Napoléon et Giuseppina Grassini : Une Romance Inoubliable au Cœur de l'Empire

Napoléon est généralement perçu comme un grand homme d'État et un fin stratège militaire plutôt que comme un séducteur invétéré. On le décrit comme fidèle, profondément amoureux et peut-être même comme un amant maladroit ! Les figures emblématiques de Joséphine de Beauharnais – sa première épouse, immortalisée par David lors de la cérémonie du sacre – et de Marie-Louise – sa seconde épouse qui lui donna enfin le fils tant désiré – sont bien connues. Contrairement aux amours légendaires et publiques des rois de France tels que Henri IV, Louis XIV et Louis XV, Napoléon semble profondément attaché à ses épouses, leur accordant le peu d'affection que son temps libre lui permet.


Engagé dans ses fonctions de premier consul puis d'empereur, et surtout dans son rôle de stratège militaire, toujours en quête de défendre les intérêts français à l'étranger, Napoléon semble accorder peu d'intérêt à la gent féminine. Cependant, il la considère avec respect, prudence et appréhension. « La seule victoire face aux femmes, disait-il, c'est la fuite ». Mais derrière cette apparente candeur philosophique se cache un homme qui, comme tous les autres, possède ses propres fantasmes. Ainsi, on retiendra avec amusement ou dégoût cette phrase qu'on lui attribue, s'adressant à Joséphine : « Ne te lave pas, j'arrive ! ».


Cependant, malgré son emploi du temps extrêmement chargé, Napoléon a bien eu des maîtresses. La plus célèbre reste l'envoûtante cantatrice italienne Giuseppina Grassini. Elle a vingt-trois ans lorsque Napoléon la découvre au théâtre de La Scala à Milan. À ce moment, Napoléon n'est que général, mais son prestige – renforcé par la victoire de Lodi en 1796 – est en pleine ascension. La merveilleuse brune italienne multiplie les sourires, les regards langoureux et les gestes affectueux. À la surprise générale, le général reste maître du champ de bataille et ne succombe pas à l'ennemi. Encore follement amoureux de Joséphine, il rentre sans avoir commis d'adultère, alors que pendant ce temps, Joséphine semble prendre des libertés avec le protocole. L'Italienne n'a peut-être pas atteint son but - le petit Corse l'attire - mais elle sait que l'avenir lui sera plus favorable. Cet homme, pense-t-elle, ne sera pas n'importe qui. L'Italie n'est qu'une terre appauvrie où se déchirent Français et Autrichiens qui se battent pour la prédominance sur les terres de l'antique empire romain. Il reviendra !


Les faits lui donnent raison. Lors de la seconde campagne d'Italie (1800), Napoléon arrive cette fois en tant que premier consul et entre triomphalement dans Milan après sa difficile victoire sur les Autrichiens à Marengo. Giuseppina chante en l'honneur du premier consul. L'effet est immédiat. Le lendemain, elle prend son petit déjeuner dans les appartements de Napoléon. Il décide de l'emmener avec lui à Paris mais recommande à la belle la plus grande discrétion. Dans la capitale, elle participe à tous les honneurs de la victoire et chante aux Tuileries et à la Malmaison. Giuseppina est réellement amoureuse. Attaquée en chemin par des brigands, elle tente, sans succès, de sauver une effigie de Napoléon. Pourtant, Napoléon est un homme de travail qui s'avère être triste et ennuyeux. Il ne reste guère plus d'une demi-heure à table et remplit son devoir très furtivement. La chaude Italienne s'ennuie. Elle quitte plusieurs fois Paris mais revient souvent. En femme du sud extravertie, elle regrette, plus qu'elle ne s'étonne, de ne pas recevoir le titre de « première favorite de l'empereur ».


Le temps et les sentiments s'estompent. Napoléon a été obligé de divorcer pour épouser Marie-Louise et Giuseppina parcourt l'Europe où elle reçoit autant de succès pour ses prestations de scène que pour sa beauté. Quel manque de reconnaissance ! Elle séduit Wellington, celui à qui l'on attribue la victoire de Waterloo, et chante en l'honneur de la défaite française ! Est-ce là une vengeance ? Peut-être ! Napoléon, lui a-t-il fait cette confidence bien désagréable, qu’il fit plus tard à Sainte-Hélène qu’il préférait les blondes aux brunes !

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