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Alexandrie : L'Œuvre Majeure de Dinocrate de Rhodes, l'Architecte de Génie d'Alexandre le Grand

IVe siècle AV. J.C. Dans une cour royale où les conseillers et les généraux se battaient pour l'attention d'Alexandre le Grand, Dinocrate de Rhodes savait qu'il devait faire quelque chose d'extraordinaire. Ignorant les voies conventionnelles, il opta pour une approche audacieuse. Se déguisant en Héraclès, le héros mythique, il s'enduisit le corps d'huile, se couronna d'une branche de peuplier et se drapa dans une peau de lion. Massue à la main, il se présenta devant Alexandre alors que ce dernier rendait la justice. Le choix de se travestir en Héraclès n'était pas anodin. Alexandre avait toujours montré une profonde admiration pour ce héros, et par son père, Philippe II de Macédoine, il était même généalogiquement lié à la famille d'Héraclès.


Son apparition saisissante fit tourner toutes les têtes, y compris celle du roi. "Sire, j'ai une vision à partager," commença Dinocrate, déroulant un parchemin audacieux. Sur le parchemin était dessiné le mont Athos, mais pas comme n'importe quelle montagne. Il était sculpté à l'image d'un homme colossal, son visage tourné vers le ciel comme s'il conversait avec les dieux. Dans sa main gauche, il tenait une ville entière, ses murs brillant comme des joyaux sous le soleil. Et dans sa main droite, une coupe gigantesque destinée à recueillir les eaux de la montagne, créant ainsi un système d'irrigation ingénieux.


Alexandre, bien que fasciné par l'ingéniosité du plan, pointa du doigt une faille : la ville serait dépendante des importations maritimes pour son ravitaillement. "Votre vision est grandiose, mais elle a ses limites," dit-il. Cependant, l'audace et la créativité de l'architecte l'avaient tellement impressionné qu'il décida de le garder à ses côtés pour des projets futurs.


Des années plus tard, les succès s’accumulant et les portes de l’Égypte ouverte, Alexandre était en quête d'un lieu pour établir une cité qui serait le joyau de son empire. Longeant la côte méditerranéenne, il était indécis jusqu'à ce qu'un rêve mystique vienne éclairer sa voie.


Dans la solitude de la nuit, alors qu'Alexandre était plongé dans un sommeil profond, une lumière douce et mystique éclaira son rêve. Le divin Homère apparut, sa toge blanche flottant comme une brume autour de lui. Ses yeux, profonds et sages, semblaient contenir les énigmes de l'univers. Sa lyre d'or, symbole de la poésie et de la connaissance, était tenue avec une grâce qui transcende le temps.


Homère leva sa lyre et en joua une mélodie envoûtante, chaque note semblant évoquer les épopées et les héros de jadis. Puis, avec un geste délicat, il pointa du doigt l'île de Pharos. Ce n'était pas un geste ordinaire, mais un mouvement empreint de solennité, comme s'il dévoilait un trésor longtemps caché.


Pourquoi Pharos ? Homère, dans son geste, semblait dire que cette île était le lieu où le divin et le terrestre se rencontraient. C'était là que résidait Protée, le vieux de la mer, selon l'Odyssée. L'île était un lien entre le monde des hommes et celui des dieux, un endroit où le destin pouvait être façonné. 


Au petit matin, la lumière du soleil éclairant son visage, Alexandre se leva avec une détermination nouvelle. Il convoqua Dinocrate, l'architecte qui avait su captiver son imagination avec des idées audacieuses. Le roi et l'architecte se retrouvèrent dans la tente royale, entourés de parchemins, de cartes et de maquettes. Alexandre, inspiré par son rêve divin, et Dinocrate, armé de son génie architectural, se mirent à l'œuvre. Ils choisirent d'adopter le plan Hippodamien pour la future cité d'Alexandrie. Ce choix n'était pas anodin. Hippodamos de Milet, souvent considéré comme le père de l'urbanisme, avait conçu un plan de ville révolutionnaire. Son modèle reposait sur un réseau de rues se coupant à angle droit, formant ainsi une grille régulière. Ce plan permettait non seulement une meilleure circulation de l'air mais aussi une organisation plus rationnelle des espaces publics et privés.


L'adoption du plan Hippodamien était un hommage à la sagesse antique et une démonstration du désir d'Alexandre de créer une cité qui serait à la fois fonctionnelle et magnifique. Ce plan, avec ses rues rectilignes et ses îlots bien définis, offrait également une flexibilité pour l'expansion future, un aspect crucial pour une ville qui aspirait à devenir un centre du monde connu.


Ainsi, sous le regard attentif d'Alexandre et la main habile de Dinocrate, Alexandrie commença à prendre forme, non seulement comme une manifestation de la puissance impériale mais aussi comme un rêve incarné, un lieu où le divin et le terrestre se rejoindraient pour écrire une nouvelle page de l'histoire.


Ce sera Alexandrie ! Et plus tard, de ses plans, jaillira depuis le bord des flots l'une des sept merveilles du monde antique, la tour de l'île de Pharos: le Phare d'Alexandrie !


Des années après avoir achevé sa merveille architecturale, Dinocrate se retrouva à nouveau face à un défi monumental. Le grand Alexandre était mort, et le monde qu'il avait conquis semblait s'effondrer sous le poids de son absence. Mais il restait une dernière tâche à accomplir, une dernière merveille à créer pour honorer la mémoire de la famille d'Alexandre. Dinocrate fut appelé à Amphipolis, une ville située au nord de la Grèce, pour concevoir ce qui serait probablement le tombeau de membres de la famille d'Alexandre, peut-être sa mère Olympias, peut-être sa femme Roxane ou encore son fils.

Le voyage vers Amphipolis fut long et périlleux. Dinocrate, portant ses plans et ses esquisses, ne pouvait s'empêcher de penser à la grandeur de la tâche qui l'attendait. À son arrivée, il fut accueilli par des visages graves mais déterminés. Ils savaient tous que le tombeau devait être à la hauteur des personnes qu'il allait abriter pour l'éternité.


Dinocrate passa des mois à étudier le site, à choisir les matériaux et à superviser la construction. Il voulait que le tombeau soit une représentation fidèle de la grandeur de la famille d'Alexandre, un monument qui survivrait à travers les âges. Et il réussit. Le tombeau d'Amphipolis, avec ses colonnes majestueuses et ses fresques détaillées, était une merveille à voir. Il était entouré d'un mur circulaire, et au centre se trouvait une chambre funéraire où reposait le sarcophage, sculpté dans le marbre le plus fin. Mais ce qui rendait ce tombeau unique, c'était la sphinx qui gardait l'entrée. Dinocrate avait choisi cette créature mythique pour symboliser la complexité et l'énigme que représentait la famille d'Alexandre. Et peut-être, dans un sens plus profond, elle représentait aussi les mystères que même un grand architecte comme Dinocrate ne pouvait résoudre.


Ainsi, Dinocrate ajouta une autre merveille à son héritage, un monument qui, comme le Phare d'Alexandrie, défiait le temps et l'espace. Et même si le monde continuait à changer, le tombeau d'Amphipolis restait, un rappel silencieux de la grandeur passée et des personnes qui avaient une fois rêvé de conquérir le monde.


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