Il est revenu le temps des cathédrales
Les Etats n'interviennent presque
pas dans le financement, car les travaux sont du ressort de l'Eglise. L'évêque
utilise les dons, le mécénat, les legs, la dîme et la vente d'indulgences. Le
salaire des ouvriers représente la plus grosse part du coût de fabrication. Ils
sont payés à la tâche ou à la journée. Ils perçoivent en plus un complément en
nature (repas et/ou logement). Les tailleurs, les maçons, les charpentiers et
les verriers sont les mieux rémunérés. La fabrique gère le chantier. Il s'agit
d'un conseil regroupant l'évêque, les chanoines et des laïcs. Les effectifs ne
dépassent guère les 500 personnes et ils ne sont pas tous présents durant toute
la durée des travaux. On ne travaille pas quand il fait trop froid, ni l'été
durant les moissons. Un chantier, s'étalant sur plusieurs siècles, signifie que
celui-ci a été souvent interrompu pour diverses raisons (guerres, conflits
juridiques ou politiques, financement).
La cathédrale est l'image de la Jérusalem céleste qui
est le monde de Dieu. Elle témoigne de la puissance de l'Eglise et incite les
fidèles à lui obéir. La lumière, les couleurs, les statues et les fresques
subjuguent l'homme médiéval. Celui-ci vit dans des logis sombres, dont les murs
et le mobilier sont dépourvus d'images. Les cathédrales sont peintes et très
colorées tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. La couleur et la lumière marquent
davantage les esprits que les représentations. Elles visent à susciter de la
joie ou de la compassion pour stimuler la piété. L'iconographie se veut
éducative. Le portail est consacré au Christ, à la Vierge , aux Saints, aux
apôtres, aux évangélistes et aux prophètes. Les vitraux se lisent de bas en
haut. Ils racontent la vie des grands hommes (personnages bibliques, grands
rois, saints). Les chapiteaux et les colonnes représentent des végétaux et des
animaux tel le jardin d'Eden. De plus, les cathédrales regorgent à certains
endroits à l'extérieur ou dans ses soubassements de sculptures grotesques,
grivoises ou monstrueuses. Il peut s'agir soit d'une fantaisie du sculpteur ou
d'une volonté de l'Eglise de rappeler les monstres qui sommeillent dans l'homme
et qui l'écartent du droit chemin. Le temps et l'évolution des canons
esthétiques ont eu raison de la polychromie. Le blanc est devenu synonyme de
pureté. A l'inverse, un déluge de couleur est considéré comme une faute de
goût.
La cathédrale est un lieu public
et un espace de vie beaucoup plus que de nos jours. C'est un lieu de rencontre
vaste, ouvert, qui protège des intempéries. Le jubé sépare le lieu sacré de
l'espace profane dans lequel les fidèles continuent de mener leur vie. Les
croyants s'agenouillent devant les reliques, tandis que les marchands
installent leurs étals et que les bourgeois discutent politique ou économie.
Les avocats proposent des consultations. Les vagabonds logent dans les
chapelles dont le sol est recouvert de paille. Des représentations théâtrales
se déroulent sur le parvis. En 1431, les échevins strasbourgeois interdisent
d'acheter et de vendre dans la cathédrale et aux prostituées de racoler sur le
parvis. Au XVIe siècle avec l'essor du protestantisme, l'Eglise adopte une
attitude plus stricte. Elle réduit les activités profanes dans les bâtiments
cultuels. La circulation est limitée aux activités recentrées sur le spirituel.
Les fêtes sont interdites. Des valets de cathédrale sont chargés de surveiller
et d'encaisser les amendes. Les jubés sont détruits puisque l'espace profane
n'existe plus.
Chanoine : membre du clergé attaché au
service d'une église
Laïc : personne n'appartenant pas au clergé
Sources
Texte :
"Les secrets des cathédrales", Les
Cahiers de Sciences et Vie, n°164, octobre 2016, pp24 à 86.
Image :
http://medieval.mrugala.net
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