La naissance des villes
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Plusieurs attributs servent à
définir une ville. Tout d’abord, une ville présente un bâti dense organisé en
fonction des types d’activités et hiérarchisé en fonction de la richesse et du
pouvoir. Par exemple, Yanshi regroupe trois enceintes fortifiées : le
palais et les élites, les ateliers et la population et les cimetières. Elle est
également le lieu de la diversification des métiers. L’habitant se spécialise
et devient un expert. Par se technicité, il peut s’élever dans la société.
C’est le cas des métiers intellectuels (scribes, comptables, géomètres). Enfin,
la ville appartient à une divinité protectrice, dont la présence se traduit par
l’existence de temples et de prêtres. (Anu le ciel à Uruk, Ptah à Memphis). A
la différence des villages ne recelant que des outils et des objets
domestiques, les archéologues retrouvent dans les villes des objets de culte,
des bijoux, de la céramique décorée et des objets en bronze.
En règle générale, les premières
villes naissent sur les rives d’un fleuve (Nil, Tigre, Euphrate, Indus, Fleuve
Jaune). Les fleuves offrent une faune et une flore riches, des terres fertiles,
l’accès à l’eau et une voie de communication. Les premières villes s’élèvent au
–IVe millénaire entre le Tigre et l’Euphrate. Fondée en -3500 en Irak, Uruk,
est considéré comme la plus ancienne ville du monde.
Les conditions climatiques et les
ressources naturelles n’auraient pas permis aux Mésopotamiens d’immigrer vers
d’autres terres à la recherche de nouvelles ressources. Christophe Nicolle du
CNRS conteste cette théorie, car la Mésopotamie de l’époque n’est pas aussi
désertique qu’aujourd’hui. La croissance démographique aurait poussé à
l’émergence des villes. L’essor démographique contraint les habitants à
s’organiser dans les domaines social et politique. De plus, pour pérenniser
l’accès à l’eau, les Sumériens construisent des canaux d’irrigation. De tels
travaux sont impossibles sans une population mobilisée par une entité
dirigeante. Cette nouvelle autorité doit gérer les stocks, constituer les
réserves, comptabiliser et répartir les marchandises, anticiper les capacités.
Heureusement que l’écriture est là pour aider à tout consigner. Pour faire
accepter cet ordre social, l’autorité s’appuie sur les croyances religieuses.
Le roi se pose en intermédiaire entre les humains et le divin. Il érige des
temples et place la ville sous la tutelle d’une divinité protectrice. Ainsi, le
dieu lune Manna protège Ur. L’espace urbain, ceint par une muraille, devient
l’espace civilisé jouissant d’une protection divine.
L’urbanisation se diffuse du
Proche-Orient en Grèce et en Afrique du Nord, puis à l’Europe par le bassin
méditerranéen. Hiérakopolis est la première ville égyptienne. Située en
Haute-Egypte, elle est fondée vers -3000 et constitue un carrefour commercial
entre le désert (minerai), l’Afrique (ivoire, peaux) et le Levant (vins). Elle
comprend un quartier religieux, une enceinte et des maisons de briques crues.
La tablette du roi Narmer y a été retrouvée.
L’Europe non méditerranéenne,
peuplée de Celtes, connait une urbanisation tardive. Les exploitations agricoles
dominent le paysage, ce qui n’exclut pas l’existence de structures collectives.
Il existe des regroupements agricoles ou artisanaux qui forment des bourgs. La
véritable urbanisation des Celtes n’apparait qu’au –IIe siècle avec les oppida,
ces agglomérations fortifiées regroupant toutes les catégories sociales.
Selon l’UNESCO, la plus ancienne
ville d’Amérique est Caral au Pérou, fondée vers -3000. Néanmoins, cette
décision est contestée par de nombreux archéologues qui voient dans Caral un
grand complexe religieux, car il y a peu de résidences. Pour eux, la ville la
plus ancienne est San Lorenzo au Mexique fondée en -1200 par les Olmèques, dont
les ruines recèlent des habitations, des ateliers et des bâtiments religieux.
L’Afrique connait une urbanisation
plus tardive. Les premiers regroupements de population importants datent du VIe
siècle. Cependant, ces concentrations ne produisent pas de bâtiments publics,
même si des spécialisations existent. Des villes, telles que Dia et Djenne au
Mali prospèrent au Moyen Age avec le développement du commerce avec les
Musulmans et l’Inde.
Certaines parties du globe ont
échappé à l’urbanisation. L’Europe de l’Est, l’Asie centrale et l’Amérique du
Nord sont peuplées de nomades. Ces peuples des steppes, qui pratiquent
l’élevage et l’équitation ont opté pour une mobilité totale. De plus, la
dimension guerrière du nomade constitue un modèle prestigieux aux yeux des
autres civilisations. Etre un peuple nomade n’empêche pas l’existence de bourgs
saisonniers comme celui de Kamansk en Ukraine.
Aujourd’hui, plus de 50% de la
population mondiale est urbaine. Les villes ne cessent de s’agrandir en rognant
sur des sites naturels ou des terres agricoles. Trente villes comptent plus de
dix millions d’habitants. Les géographes les qualifient de mégapoles.
Sources
Texte : Les
Cahiers de Sciences et Vie : « Il y a 5500 ans : la
naissance des villes ou l’invention de la civilisation », n°155, août
2015, pp 26 à 85.
Image : reconstitution de Çatal Höyük : http://soocurious.com/fr/
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