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Bébé à travers les âges




Bonjour chers lecteurs et bienvenue dans ce premier numéro des Natermelles. Aujourd’hui, je suis en compagnie de quatre mères d’époque différentes avec lesquelles nous allons aborder quelques points sur la vie de bébé. Je vous les présente. Nous avons Kassandra, citoyenne athénienne, Jehanne Bourcier, bourgeoise vivant à Paris au XIVe siècle, Louise de Fernond résidant à Versailles sous le règne de Louis XV et Mme Julie Pratoc, Lyonnaise des années 1920.

Comment nourrissez-vous vos enfants ?
Kassandra : Je n’allaite pas mon bébé. C’est une chose trop répugnante pour une femme de ma catégorie sociale. Je confie cette tâche à une nourrice qui est l’une de mes esclaves. Elle doit avoir des seins mous, de taille moyenne avec des mamelons ni trop gros ni trop petits. Son lait doit être moyennement épais, blanc sucré et homogène. Un médecin contrôle toutes ses qualités. Nous n’avons pas d’autres moyens de nourrir nos bébés que l’allaitement.
Jehanne : En effet, les premiers biberons datent du IXe siècle. Nous les fabriquons à partir de cornes d’animaux, dont nous perçons le bout de plusieurs trous et le recouvrons d’un chiffon. Pour ralentir la succion et éviter les étouffements, nous plaçons des embouts sur le goulot, en tissu, en bois, en os, en ivoire, ou en liège.
Julie : Je suis certaine que vos biberons sont de véritables nids à microbes, qui provoquent des maladies gastriques et des infections mortelles. Heureusement, les travaux de Pasteur sur la stérilisation et l’asepsie, ont rendu l’allaitement au biberon moins risqué. En plus, l’allaitement au lait de vache est désormais possible.

Vous parliez d’une nourrice. Je suppose qu’elle garde vos enfants toute la journée ?
Kassandra : Oui. J’ai toute confiance en ma nourrice. Je me suis assurée qu’elle saurait donner à mon enfant toute l’affection requise. Elle se doit de posséder des vertus morales : tempérance sexuelle, sobriété, propreté. Elle est très surveillée. Pas de relations sexuelles, exercices physiques modérés, alimentation riche en sucre, peu de bains. Tout ceci est important, car une nourrice peut transmettre ses vices par l’intermédiaire de son lait.
Louise : J’ai placé mon enfant chez une nourrice à la campagne. L’air y est meilleur que dans les villes. Les conditions de vie dans les hospices sont déplorables. Saviez-vous qu’un tiers des bébés meurent avant d’être placés auprès d’une nourrice ?
Julie : A mon époque le taux de mortalité des enfants placés en nourrice à la campagne baisse, mais reste supérieur à celui des enfants demeurant dans leur famille. Malgré cela, j’ai préféré engager une nourrice à domicile. Je ne peux pas me permettre de le garder car je travaille toute la journée. Certaines de mes collègues n’ont pas d’autres choix que d’emmener leurs bébés à l’usine. Il existe quelques crèches, mais leur nombre demeure insuffisant. La plus ancienne a été fondée à Chaillot en 1844 par Firmin Marbeau. Par la suite, les écoles primaires accueillent les enfants jusqu’à 13 ans. Ensuite, ils deviennent ouvriers agricoles, apprentis chez des artisans ou domestiques. Dès que mon enfant sera en âge de travailler, il travaillera. Nous avons besoin de revenus supplémentaires pour subvenir à nos besoins.

Revenons un instant sur la question de l’hygiène et de la santé. La mortalité infantile est très élevée. Si le bébé survit à l’accouchement, il n’est pas rare qu’il succombe à la maladie durant les premières années de sa vie. Comment combattez-vous la maladie ?
Kassandra : J’utilise des procédés magiques. Je place sur ses vêtements des talismans. Les talismans rouges protègent de la rougeole, de la rubéole, voire des hémorragies. Je soigne ses maladies avec du safran.
Jehanne : La prière constitue un moyen de guérir les maladies. J’invoque régulièrement la Vierge Marie. Sainte Apolline soulage les maux de dents, tandis que Saint Laurent soigne les brûlures.
Julie : Heureusement pour nos enfants, la médecine a fait d’énormes progrès. En 1828, Charles-Michel Billard a publié un traité des maladies des enfants nouveau-nés. Il décrit la spécificité du corps enfantin et de ses maladies à partir d’une centaine d’observations cliniques et post mortem. C’est lui qui a posé les fondements de la pédiatrie. Selon lui, le refroidissement est la principale cause de morbidité chez les nouveau-nés. Des couveuses sont mises au point par Stéphane Tarnier dans les années 1880. Parallèlement, les médecins mettent au point des vaccins, qui limitent le développement de certaines maladies dont la variole. La vaccination est obligatoire depuis 1902.
Jehanne : De manière générale, la mort d’un nourrisson est source d’angoisse. Le baptême et la foi permettent le salut. Qu’arrive-t-il aux enfants morts sans avoir été baptisés ? Au départ, comme le dit Saint Augustin, les bébés n’échappent pas au sort des damnés, même s’ils ne subiront que la plus douce des peines. Heureusement, ce discours s’adoucit au XIIe siècle. Par punition des enfants non baptisés, les théologiens entendent être privés de la vision de Dieu. Désormais, les bébés ne vont plus en enfer, mais dans une zone intermédiaire appelé les limbes.

Comment se passe l’hygiène au quotidien ?
Jehanne : La nourrice lui donne régulièrement un bain.
Kassandra : Pareil. Pour la toilette quotidienne elle utilise du miel pour nettoyer sa bouche.
Louise : Vous lavez vos enfants avec de l’eau ? On voit bien que vous n’avez pas vécu les épidémies de peste du XVe siècle. L’eau véhicule toutes les maladies. La nourrice ne change mon bébé qu’une fois par jour. Ses fesses sont essuyées, puis saupoudrées de poussière de bois, avant d’être enveloppées dans les langes séchés mais non lavés. La crasse possède des vertus protectrices et l’urine désinfecte.
Julie : Mais c’est horrible ! Dieu merci, nous avons redécouvert les bienfaits de l’hygiène. Les médecins encouragent les mères à laver les bébés et à les changer aussi souvent que possible. J’achète des petites savonnettes importées des Etats-Unis. Même les logis dépourvus d’eau courante ne dérogent pas à l’activité du bain.

Comment s’occupent vos enfants durant la journée ?
Kassandra : Ils jouent ! C’est une activité indispensable pour éveiller les sens et découvrir le monde. Le premier jouet que je lui ai offert est un hochet. Lorsqu’il sera en âge de marcher, il pourra tirer au bout d’une ficelle des jouets en forme d’animaux ou de petites charrettes. Ensuite, ma fille jouera à la poupée pour la préparer à son futur rôle de mère. Mon fils jouera avec son cheval de bois et des balles et des cerceaux. Ses activités contribuent à améliorer son adresse pour la guerre ou la chasse.
Julie : Je constate que rien n’a changé durant des siècles. Nous fabriquons toujours les mêmes types de jouets. La différence réside dans la production. Nos usines permettent une production en masse de jouets.

Abordons le thème de l’emmaillotement.
Kassandra : L’emmaillotement modèle le corps. Le corps d’un nouveau-né est malléable comme de la cire. L’emmailloter permet de prévenir les malformations. Ma nourrice l’enveloppe du cou aux chevilles. Elle serre les langes aux différentes parties pour façonner la morphologie. Ensuite, le bras droit sera libéré le premier afin que mon enfant soit droitier.
Jehanne : Nous, nous ajoutons un anneau au niveau de la poitrine, qui permet de saisir l’enfant ou de le suspendre. En l’air, il ne risque pas d’être attaqué par des animaux.
Julie : Je sais que cette pratique perdure, mais les médecins la déconseillent.
Je précise que l’emmaillotement a quasiment disparu depuis la fin des années 1960. Cependant, aujourd’hui, il connait un regain notamment dans les pays anglo-saxons.

Beaucoup d’enfants sont abandonnés
Kassandra : Des enfants sont laissés sur le perron d’un temple ou sur l’agora pour être recueillis. Nous appelons cela l’exposition. Nous n’abandonnons pas nos enfants par gaieté de cœur. Cela m’est arrivé une année. J’avais donné naissance à un enfant présentant une difformité. L’exposition peut se dérouler suite à une naissance hors mariage ou pour des raisons économiques. Nous avions un délai de cinq jours après la naissance pour réaliser l’exposition. A la suite de ce délai, si notre enfant n’avait pas été recueilli, mon mari aurait dû le reconnaitre publiquement au cours de la cérémonie de l’amphidromie. Heureusement, il a été recueilli par un marchand d’esclaves.
Jehanne : Pour nous autres chrétiens, l’enfant possède une âme. L’exposer comme vous le faites est interdit. L’infanticide est un crime. Néanmoins, nous sommes parfois contraints de les déposer sur le perron des églises ou de riches demeures pour des raisons identiques aux vôtres. Il me semble que les villes italiennes viennent tout juste de se doter d’établissements chargés d’accueillir les enfants.
Louise : Vous avez raison. L’Italie est précurseur en ce domaine. Chez nous, il faut attendre l’action de Saint Vincent de Paul au XVIIe siècle pour voir la création d’hospices spécialisés dans l’accueil des enfants abandonnés. Son action est importante, car j’ai ouïs dire qu’on compte 25.000 abandons par an pour un million de naissances. Les causes d’abandon sont toujours les mêmes. Des artisans dans le besoin ont confié leur fils à l’institution pour qu’elle s’en occupe le temps que leur situation économique s’améliore. Une personne travaillant dans un de ces hospices me racontait que les billets accrochés aux couffins expriment le déchirement des parents de délaisser leurs enfants et leur volonté de les récupérer au plus vite.
Julie : L’instauration du Code Civil en 1804 apporte une nouveauté. Toute recherche de paternité étant interdite, il devient impossible de poursuivre devant les tribunaux le géniteur refusant de reconnaitre son enfant. Les choses sont plus encadrées avec les débuts de la protection de l’enfance et les premiers droits de l’enfant. En 1889 et 1898, les deux lois sur la déchéance de la puissance paternelle permettent de soustraire les enfants maltraités à leur milieu familial.
D’ailleurs avec Françoise Dolto, le bébé devient une personne. Il s’exprime par des gestes, des regards et des expressions. Il convient de lui parler dès sa naissance. Il n’est plus la priorité de ses parents. On ne doit pas l’espionner, ni lui imposer un choix de vie. Le but de l’éducation n’est pas de dresser l’ enfant et de le rendre performant, mais de l’humaniser et de le sociabiliser dans le respect de la loi et des autres.
Louise : Quelle drôle d’idée. Vous allez créer des enfants plus roi que le roi Soleil.

Je vous remercie Mesdames pour vos témoignages intéressants. Je vous dis à bientôt pour un nouveau numéro des Natermelles sur le Site de l’Histoire.

Sources :
Texte : « Le bébé : des Romains à Dolto », Historia, n°587, mai 2018, pp24-46.
Image : http://leszinzinsdescartes.over-blog.com/

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