La mort de Staline
Le 5 mars 1953, Satline meurt
d’une hémorragie cérébrale. Trois témoins racontent la fin du dirigeant de
l’URSS : sa fille Svetlana Allilouïeva, Nikita Khrouchtchev, et Alexandre
Rybine le garde du corps. Les témoignages diffèrent sur la chronologie des
évènements. Seules certitudes : le dictateur a fait un malaise et le
personnel a mis du temps à intervenir, car personne ne peut entrer dans les
appartements privés sans y être convié. Ses proches collaborateurs montrent peu
d’empressement à lui porter secours. Il est plausible que certains d’entre eux
se réjouissent de la mort d’un homme tyrannique, paranoïaque et imprévisible
qui les soupçonne de plus en plus. Ils en ont assez de vivre dans la peur et
aspirent à exercer le pouvoir tranquillement.
L’annonce de la mort de Staline
semble causer un grand désarroi dans le peuple. Depuis 1945, ce dernier jouit
du prestige de la victoire de Stalingrad et de la prise de Berlin. Malgré les
difficultés de la reconstruction, la misère des campagnes et la surveillance de
la police politique, le dirigeant de l’URSS peut se targuer d’une cote de
popularité favorable auprès du peuple. Les Russes, conformes à leur ancienne
tradition impérialiste, écrivent au dirigeant suprême pour lui demander de
l’aide ou la réparation d’une injustice.
Des rumeurs prétendent que des
médecins juifs l’ont empoisonné. Deux mois auparavant, le complot des blouses
blanches éclate, dans lequel, des médecins juifs sont accusés d’empoisonner les
dirigeants soviétiques. Avec la mort de Staline, l’intégrité du pays parait
menacée. Le peuple redoute une nouvelle guerre civile, risquant de déboucher
sur la dislocation de l’URSS et la supériorité des Etats-Unis.
Dès le 5 mars, les membres du
Comité central du parti et les membres du gouvernement se réunissent. Malenkov
reçoit la présidence du Conseil des ministres et la direction du secrétariat du
Comité central. Beria reçoit le ministère de l’Intérieur, Molotov les Affaires
étrangères, tandis que Khrouchtchev doit se contenter de la seconde place au
secrétariat du Comité central. Cette répartition est très vite contestée.
Malenkov laisse à Khrouchtchev le secrétariat du Comité central. Beria mène de
grandes réformes en très peu de temps. De son côté, Khrouchtchev persuade le
Praesidium (l’autorité suprême de l’URSS) que Beria veut démembrer l’Union
Soviétique et instaurer le capitalisme. Beria est arrêté le 26 juin. Le 10
juillet, le Comité central instruit un dossier pour espionnage au profit d’une
puissance étrangère et complot contre l’Etat. Jugé, il est condamné à la peine
de mort et exécuté, laissant le champ libre à Khrouchtchev.
Dès 1953, les dirigeants
impulsent la déstalinisation de l’URSS. Le nom de Staline est de moins en moins
cité par la presse. A l’occasion de la célébration de la victoire de mai 1945,
il est interdit d’afficher le portrait des dirigeants pendant les
manifestations publiques. Un grand nombre de prisonniers politiques sont
relâchés. Les médecins de l’affaire des blouses blanches sont relaxés. Le 29
juin 1953, le comité central du Parti Communiste d’Union Soviétique (PCUS),
répudie solennellement le culte de la personnalité.
En février 1956, le XXe Congrès
du PCUS s’ouvre sur le discours du Mikoïan. Cet ancien fidèle de Staline
critique la politique de l’ancien dirigeant. Ensuite, arrive le rapport
Khrouchtchev qui dénonce la tyrannie criminelle, la répression massive, les
arrestations, les déportations, les exécutions et les procès truqués. Les statues
à l'effigie de Staline sont démontées. La ville de Stalingrad est rebaptisée
Volgograd. En 1961, le corps de l’ancien dirigeant est retiré du mausolée sur
la place rouge pour être enterré près du Kremlin.
En France, l’opinion publique est
partagée, à l’image de la presse. Le
Monde parle du fascisme rouge et du fossoyeur des libertés humaines. De son
côté, l’Humanité ne tarit pas
d’éloges sur l’artisan de la victoire, du socialisme et de la paix. Les
Français sont impressionnés par la puissance soviétique et l’efficacité de son
économie planifiée. Cette dernière est tronquée par une méconnaissance du pays
et des statistiques officielles faussées. Néanmoins, l’opinion publique
n’apprécie pas l’intervention soviétique en Indochine contre les forces
françaises et en Corée. De plus, la
France fait partie de l’OTAN sous l’égide des Etats-Unis.
Le Président Vincent Auriol
envoie un simple message de sympathie au Praesidium eu égard au rôle de l’armée
rouge dans la victoire sur l’Allemagne. Le président de l’Assemblée nationale,
Edouard Herriot, prononce un éloge funèbre avant que les députés respectent une
minute de silence. Le Sénat ne fait rien, malgré la demande des sénateurs
communistes.
Staline est l’homme politique qui
a le plus pesé sur le XXe siècle. Il a participé au pouvoir de 1917 à 1953. Il
a imposé au monde communiste un régime qui lui a survécu plus de quarante ans.
Il a hissé l’Union Soviétique au rang de superpuissance mondiale et de modèle
idéologique et politique. Son système politique se fonde sur l’abolition de la
propriété privé, sur une économie administrée, sur la terreur, la propagande,
les déportations et les exécutions.
Avec la mort de Staline, l’URSS
passe d’un régime totalitaire autour de la figure d’un guide à un régime
autocratique centré sur le parti et les institutions qui durent au-delà des
personnalités.
Sources
Texte : « Staline : les derniers jours du
tyran », Historia, n°273,
février 2003, pp31-50.
Image : lecourrierderussie.com
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