Roubaix. En 1919, il épouse sa belle-soeur Lucie Vanoutryve, veuve de guerre. Le couple donne naissance à quatre enfants, qui s’ajoutent aux trois issus du premier mariage de Lucie Vanoutrve. Pour loger sa grande famille et son personnel de maison, Paul Cavrois achète un terrain à Croix. Il souhaite y bâtir une villa moderne et qui se démarque des constructions du voisinage.

Paul Cavrois requiert les services de l’architecte Robert Mallet-Stevens, dont il a remarqué les travaux lors de l’exposition internationale des Arts décoratifs de 1925. L’architecte s’inspire du mouvement hollandais et du bauhaus allemand. Il a construit de nombreux bâtiments et hôtels particuliers à Paris. Toutes ses réalisations recherchent la précision géométrique des formes, la simplicité des volumes et la fonctionnalité des espaces.

Ayant carte blanche, Robert Mallet-Stevens conçoit une demeure pour une famille nombreuse portant les concepts d’air, de lumière, de confort et d’hygiène. La villa mesure plus de 1800 mètres carrés. Elle est recouverte de briques de parement jaunes fixées sur une ossature de béton. Sur un rez-de-chaussée et deux étages, elle s’organise selon l’usage des espaces : les pièces de réceptions (salons, salle à manger, boudoirs) les espaces fonctionnels (bureaux, cuisine), l’aile des parents (chambre, salle de bain, dressing), les espaces des enfants (chambres, salles de bains, salles de jeux), les zones de détente et de sport, les terrasses. Le sous-sol abrite la chaufferie, le garage, les caves à vin, les celliers, la buanderie et des remises. La villa comporte toutes les technologies de l’époque : chauffage central, éclairage électrique, ventilation, ascenseur, téléphone, radio. Robert Mallet-Stevens conçoit l’ensemble du mobilier en fonction de la destination des pièces. Les matériaux de décoration intérieure révèlent le luxe de la maison : marbre de différentes couleurs (blanc de Carrare, noir de Belgique, jaune de Sienne et vert de Suède), dorures, diverses essences de bois (chênes, acajou de Cuba, zingana). Le parc mesure 1,7 hectares. La partie Sud accueille un miroir d’eau, tandis que la partie Nord est aménagée pour la circulation des voitures. Le 5 juillet 1932, après deux ans de travaux, la famille Cavrois emménage.

En 1939 alors que la guerre est déclarée, les Cavrois quittent la région comme nombre de leurs concitoyens. Les Allemands s’emparent de l’édifice en mai 1940 et le transforme en caserne. La villa subit des dommages lors des combats de 1944. Paul Cavrois retrouve sa maison en 1947. La famille y réside jusqu’en 1985. Après le décès de Lucie Cavrois, épouse de l’un des fils de Paul Cavrois, tout le mobilier est vendu aux enchères. Une société immobilière la rachète, afin de récupérer le terrain pour construire de nouveaux logements. Le projet est abandonné et la villa est laissée à l’abandon. Des squatteurs y résident de manière sporadique. En 1990, la villa est classée au titre des monuments historiques. Une association de sauvegarde voit le jour. En 2001, l’Etat la rachète. En 2004, une première campagne de restauration se déroule. En 2008, l’Etat cède la villa au Centre National des Monuments Historiques, qui poursuit la restauration. Ayant retrouvé sa décoration d’origine et une partie de son mobilier, la villa est ouverte au public en 2015.

La villa Cavrois est un chef-d’œuvre de l’architecture moderniste. Elle constitue un témoignage de l’art de vivre tel le concevaient les architectes de l’entre deux-guerres.

 

Sources

Texte : visite effectuée le 29 octobre 2021

Image : photo prise par Benjamin Sacchelli le 29 octobre 2021

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