Tour de Babel : histoire, mythe et archéologie d’une ziggourat légendaire à Babylone
Découvrez les origines historiques et bibliques de la tour de Babel, de la ziggourat de Babylone à l’influence mésopotamienne sur les textes sacrés.
L’histoire d’une tour bien réelle
La tour de Babel, telle qu’elle est nommée dans la Genèse, était en fait un édifice emblématique de la civilisation mésopotamienne, à savoir une ziggourat. À Babylone, cette ziggourat était vouée au culte du dieu Marduk. Construite en étages, l’édifice était constitué de briques crues (séchées au soleil), recouvertes d’un parement en briques cuites, plus résistantes aux aléas du temps. La ziggourat trouve ses origines en Mésopotamie pendant la période des rois de la Troisième Dynastie d’Ur (plus communément appelée Ur III), entre le règne du roi Ur-Nammu vers 2112 av. notre ère et la destruction de cet empire vers 2004. Édifice cultuel, la ziggourat marquait l’orgueil et la puissance d’une cité et de son dieu tutélaire.
Babylone et les origines de la tour
Babylone est une cité que l’on mentionne pour la toute première fois dans les écrits des tablettes du milieu du IIIe millénaire, mais qui ne devient réellement une puissance dominatrice que sous le règne du puissant conquérant et législateur Hammurabi (1792-1750). Marduk devenait ainsi le dieu le plus haut dans la hiérarchie du panthéon mésopotamien, dès lors que sa ville dominait toute la Mésopotamie. Le sanctuaire du dieu à Babylone date probablement de cette période, car l’archéologie a révélé que le souverain avait été l’investigateur de plusieurs chantiers colossaux, comme des constructions de ziggourats, dont on retrouve des traces dans certaines cités, à Kish notamment, appartenant à son grand empire. Il faudra attendre le règne plus tardif, mais ô combien tout aussi riche, du roi Nabuchodonosor II (vers 630-562 av. notre ère), pour que la ziggourat de la ville atteigne ses lettres de noblesse et qu’elle passe à la postérité par les écrits bibliques.
Les découvertes archéologiques
Les fouilles de Koldewey
Lorsque les premières fouilles furent menées par une mission allemande, celle de Robert Koldewey sur le site supposé de Babylone au début du XXe siècle, les archéologues espéraient découvrir de grandes richesses enfouies et plus particulièrement les jardins suspendus, une des sept merveilles du monde antique, ainsi que la tour de Babel décrite dans la Bible. Les excavations ne permirent pas de découvrir les mythiques jardins ni le moindre édifice qui aurait ressemblé à la tour de Babel, mais assurèrent de bien belles découvertes, comme la porte d’Ishtar et les monstrueuses murailles de la ville qui avaient émerveillé Hérodote.
La trace de la ziggourat
Cependant, la recherche de la tour de Babel ne resta pas infructueuse. Les fouilleurs dégagèrent les traces imprimées dans le sol d’un très grand édifice de forme carrée qui s’avéra être, au fil des recherches, la grande ziggourat du dieu Marduk. De cette imposante structure, il ne restait que quelques briques de fondations en sous-sol, mais la trace au sol est tout de même assez remarquable pour que l’on puisse, avec des photos satellites, la voir très distinctement. La tour fut détruite, nous racontent les sources, par Alexandre le Grand, qui, ayant fait de Babylone la capitale de son immense empire, voulut la faire reconstruire. Les calculs d’aujourd’hui, réalisés à partir de relevés topographiques, de mesures sur le terrain et d’informations puisées dans les tablettes et autres inscriptions, tendent à définir la ziggourat comme ayant été un édifice carré de 90 m de côté, constitué de sept étages construits en terrasses, ce qui portait l’édifice à une hauteur comprise entre 66 et 90 m. Les dimensions cyclopéennes de la ziggourat la rendaient visible à des kilomètres de la cité et devaient émerveiller et impressionner les visiteurs ainsi que les étrangers qui se rendaient à Babylone.
Le mythe rejoint l’Histoire
L’Etemenanki
La grande ziggourat de Babylone avait pour nom l’Etemenanki, littéralement « la maison, fondement du ciel et de la terre ». Elle est aujourd’hui considérée comme le cadre biblique de la très fameuse tour de Babel. Comme son nom l’indiquait, l’Etemenanki était un lien entre le monde divin et humain. Cette passerelle, à l’échelle d’un dieu, servait à faciliter la descente de Marduk auprès des hommes, et vice versa. L’apogée de ce dieu suprême se situait autour des règnes de Nabopolassar et de Nabuchodonosor II, et atteignit un tel degré d’adoration que la religion, en ces temps-là, tendait vers un certain monothéisme. Si ce particularisme religieux ne s’imposa finalement pas, il laissa quelques traces conceptuelles que l’on retrouva par la suite dans le culte de Mithra en Asie Mineure et à Rome, ou bien dans les religions zoroastriennes. Les Juifs déportés à Babylone, après la chute de Jérusalem en 597 et la destruction du temple de Yahvé, ont été si fortement inspirés par l’adoration de ce dieu que la théologie hébraïque ainsi que l’écriture même de la Bible en ont été fortement marquées.
Une inspiration biblique
Beaucoup de passages de la Bible ont été écrits à Babylone. Soucieux de ne pas perdre leur fondement idéologique, religieux et culturel, les lettrés juifs ont rassemblé ce qui se transmettait le plus souvent par voie orale pour le retranscrire, à l’image des civilisations mésopotamiennes qui, depuis Sumer, compilaient par écrit et archivaient toutes sortes d’œuvres ou de traités (scientifiques et judiciaires). Les écritures de certains passages, comme ceux du Déluge et la loi du talion (œil pour œil, dent pour dent), sont imprégnées de mythes et de faits historiques mésopotamiens. Ainsi, on peut donc dire que Babylone et ses mythes ont servi de modèles littéraires aux écrits de l’Ancien Testament.
Babel et la confusion des langues
Une fois entrées dans Babylone, les populations juives déportées ont été, comme bien d’autres, impressionnées par cette tour cultuelle qui s’élevait majestueusement et tutoyait le ciel. Tout en haut de la ziggourat se trouvait un temple haut, bâti en briques émaillées de bleu, qui scintillaient en reflétant la lumière du soleil, omniprésent dans cette région du globe.
Mais Babylone était aussi, et avant tout, la capitale d’un grand empire aux dimensions gigantesques. La ville grouillait d’activités et de bruits. Ainsi se mêlaient voyageurs, marchands et prisonniers qui venaient de tout l’empire et des royaumes voisins. Babylone était le centre où se rencontraient toutes les cultures antiques. L’idée de mélange du langage que l’on retrouve dans l’épisode biblique a pris racine aux pieds de cette tour ziggourat, qui voyait une explosion culturelle et linguistique au cœur de la métropole de Nabuchodonosor II.
Il faut voir dans l’étymologie du nom de la cité de Babylone l’idée de recherche qu’avaient les Babyloniens, et plus généralement les civilisations mésopotamiennes, pour atteindre leurs dieux. Le nom de Babylone vient de l’akkadien Bab-ilim, qui lui-même vient du sumérien Kà-dingir-ra, et signifient tous deux « Porte du Dieu ». Babylone, telle qu’on la nomme aujourd’hui encore, nous provient du grec, qui avait traduit le nom akkadien en Babylon. Le nom de Babel, lui, ne vient pas du nom de la cité, mais provient de l’hébreu bâlal, qui signifie « confondre », « brouiller ». La tour de Babel symbolisait, selon la Bible, la vanité et l’arrogance du premier héros Nemrod ainsi que celle des hommes dans son ensemble. Avant la construction de la tour, les hommes parlaient tous la même langue, celle-là même que Dieu avait utilisée pour s’adresser à Adam et Ève. La tour avait pour but, selon le texte sacré, à l’instar de la ziggourat, d’atteindre les cieux et ainsi de s’affirmer à l’égal de Dieu lui-même. Nous connaissons tous la fin de cet épisode où Dieu confondit les langues pour mettre fin à leur entreprise démesurée en répandant les hommes sur la terre. Aussi, comme le dit pratiquement en ces termes le texte biblique, on appela cette tour Babel (Bâlal), car c’était là que Dieu confondit les langues.
Le mythe mésopotamien du mélange des langues
Comme nous le disions, bien des récits mésopotamiens se retrouvent dans le texte biblique. La grande particularité des civilisations du Tigre et de l’Euphrate a été de compiler très tôt, par écrit, dans des bibliothèques, les récits et les mythes qui remontaient, pour la plupart, aux temps où les hommes de cette région se transmettaient leur histoire par oral. Transcrites sur des tablettes d’argile à l’aide des écritures dites cunéiformes, ces histoires se sont conservées, et depuis les premières fouilles jusqu’à nos jours, les archéologues en ont dégagé des centaines de milliers. Bien que nous soyons en mesure de les traduire, beaucoup restent encore cachées dans les sols archéologiques et dans les réserves des musées du monde entier. Certaines de ces tablettes sont plus ou moins bien conservées, et il est fréquent qu’il ne subsiste que des fragments de texte à déchiffrer.
Ainsi, les épigraphistes ont-ils eu la surprise de découvrir un texte où il est fait mention du dieu Enki, dieu qui façonna l’image de l’homme puis le créa, dispersant, de manière tout à fait analogue à Yahvé, les hommes sur la terre. Enki voulut ainsi briser la recherche de démesure de l’humanité qui courait irrémédiablement vers une nouvelle perte. Enlil, le dieu des dieux chez les Sumériens, pouvait à tout moment décider de la destruction des hommes :
« Enki modifia les langues dans leurs bouches. Jusqu’à ce qu’il les y eût placées (les langues étrangères), la langue de l’humanité était une. »
Qu’en déduire ?
Si la tour de Babel n’est pas la tour ziggourat du dieu Marduk étymologiquement parlant, celle-ci l’est véritablement par l’idée – inconcevable pour les Juifs – que l’édifice avait pour fonction d’atteindre le monde divin. La ziggourat de Marduk était le centre de toutes les attentions et charmait les voyageurs de toutes cultures. À Babylone, et plus particulièrement autour de ce centre religieux qui gérait des offices religieux, artisanaux et commerciaux, les Juifs ont été marqués par cette multitude de cultures et de langues qui convergeait, tel un seul être, vers ce sanctuaire sacré où l’on s’enquérait de la bienveillance de Marduk. Certains Juifs ont pu également retrouver, en la toute-puissance de ce dieu et dans ce monothéisme latent, l’image de Yahvé. Enfin, c’est également à Babylone que l’écriture de la Bible a pris un tournant décisif : les lettrés juifs, imprégnés de culture mésopotamienne, écrivirent le texte saint en empruntant des mythes et des coutumes babyloniennes, tout en les adaptant à leur propre perception de leur religion et de leur culture.
Sources bibliques et bibliographie
Sources bibliques :
Tout le monde se servait d’une même langue et des mêmes mots. Comme les hommes se déplaçaient à l’Orient, ils trouvèrent une plaine au pays de Shinéar et ils s’y établirent. Ils se dirent l’un à l’autre : « Allons ! faisons des briques et cuisons-les au feu ! ». La brique leur servit de pierre et le bitume leur servit de mortier. Ils dirent : Allons ! bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet pénètre les cieux ! Faisons-nous un nom et ne soyons pas tous dispersés sur toute la terre ! »
Or Yahvé descendit pour voir la ville et la tour que les hommes avaient bâties. Et Yahvé dit : « Voici que tous font un seul peuple et parlent une seule langue, et tel est le début de leurs entreprises ! Maintenant, aucun dessein ne sera irréalisable pour eux. Allons ! Descendons ! Et là, confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent plus les uns les autres. » Yahvé les dispersa de là sur toute la face de la terre, et ils cessèrent de bâtir la ville. Aussi la nomma-t-on Babel, car c’est là que Yahvé confondit le langage de tous les habitants de la terre, et c’est de là qu’il les dispersa sur la face de la terre.
Genèse, XI, 1-9
Source bibliographique :
Ziggurats et Tour de Babel, André Parrot, Paris : Albin Michel, 1949.
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c nul votre cite nimpotequoi
RépondreSupprimerTrou du cul.. C vous qui êtes nul
SupprimerTrès intéressant, à ceci près que la Tour de Babel relève de la prophétie, que de ce fait elle n'est pas encore construite, le déluge ne s'est pas encore produit, etc.
RépondreSupprimerNemrod n'est pas encore né.
Sur quoi bases_tu tes affirmations?
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