Le
hasard – la réussite ? – fait parfois bien les choses. Cette brève
introduction ne concerne pas un fait historique, pour une fois, mais votre
dévoué petit auteur : en l’occurrence moi-même. Il y a quelques semaines je
recevais un mail des éditions Scrineo pour me proposer de découvrir leur
dernier ouvrage de Nicolas Eybalin intitulé : Quand les lieux racontent l’Histoire de France. J’ai
immédiatement accepté et recevant ce cadeau, je me suis mis à sa lecture. J’ai
avalé les premières pages qui m’ont mené de la préhistoire de la Dordogne aux
Carolingiens en une bonne soirée. Là, j’ai bloqué sur un événement historique –
et géographique cela va de soit – qui a eu pour conséquence de me rappeler une
histoire que je connais bien : la mienne. A la page 112 nous voilà à Saint-Clair-sur-Epte.
Cela m’a rappellé mes années de primaire où j’ai eu le bonheur d’écouter un
maître d’école exceptionnel qui nous contait l’histoire de France tous les
mardi après-midi pendant deux heures ! Au comble de la technologie de l’époque,
il nous montrait l’histoire à travers des diapositives et, pendant que mes
camarades dormaient sagement dans l’ambiance calfeutrée de notre salle de
classe dont les rideaux tirés rappelaient à certains leur chambre lors d’une
douce nuit, moi, je rêvais et je m’évadais parmi les personnages anciens et
magnifiques que ce maître m’a fait découvrir.
Je
crois bien avoir oublié le nom de Saint-Clair-sur-Epte pendant longtemps, enfouit dans ma
mémoire, et à peine – ou si peu - ressortit de celle-ci lors de mes années de collège ou
d’université (je ne parle pas du programme de lycée qui est une hérésie pour
quiconque aime l’histoire). Mon nouvel ouvrage entre les mains,
« j’avale » le passage sur cette ville qui rappelle bien évidemment l’événement
principal, à savoir le fameux traité qui débouche à la création du duché de
Normandie. Et puis soudain tout me revient en mémoire : la légende du roi
renversé !
Nous
sommes en 911. Les Vikings mettent à mal le royaume des Carolingiens, jadis si
puissant, qui est depuis quelques décennies à bout de souffle. Bientôt une
nouvelle famille va régner. D’ailleurs, l’ancêtre de cette future dynastie
vient de repousser les Vikings et leur chef Rollon qui assiégeaient Paris. Son
nom est Eudes et plus tard un de ses descendant règnera sous le nom de
Hugues Capet (987). Mais revenons à 911. Il y a un fait avec la guerre :
c’est qu’elle fatigue ! Et les hommes de Rollon sont fatigués. Voilà plusieurs
années qu’ils pillent, tuent ou qu’ils sont repoussés. Partis de Norvège
jeunes, certains sont devenus vieux. Blessés au combat, ils deviennent plus
fragiles. D’autres encore ont trouvé une femme, ont des enfants. Ils veulent la
paix et désirent s’installer dans les riches et belles terres du royaume de France. Face
à eux, le roi Carolingien Charles III le simple veut également que cesse les
combats. Des négociations débutent. A Rollon revient une partie du royaume au
nord-ouest que l’on nommera désormais la Normandie. Le roi obtient en échange une certaine
soumission de Rollon qui devient Duc de Normandie et qui doit désormais prêter allégeance.
Enfin, le chef Viking s’engage à devenir chrétien. En 912, il sera d’ailleurs
baptisé.
C’est
lors de cette fameuse cérémonie, à Saint-Clair-sur-Epte, lors de la
ratification du traité de paix et de cession des terres qu’à lieu le fameux épisode qui m’a été conté en classe.
Selon l’usage, Rollon doit désormais baiser les pieds du roi assit sur son
trône. Voilà bien une chose déshonorante pour un guerrier tel que lui! Après
tout, sa soumission n’est pour lui qu’un paragraphe dans le traité et n’est que
relative. Il considère son duché comme autonome. Toute autre conclusion n’est
que rhétorique. Alors, Rollon refuse catégoriquement. Des diplomates lui font
comprendre qu’il doit s’exécuter et que son obstination ne peut qu’apporter
querelles et ressentiments. C’est d’accord… mais ce ne sera pas lui qui baisera
les pieds du roi, mais un de ses hommes. Il se tourne vers l’un d’eux qui
s’exécute sans enthousiasme. Ce dernier va vers le roi et veut que ce moment
désagréable – et on veut bien le comprendre – passe le plus vite possible.
Aussi, il se saisit du pied du roi… mais ne se baisse pas. On imagine sans
peine la stature colossale du viking qui portant le pied du roi à sa bouche ne peut…
que le renverser de son siège ! La scène se termine dans le fou-rire des
convives. Je pense que pour cette fois, le roi se serait bien passé de tous ses
protocoles !
La
conclusion n’est pourtant pas si mauvaise pour le royaume de France qui
apparaît pourtant, au travers de cet épisode, comme un perdant. C’est pourtant
le contraire. La paix revient, la Normandie s’intègre parfaitement dans le
royaume et les vikings oublient peu à peu leur ancienne langue et leurs
origines. Ils parlent très vite le français, deviennent chrétiens et feront de
la Normandie un duché prospère, riche et qui fait, aujourd’hui encore notre
fierté !
Retrouvez
bien d’autres aventures dans le livre de Nicolas Eybalin, Quand les lieux racontent l’Histoire de France, aux éditions
Scrineo.
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