La courageuse Timoclea face à Alexandre le Grand
Entre 336-335 le nouveau roi de
Macédoine, Alexandre le Grand, est presque toujours dans l’action. Lui qui n’a
à peine que 21 ans, a la ferme intention de reprendre à son compte le projet de
son père, c’est-à-dire de « croisade » panhellénique contre l’empire
Perse, passe la majeure partie de son temps à pacifier son royaume, du Danube,
où il rencontre les Celtes – qui affirment n’avoir peur que d'une seule chose,
à savoir que le ciel ne leur tombe sur la tête -, jusqu’à à la Grèce. Les
grecs, eux, se rebiffent car ils ne croient pas Alexandre capable de gouverner
comme son puissant père Philippe. Ils ont raison. Alexandre le surpassera !
Il fond avec son armée sur la Grèce révoltée à un rythme effréné et en se
montrant moins magnanime que ne l’était son prédécesseur. Il fait mettre le
siège devant la cité rebelle de Thèbes qui tombe en quelques semaines.
Alexandre ordonne alors qu’on la rase jusqu’au sol et que l’on mette en
servitude l’ensemble de ses habitants, en représailles de leur révolte envers
l’autorité macédonienne.
A Thèbes, Alexandre fait la
rencontre d'une femme du nom de Timocleia qui fait grand effet sur le jeune
roi. Les faits se déroulent alors que la ville de Thèbes est en proie au
carnage et à la destruction. Partout règnent l’effroi, la terreur et la
désolation. Les habitants fuient tant qu’ils peuvent leurs bourreaux qui
incendient tout sur leur passage, même les temples. Ceux qui pensent trouver
refuge dans quelques endroits sont délogés de leurs abris puis emmenés ou tout
simplement assassinés. Les maisons sont investies, vidées de leurs habitants
puis mises à sac. Les soldats macédoniens vont d’habitation en habitation
espérant trouver du butin qui les rendra riche.
C’est dans ces circonstances que des
soldats thraces, qui constituent une partie de l’armée macédonienne, saccagent
la maison d’une femme de la haute société, la fameuse Timocleia. Tandis que des
hommes pillent ses biens, leur chef en profite pour abuser d’elle. Une fois
l’affaire finie, ce dernier, non encore rassasié, lui demande si elle n’a pas
d’autres trésors cachés quelque part dans sa grande propriété. Cette dernière
acquiesce et le mène dans son jardin. Le thrace la suit docilement seul, sans
prendre garde, son esprit sans doute encore engourdi par le plaisir ressenti du
viol de la belle thébaine. Une fois sur place, elle lui indique que le butin
avait été caché préalablement à l’assaut macédonien au fond du puits. Bien
imprudemment, le chef thrace se penche alors au-dessus du trou s’imaginant déjà
riche. Timocleia en profite aussitôt pour le pousser au fond du puits et finit
par le tuer en faisant pleuvoir sur lui une grêle de pierres. Alerté par les
cris d’agonie du mourant, des soldats accourent sur la scène de crime et
arrêtent aussitôt Timocleia qui est menée enchaînée devant Alexandre. Le jeune
roi reconnaît immédiatement à sa démarche une femme distinguée, de bonne
éducation et de nature fière.
« Qui es-tu ?
-
Je suis la sœur de Théagénèse qui a
combattu contre Philippe pour la liberté de la Grèce, et qui est tombé à
Chéronée, où il commandait en chef. »
A sa surprenante réponse Alexandre
sourit. La brave et courageuse Timocleia plaît au macédonien. Voilà une femme
qui n’est pas sans rappeler sa propre mère la téméraire Olympias ! Au
grand étonnement de ses soldats, il ordonne qu’on la relâche et qu'on la laisse
libre. Voilà sans doute une des rares femmes de Thèbes à s’en sortir indemne,
les autres ayant été capturées puis vendues comme esclaves. Alexandre est très
sensible à la vaillance et à l’audace,
tout particulièrement lorsqu’elles émanent des femmes. Quoi de plus normal de
voir un homme héroïque au combat ! Aussi, un acte aussi ardant venant du
beau sexe, qui a un rôle plus mineur dans la société, est d’autant plus
remarquable. Plein de générosité pour Timocleia, il l’est moins - politique
oblige – avec la tragique cité de Thèbes. Celle-ci est rasée jusqu’à la
dernière pierre !
Source: Plutarque, Vie d'Alexandre
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