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Verdun




Pour les Français, la Première guerre mondiale est une guerre contre l’Allemagne. On prend sa revanche sur la défaite de 1870. On défend la patrie. Pour les Allemands, c’est une guerre défensive. Ils sont entourés d’ennemis : Britanniques, Français, Russes. Les Allemands combattent à l’étranger pas sur leur sol et doivent gérer plusieurs fronts simultanément.
L’Entente coordonne ses actions pour une vaste opération dans le nord de la France. Côté allemand, Erich von Falkenhayn est favorable à une attaque à l’Ouest pour combattre les Britanniques qui demeurent à ses yeux la principale menace. Néanmoins, après la défaite navale du Jutland, les Allemands n’ont plus les moyens de contrer la Royal Navy. Ils se focalisent contre l’armée française. Ils choisissent un secteur assez éloigné pour éviter une intervention britannique. Attaquer Verdun permet à l’Allemagne de renouer avec la guerre de mouvement.

La bataille débute le 21 février 1916. La supériorité allemande, notamment aérienne, et l’impréparation française, permettent aux troupes de Kaiser d’enfoncer le front de six kilomètres en quatre jours. Le 25 février, ils s’emparent du fort de Douaumont à cinq kilomètres de Verdun. Les civils sont évacués en catastrophe. Le saillant permet d’attaquer dans plusieurs directions. Les Allemands disposent d’un réseau ferré mieux protégé et en meilleur état. Le 26 février, le commandement est confié à Philippe Pétain, qui réorganise les défenses. Désormais, « ils ne passeront pas » devient le mot d’ordre côté français. Début mars, l’effet de surprise passé, les défenses françaises mettent un terme à la progression allemande, malgré de multiples assauts. Le paysage ravagé rend difficile le déplacement de l’artillerie allemande. Les mois d’avril et mai voient s’installer des duels d’artillerie et des combats de tranchées. La situation stagne. Le 7 juin, les Allemands échouent à prendre le fort de Vau. A partir du 1er juillet, la bataille de la Somme oppose Britanniques et Allemands. Elle permet de desserrer l’emprise germanique sur Verdun. Le 11 juillet, un ultime assaut est lancé contre le fort de Souville. L’échec force Falkenhayn à opter pour une stratégie défensive.
A l’automne 1916 et durant l’hiver 1917, les Français reprennent le terrain perdu un an plus tôt. Verdun est la bataille la plus longue. Elle a duré dix mois et causé 370.000 pertes allemandes et 163.000 pertes françaises

Verdun occupe une place à part dans la mémoire française au point qu’elle devient le symbole de 14-18, d’autant plus qu’il s’agit d’une victoire. Elle est la bataille à laquelle a participé le plus grand nombre de soldats français. En 1920, l’évêque de Verdun préside un comité qui entreprend la construction d’un ossuaire pour réunir les restes des soldats tués. Les récits des poilus sont publiés. En Allemagne, Verdun est le modèle de l’homme d’acier pour une génération de soldats frustrés et de jeunes qui se sentent trahis et volés de leur victoire.
Jusque dans les années 1960, Les Français se souviennent de la souffrance et du sacrifice pour défendre la patrie. C’est la seule bataille ayant opposé uniquement les Français et les Allemands. A partir des années 1970, Verdun devient un lieu de réconciliation franco-allemand. Ceci est rendu possible par le fait que les deux pays ont vécu les mêmes souffrances. Verdun devient un lieu de compassion pour tous les hommes ayant souffert et péri dans les tranchées. Le point d’orgue de ce symbole demeure la visite de François Mitterrand et d’Helmut Kohl le 22 septembre 1984. De mémoire française, Verdun est devenu un lieu de mémoire franco-allemand, puis un lieu de mémoire européen, car l’Union européenne s’est construite sur le refus de la guerre.

Sources
Texte :
- CABANES Bruno et DUMENIL Anne (dir), « Verdun sous le feu », Larousse de la grande guerre, Larousse, Paris, 2007,pp 168-179.
- « Verdun vu d’ailleurs », L’Histoire, n°423, mai 2016, pp12-31.
- COCHET François, « Douaumont », Les lieux de l’histoire de France, Perrin, Paris, pp415-429.
Image : http://amndvden.overblog.com/2016/02/devoir-de-memoire-centenaire-de-la-bataille-de-verdun.html

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