Napoléon III : premier président de la République française élu au suffrage universel


Date marquante dans l’histoire de la République française, le 20 décembre 1848, jour d’élection du premier président de la République au suffrage universel direct (1), est, pourtant, aujourd’hui, passée aux oubliettes. En revanche, le 2 décembre 1851 fait partie de la mémoire collective de tout à chacun : il s’agit du coup d’état du neveu de Napoléon Ier, qui, après une grande répression, installe le Second Empire jusqu’en 1870. Au centre de ces deux événements, un seul et même homme : Louis Napoléon Bonaparte.

Que doit-on comprendre ici ? Tout simplement que le premier président de la République élu par tout un peuple, le 20 décembre 1848, à près de 75% des voix, s’est proclamé empereur, sous le nom de Napoléon III, 4 ans plus tard.


L’ensemble du camp républicain est alors vexé. Alphonse de Lamartine, littéralement écrasé durant ces élections (il ne recueille que 0,26% des voix), s’en prend au peuple français en l’accusant de « la plus noire, la plus bête, la plus universelle ingratitude ». Bouc-émissaire, la masse populaire est ici réduite à une vil multitude qui vote sans réfléchir pour un nom juste parce qu’elle le connaît, et que ce patronyme est auréolé d’une légende dorée impériale, lui donnant par là l’aspect d’un homme providentiel. Si cela justifie en partie la victoire écrasante de Louis Napoléon Bonaparte, le démos n’est pas le seul en cause. La proie populaire est un peu trop facile.



Le parti républicain a également une bonne part de responsabilité. Sa division n’a pas facilité les choses, entre un Ledru-Rollin candidat des républicains avancés, un Raspail candidat des « vrais socialistes » et un Lamartine tentant, en vain, de rassembler tout ce beau monde sous la bannière républicaine. Cependant, même tous réunis, les républicains n'auraient pas réussi à battre l’aiglon impérial.

Louis Napoléon Bonaparte a bien trompé son monde en s’affichant comme républicain convaincu et défenseur du suffrage universel. Il l’affirme, sans sourciller, dans son serment devant l’Assemblée nationale, à l’occasion de son entrée en fonction comme Président : « je jure rester fidèle à la République démocratique, une et indivisible, et de remplir tous les devoirs que m’impose la Constitution ». Même Victor Hugo, soutien de la première heure, a été dupé.

Reste que, lors du retour au régime républicain, après « l’intermède » Napoléon III, il est décidé que le président de la République sera élu non par le peuple directement, mais par les parlementaires. Par ailleurs, afin, entre autres, d'éduquer le futur vivier de citoyens électeurs, les lois scolaires des années 1880 instaurent l’école primaire laïque, gratuite et obligatoire.

Il faut attendre la Ve République pour que le Président soit de nouveau élu au suffrage universel direct : il s'agit du général de Gaulle en 1965.


Image : Louis-Napoléon Bonaparte prêtant serment à la Constitution, Lithographie de Dopter, B.N.

(1) Précisons qu'il s'agit à cette époque du suffrage universel masculin

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