Le bombardement de Fort Sumter : déclencheur de la guerre de Sécession

Fort Sumter est construit sur un îlot situé à plus de six kilomètres au large de Charleston en Caroline du Sud. Il est conçu pour abriter 146 canons et 600 hommes en vue de défendre la baie et le port. En décembre 1860, les ouvriers chargés d’achever les travaux débutés en 1829, sont les seules personnes présentes dans le fort. Les 80 soldats de la garnison logent au fort Moultrie. Distant du fort Sumter d’un kilomètre, il est accessible depuis Charleston par un banc de terre. Robert Anderson est le commandant du fort. Bien qu’il soit un ancien propriétaire d’esclaves et sympathisant sudiste, il a décidé de rester loyal envers l’Union.

Après la Sécession, les Sud-carrolliens demandent que les deux forts et les bâtiments fédéraux de Charleston leur soient cédés. En cas de refus, ils menacent d’expulser tous les Yankees s’y trouvant. Le commandant transfère ses hommes au fort Sumter moins vulnérable et se prépare à riposter en cas d’attaque. Ce mouvement de troupes provoque la fureur des Sudistes et les éloges des Nordistes. Sous la pression de l’opinion publique, le président Buchanan organise l’approvisionnement en armes et en hommes du fort. L’opération est éventée. Lorsque le navire marchand arrive au large de Charleston, les batteries côtières ouvrent le feu, l’obligeant à rebrousser chemin. Le commandant Anderson ne réagit pas. N’ayant pas été informé, il ignore le contenu de la cargaison de ce navire. La tension monte entre le Nord et le Sud, mais personne ne souhaite être le premier à déclencher les hostilités.
La garnison du fort dispose de vivres pour une durée de six semaines. Deux options se présentent au nouveau président : soit Lincoln envisage une nouvelle opération de ravitaillement avec une forte armée, ce qui revient à déclencher la guerre et faire basculer dans la Confédération les Etats du Sud septentrional, soit il cède le fort pour permettre aux soldats de partir, ce qui revient à reconnaitre la Confédération comme Etat souverain. Les avis de ses conseillers divergent. Certains entendent profiter de la situation pour se placer dans l’entourage et gagner en influence, à l’instar du secrétaire d'État, William Seward, qui espère diriger officieusement le pays. Afin d'éviter la guerre, il prend des contacts avec les Confédérés pour leur annoncer que le fort Sumter sera évacué. Il adresse à Lincoln une lettre proposant de fonder la sauvegarde de l'Union sur un conflit, mené par le Nord et le Sud réunis, contre l'Espagne et la France qui viennent d'intervenir à Saint-Domingue et au Mexique. Cette proposition contraire à la doctrine Monroe, permet à Lincoln de discréditer son adversaire politique.

A la fin du mois de mars 1861, Lincoln se range à l’idée de l’homme d’affaires et ancien lieutenant de marine, Gustavius Fox, qui propose de ravitailler le fort la nuit par l’intermédiaire de petits remorqueurs. Ces derniers ne seraient pas armés et ne transporteraient que de la nourriture. Ainsi, si le Sud venait à attaquer ces navires, ce geste pourrait être considéré comme un acte d’agression contre des personnes sans défense et de plus, le Nord pourrait dire que le Sud laisse mourir de faim des êtres humains. Tout ceci justifierait une intervention armée à Charleston. Grâce à ce plan, peu importe la réaction du Sud, Lincoln est gagnant des deux côtés, soit ses hommes sont ravitaillés, soit le Sud lui donne un motif d’attaquer. L’expédition part le 4 avril.
De son côté, Jefferson Davis et son administration prônent une action rapide et brutale. Ils pensent que la guerre maintiendrait la fièvre sécessionniste et unirait tout le Sud dans une cause commune. Le 9 avril, le général Pierre Beauregard reçoit l’ordre d’attaquer le fort, alors que l’expédition de Fox n’est pas encore arrivée et qu’une tempête la retarde.

Le 12 avril 1861, les batteries de Charleston, installées aux forts Moultrie et Johnson, ouvrent le feu à 4h30, suite au refus du commandant Anderson de livrer le fort. Durant 34 heures, les obus pleuvent sur le fort le détruisant en partie. La garnison se rend le 14 avril. Dès le lendemain, Lincoln appelle 75.000 miliciens sous les drapeaux pour mettre un terme à une révolte ne pouvant être réprimée par la voie judiciaire. Les volontaires se pressent pour préserver l'unité du pays, la constitution et l'héritage de la guerre d'indépendance. Le problème de l'esclavage n'est qu'une préoccupation secondaire, passant derrière la question de la sécession. Suite au recrutement des miliciens lancés par Lincoln, le Sud prend les armes pour résister au tyran nordiste. Quatre Etats décident de rejoindre la Confédération à ce moment : la Virginie, l’Arkansas, le Tennessee et la Caroline du Sud. La guerre est désormais déclarée.

Sources
Texte : - Mc PHERSON James, La Guerre de Sécession, Laffont, Paris, 1991, 973p.

Image : wikipédia

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