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Tuniques bleues et tuniques grises : les uniformes de la guerre de Sécession




 
D’un point de vue vestimentaire, la guerre de Sécession se résume à un conflit entre les Bleus (les Nordistes) et les Gris (les Sudistes). Les uniformes apparaissent bien pauvres face aux rutilantes tenues des armées européennes du XIXe siècle.

Le bleu foncé est la couleur de l’armée des États-Unis dès 1779, en opposition au rouge des Britanniques. En 1851, l’armée adopte un uniforme inspiré de l’armée française, référence dans le domaine militaire. Il se compose d’une redingote longue bleue foncée ou d’une vareuse courte pour les cavaliers et les artilleurs. Un système de couleur est adopté pour différencier les corps : bleu ciel pour l’infanterie, rouge pour l’artillerie, jaune pour la cavalerie, et noir pour les officiers d’état-major. Un képi, similaire aux militaires français, se substitue à la casquette ronde. Le shako subsiste jusqu’en 1858. Ensuite, il est remplacé par un chapeau de feutre bleu marine. Ce chapeau porte le surnom de « chapeau Jeff Davis » car à cette époque le futur président de la Confédération occupait le poste de secrétaire à la Guerre.

Au déclenchement du conflit, l’armée fédérale doit faire face à l’augmentation du nombre de soldats, qu’il convient d’armer et de vêtir. En cinq mois, l’armée passe de 16.000 à 600.000 hommes (appelés + volontaires). La manufacture de l’arsenal Schuylkill à Philadelphie n’est plus en capacité de répondre à la demande. En attendant de se doter d’un appareil productif, l’État recourt à des entreprises privées américaines et européennes. Certains entrepreneurs fournissent des vêtements de mauvaise qualité à des prix exorbitants. Dans les premiers mois du conflit, les soldats combattent vêtus des uniformes des milices des Etats. Même si le bleu domine, les champs de bataille présentent une palette de couleurs impressionnante. Il est fréquent que Fédérés et Confédérés arborent des tenues similaires, ce qui n’est pas sans conséquences fâcheuses. Pour ne rien arranger, les drapeaux des deux camps utilisent les mêmes couleurs et se ressemblent. Lors de la première bataille de Bull Run, une batterie nordiste suspend son feu en voyant approcher un régiment vêtu de bleu. Il s’agit en réalité d’un régiment confédéré, qui profite de l’aubaine pour abattre la plupart des canonniers. L’incident contribue à changer le cours de la bataille. Dans d’autres occurrences, des soldats sont abattus par erreur par des combattants de leur propre camp.
Il faut attendre la fin de l’année 1862 pour que la qualité et la production soient au rendez-vous. Désormais, la tenue nordiste traditionnelle se compose d’un képi bleu foncé, d’une vareuse courte de même couleur, d’un pantalon bleu ciel et de chaussures cloutées. À cette tenue s’ajoute un lourd manteau en hiver et un poncho en caoutchouc pour protéger de la pluie. Néanmoins, les uniformes demeurent inconfortables. En effet, ils sont intégralement conçus en laine y compris les sous-vêtements. Les soldats demandent à leur famille de leur confectionner caleçon et chemise en lin. De plus, la laine tient chaud l’été et ne sèche pas l’hiver. Afin de répondre aux importants besoins, l’armée est obligée de produire en masse synonyme de standardisation. En les recevant, les soldats devaient procéder à de nombreuses retouches.

La Confédération opte pour le gris pour des raisons économiques et pratiques. En effet, la teinture grise est facilement accessible et peu coûteuse. Par ailleurs, cette couleur est déjà utilisée pour certains uniformes durant la Guerre du Mexique, ou ceux des cadets des Académies militaires comme West Point ou Lexington en Virginie. L’uniforme confédéré est similaire à celui de l’armée fédérale dans sa coupe et sa composition. Les parements demeurent identiques à l’exception du noir qui ne désigne plus les officiers d’Etat-major, qui reçoivent le rose, mais les personnels de santé.
Le Sud dispose des matières premières, mais il lui manque l’appareil productif. Le blocus contraint les importations. Il n’est pas rare que les soldats pillent les cadavres après les batailles pour récupérer vêtements et chaussures, ou requièrent l’aide de leur famille pour fabriquer leur uniforme. En ce sens, le gris facilite les choses, car cette couleur s’obtient par des moyens artisanaux, dont le plus répandu consiste à utiliser le brou des fruits du noyer cendré. En procédant de la sorte, l’armée confédérée présente une uniformité de couleur, mais pas dans la coupe de ses uniformes.

Contrairement à leurs hommes, les officiers doivent payer leur uniforme, ce qui peut s’avérer une lourde charge, notamment pour les jeunes officiers. De par leur grade, ils peuvent se permettre quelques excentricités dans leur tenue. On songe par exemple à l’écharpe rouge de George Custer. A l’inverse, certains officiers se distinguent par une tenue négligée. Thomas Jackson porte toujours une vieille capote de soldat. Ulysse Grant se promène le plus souvent avec une tenue de campagne maculée de boue. Les officiers de la Confédération se battent dans un premier temps avec leur ancien uniforme de l’armée fédérale. Certains, n’ayant jamais été militaires auparavant, combattent dans des vêtements civils. Au Nord comme au Sud, la redingote des généraux se distingue de celles des autres officiers par leur double rangée de boutons. Certains préfèrent des tenues plus discrètes. Ainsi Robert Lee opte pour redingote civile grise.

La marine américaine hérite des uniformes bleu marine des Britanniques. Les choses changent au milieu du XIXe siècle. La tenue réglementaire se compose d’un pantalon bleu, d’une veste bleue marine à parements blancs, d’un foulard noir et d’un chapeau rond verni de couleur noire. Néanmoins, la mécanisation des navires contraint à modifier certains éléments. Ainsi, le chapeau est remplacé par un bonnet. Les officiers portent une veste à double rangée de boutons et une casquette. La marine confédérée emploie les mêmes uniformes que les Fédérés jusqu’en 1862, avant que le gris remplace le bleu, la coupe demeurant identique. Les marins ne sont pas mieux lotis que leurs camarades des forces terrestres en matière d’approvisionnement.



Sources

Texte :
EGIHARD, « Les Uniformes de la Guerre de Sécession », publié le 16 janvier 2012 sur le site www.histoire-pour-tous.f
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