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L'Amazonie

 


Le premier peuplement de l’Amazonie

 Après avoir traversé toute l’Amérique du Nord, les premiers humains arrivent en Amazonie il y a 13.000 ans. Vers -10.000, les pierres de taille deviennent plus petites. Les pointes de flèches se réduisent, signe que le gibier est moins gros. Ces humains gravent leurs mythes dans des abris sous les rochers. A force de cueillettes, ils acquièrent un savoir sur l’utilité des plantes à des fins alimentaires, médicinales, artisanales ou rituelles. Au fil des sélections, des manipulations et des croisements, ils les adaptent à leurs besoins.

La céramique se développe il y a 7000 ans. Domestication et céramique sont indissociables de la sédentarité. Les Amazoniens créent des tertres pour habiter, enterrer leurs défunts et exécuter leurs rites. Ils occupent les terres les plus fertiles. Lorsque l’espace manque, ils colonisent des terres moins favorables comme les marais ou des savanes. Ils les aménagent pour augmenter les capacités de production. Pour ce faire, ils emploient la culture sur brûlis, qui vise à produire une grande quantité de charbon et de cendres pour enrichir le sol. Les Amérindiens sont de gros mangeurs de poissons, d’anguilles et de coquillages. Ils consomment également du manioc, du maïs, des courges, de l’igname et des patates douces.

Au XVIe siècle, les descriptions font état de nombreuses nations, organisées en confédérations de villages, vivant d’une aquaculture de poissons et de tortues, de la culture du maïs et du manioc, ce qui suppose des connaissances en botanique précises. Ces nations s’affrontent parfois entre elles. Le commerce est intense sur le fleuve.

 

L’arrivée des Portugais et des Espagnols

Au début du XVIe siècle, les explorations des bouches de l’Amazone n’ont pas de suite. Les Espagnols s’arrêtent au Venezuela. Les Portugais s’installent sur le littoral brésilien. Les épidémies de peste et de variole atteignent de manière brutale les populations amérindiennes. En 1540, Gonzalo Pizarro entreprend une expédition depuis Quito à la recherche d’El Dorado. Remontant le fleuve sur des radeaux, le chroniqueur Gaspar de Carvajal décrit les peuples rencontrés. En conversant avec eux, les Espagnols croient comprendre qu’il existe des femmes, redoutables guerrières, qu’ils assimilent aux Amazones. Le nom reste pour le fleuve et par extension pour la forêt.

Au XVIIe siècle, les Portugais repoussent les Hollandais et les Français de tous leurs établissements sur le fleuve, ne leur laissant que leurs possessions dans les Guyanes. Les Portugais poursuivent leur avancée inexorable sur le fleuve et ses affluents, avancée qui entraîne la destruction des sociétés amérindiennes. Les Portugais organisent la descente des Indiens vers les zones de peuplement et leur mise au travail. Parfois, les tribus acceptent de leur plein gré cette délocalisation y voyant un moyen de survivre. Les Indiens sont déclarés libres, mais doivent travailler six mois par an pour les autorités contre un salaire payé en coton. Quand les tribus résistent, les colons les attaquent. Les hommes sont tués. Les femmes et enfants réduits en esclavage. Les missionnaires déclarent si une guerre est juste ou non. Les Indiens participent à cette destruction. Certaines nations s’allient aux Portugais pour abattre des rivaux. D’autres fournissent des esclaves.

 

Colonisation et exploitation agricole

Dès le milieu du XVIe siècle, les Portugais commencent à planter du cacao, des cannes à sucre, du tabac, du café et du rocou. Ils s’appuient sur les connaissances des peuples amazoniens. Leurs savoirs s’avèrent vitaux pour l’exploitation des produits et pour la maitrise de la navigation des fleuves. Les produits sont expédiés à Lisbonne, puis de là dans toute l’Europe. Le Portugal devient l’un des quatre principaux producteurs de cacao, dont les Espagnols demeurent les premiers.

Au XVIIIe siècle, l’économie amazonienne se modernise et s’insère dans le commerce international. Elle repose sur un système de plantation et une économie de la cueillette. Les populations indigènes servent de main d’œuvre dans les plantations, auxquels s’ajoutent des esclaves africains. Trois produits sont prisés : la cannelle giroflée, le cacao et la salsepareille (utilisée comme médicament contre les rhumatismes et la syphilis).

A la fin du XVIIe siècle, la région est divisée en districts missionnaires entre les différents ordres religieux (jésuites, carmélites, franciscains, mercédaires). De nombreux conflits éclatent entre les colons et les Jésuites. En 1759, les Jésuites sont expulsés du Brésil. Les Amérindiens des missions sont transformés en sujets de la couronne et deviennent les défenseurs des frontières portugaises en Amérique du Sud. L’influence religieuse a définitivement perdu sa force.

Fortes de leur maitrise du territoire amazonien, les autorités portugaises cherchent à faire reconnaitre par les autres Européens leur occupation de cet immense espace. Cependant, plutôt qu’une domination territoriale, le contrôle de l’Amazonie prend surtout la forme d’une maitrise des voies de communication. Cette reconnaissance passe par la conclusion de traités diplomatiques, afin de faire taire les revendications espagnoles. Ainsi, le traité d’Utrecht de 1715 reconnait la souveraineté portugaise sur les fleuves Amazone et Oyapock.

 

Indépendances étatiques et exploitation industrielle

Au XIXe siècle, l’Amazonie devient un objet d’attention à cause de ses ressources naturelles. Les économies latino-américaines continuent à axer leur développement sur la collecte ou l’extraction de produits plutôt que sur leur transformation. Les gouvernements de la région engagent des politiques de conquête et d’occupation. Par exemple, des conflits éclatent entre le Brésil et la Bolivie pour le contrôle de la région de l’Acre, importante zone de production de caoutchouc. L’exploitation du caoutchouc frappe par son exploitation massive. La décennie 1890 est marquée par une augmentation de la demande étrangère (pneumatique pour les bicyclettes et les automobiles, revêtement des câbles électriques, confection des tuyaux d’arrosage, des chaussures et bottes). Cette industrie génère d’importants profits. Le commerce du caoutchouc donne naissance à un nouveau type de personnages, les barons du caoutchouc, tel Julio César Arana. Ceux-ci prennent le contrôle des principales rivières à l’aide de milices armées. Ils évoluent hors des cadres juridiques. L’exploitation du caoutchouc précipite les employés et leur famille dans une situation qui s’apparente parfois à l’esclavage.

Au début du XXe siècle, l’Amazonie possède toujours l’image d’une terre hostile à la civilisation. Intégrer l’Amazonie à la nation brésilienne : c’est la croisade lancée, dans les années 1930, par le nationaliste Getulio Vargas. Il veut intégrer, peupler et rendre productive la forêt. C’est une priorité stratégique pour empêcher toute pénétration étrangère. Le gouvernement brésilien lance un programme d’intériorité du développement : colonies agricoles, nouvelles cités et infrastructures de transport, qui s’accompagnent d’une importante déforestation. En 1953, le gouvernement crée une Superintendance pour rationaliser les richesses naturelles pour générer des marchés d’exportation et des opportunités industrielles. En 1964, la politique de grands travaux ouvre la voie au saccage. La réforme agraire passe par la déforestation plutôt que par la redistribution de terres. Des photographies de propagande dévoilent la vaste canopée d’hier, les tracteurs écrasant les arbres d’aujourd’hui et les paysages industriels de demain. L’Etat vend le rêve d’un nouvel El Dorado annonçant la victoire de l’Homme contre la forêt et montrant les possibilités de s’enrichir.

Au cours du XXe siècle, la population amazonienne quadruple. La région connait une urbanisation brutale. Certes, la croissance annuelle bat des records, mais c’est au prix d’un développement morbide. Les installations hydrauliques et minières nécessitent la destruction de vastes espaces forestiers, entraînant le déplacement de dizaines de milliers de familles dans les communautés rurales et indigènes. Des abattoirs sont érigés entre les immenses ranchs bovins. Le commerce du bois explose au prix de la quasi extinction de certaines espèces. Privées de la canopée et des micro-organismes nourriciers qui en dépendent, les terres déboisées se révèlent vite impropres aux cultures intensives. Les mauvaises récoltes, l’isolement géographique et les maladies tropicales poussent très vite les familles à abandonner. En 1975, seules 6500 familles vivent encore dans les colonies agricoles. Le saccage de la forêt est aussi un drame social. Le défrichement repose en grande partie sur une main d’œuvre captive, puisée dans les masses de paysans sans terre appâtés par la propagande et les programmes gouvernementaux.

 

Le tiraillement entre enjeux économiques, politiques et climatiques

La question des frontières entre les Etats n’est aujourd’hui plus un enjeu. En revanche, celle du contrôle du territoire, de son peuplement et de l’exploitation des matières premières en constitue toujours une. Les gouvernements s’appuient sur des incitations fiscales afin de stimuler l’investissement dans l’agriculture, l’extraction minière ou l’exploitation de bois. Cependant, la concentration des terres entre les mains de grands groupes, la spirale spéculative et l’épuisement rapide des sols génèrent un cycle de conflits sanglants. Dès les années 1970, des travailleurs forcés dénoncent leurs bourreaux grâce au soutien de syndicats ruraux et de prêtres. Ces derniers aident aussi des paysans pauvres à occuper de vastes propriétés laissées à l’abandon. De nombreuses communautés locales s’organisent pour lutter contre l’arrivée des bulldozers sur leurs terres, comme les extracteurs d’hévéa de l’Acre, dont le leader Chico Mendes assassiné en 1988 fait figure de martyr écologiste. Les peuples indigènes s’organisent aussi en créant une coordination transfrontalière en 1984, grâce à leurs alliances avec diverses ONG. C’est grâce à eux que se multiplient, dans les années 1990, les démarcations indigènes, réserves traditionnelles et aires de conservation, qui atteignent près de 44% du territoire de l’Amazonie légale en 2010. Les Etats amazoniens doivent arbitrer entre croissance et exploitation des matières premières, grandes installations hydroélectriques, mise en culture, d’un côté et de l’autre une gestion socio-environnementale et la protection des populations amérindiennes. Aucun d’eux n’a renoncé à valoriser ses matières premières ni à développer son agriculture d’exportation.

D’un autre côté, l’Amazonie est depuis peu considérée comme un enjeu fondamental pour les équilibres climatiques de la planète et de la survie des peuples amérindiens. L’affaire a pris une tournure internationale. Le Brésil, qui détient 60% de l’Amazonie, redoute une internationalisation de la forêt, conduisant à une gouvernance supranationale au nom de causes transnationales. L’Amazonie est une zone de tension entre environnement et développement, mais aussi entre sauvegarde d’un patrimoine humain et naturel et modernisation. Souveraineté nationale et questions globales se télescopent en Amazonie et tout l’enjeu géopolitique est là.

 

 

Sources

Texte : « Amazonie : l’indien, le conquistador et la forêt-monde », L’Histoire, Hors-série n° 92, juillet-août 2021, 98p.

Image : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/amazonie-foret-amazonienne-nest-plus-puits-carbone-87147/

 

 

 

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