Marie Stuart, reine d’Ecosse
Cher Jacques-Auguste,
Je t’écris pour te faire part des
récents évènements qui ont secoué Londres récemment. Ce 8 février, Marie
Stuart, reine d’Ecosse, a été décapitée pour crime de haute trahison. Le
premier coup du bourreau est mal porté. Il s’est abattu sur l’occiput. Marie a gémi
et craché du sang, mais n’a pas rendu l’âme. Le deuxième coup s’enfonce dans la
nuque. Il faut un troisième coup pour la décapiter. Ce spectacle macabre ne
s’achève pas là. Lorsque le bourreau s’empare de la tête pour la montrer à
l’assistance, elle roule sur le plancher, ne laissant dans la main qu’une
perruque. Marie montre un visage d’une vieille femme aux cheveux ras et gris.
Le doyen de Petersborough met un terme à l’ébahissement de la foule en
prononçant ces mots : « Amen ! Amen ! Ainsi périssent les
ennemis de la reine. »
Tu connais, à n’en pas douter,
les débuts de la vie de Marie Stuart, celle qui fut également votre reine
durant une année. Née le 8 décembre 1542 à Edimbourg de Jacques V roi d’Ecosse
et de Marie de Guise. Devenue reine d’Ecosse à la mort de son père l’année
suivante. Marie de Guise assurant la régence trouve refuge en France pour
éviter le courroux d’Henri VIII qui rêve d’annexer ce royaume au nord du sien.
Marie de Guise négocie une union avec François l’ainé des trois fils d’Henri II
et de Catherine de Médicis. Le but de ce mariage est de sceller une alliance
entre la France
et l’Ecosse, pour encercler l’Angleterre protestante. Votre roi Henri II refuse
de reconnaître Elisabeth comme la reine légitime d’Angleterre et d’Irlande et
considère sa bru comme la véritable souveraine. Votre souverain pousse la
provocation jusqu’à insérer les armoiries d’Ecosse, d’Angleterre et d’Irlande
au blason de son fils François.
A la mort du roi François II en
1560, les intrigues de cours mêlant les Guise et l’hostilité de Catherine de
Médicis l’obligent à quitter la
France pour retourner en Ecosse. Seulement durant son
absence, le pays est tombé aux mains du parti calviniste dirigé par le comte de
Moray. Marie, profondément catholique, ne tolère pas cette situation. En
juillet 1566, elle épouse Henry Stuart, lord Darnley. Ce mariage lui vaut
l’animosité des calvinistes et surtout d’Elisabeth. En effet, Darnley est un
descendant d’Henri VII et peut se révéler un prétendant au trône. Le couple royal
bat rapidement de l’aile. Marie entretient une liaison avec son secrétaire
David Rizzio. Le mari jaloux s’allie aux calvinistes pour pénétrer en force
dans le château d’Holyrood. Il assassine l’amant sous les yeux de Marie. Il
espère récupérer la couronne d’Ecosse, mais n’a pas pris conscience de la haine
des calvinistes à son égard. Il se retrouve prisonnier avec sa femme. Le couple
parvient à s’échapper et à regagner Edimbourg. Marie donne naissance à un fils.
Marie ne supporte plus son mari,
qui de plus, est un poids politique. Le 10 février 1567, la maison où réside
Darnley explose. On retrouve dans le jardin le corps de Darnley étranglé. Les
autorités arrêtent lord Bothwell. Tout le monde pense que Marie a commandité
l’assassinat. Le procès de Bothwell débouche sur un acquittement faute de
preuves suffisantes. La preuve arrive le 15 mai 1567 lors du mariage de Marie
et de Bothwell. Une fois l’union scellée, Bothwell retient captive la reine
quelques temps avant de la libérer. Marie gracie Bothwell. De là à penser qu’il
ne s’agit que d’une mise en scène, je te laisse juge. Quoiqu’il en soit, la
colère gronde dans le pays. Cette fois, c’est l’ensemble de la noblesse qui
s’unit pour renverser le couple royal. Ils sont emprisonnés au château de
Lochleven. Marie doit abdiquer. Son fils est sacré roi, le 26 juillet 1567,
sous le nom de Jacques VI. Trop jeune pour régner, la régence échoit au comte
de Moray.
En mai 1568, Marie s’enfuit de
Lochleven et chevauche jusqu’à Londres pour se placer sous la protection da sa
cousine Elisabeth. Marie ne le sait pas, mais elle quitte une prison pour une
autre. La reine d’Angleterre la considère comme une suspecte et demande que
toute la lumière soit faite sur le meurtre de Darnley. Un nouveau procès
s’ouvre à York en octobre 1568. Thomas Howard, duc de Norfolk préside la
commission. Marie conteste la légitimité de cette commission. Toute imprégnée
des théories françaises, elle considère tenir son pouvoir de Dieu et n’avoir de
comptes à rendre qu’à son créateur. L’enquête met au jour des lettres
compromettantes. Elles démontrent la complicité de Marie dans le meurtre de
Darnley et dans son pseudo enlèvement par Bothwell. Les avocats de Marie
s’évertuent à prouver la falsification de ces documents. Le procès se clôture
sur un non-lieu. Ni acquittée, ni accusée, Marie est maintenue en détention.
En prison, Marie entretient de
nombreuses correspondances épistolaires. L’excommunication d’Elisabeth et les
nombreux complots catholiques qui soulèvent le nord de l’Angleterre compromettent
Marie aux yeux du peuple. Elle est accusée d’être l’organisatrice des complots
et d’entretenir des contacts avec les puissances étrangères, notamment
l’Espagne, en vue d’une invasion. En octobre 1586, un nouveau procès s’ouvre à
Fotheringay pour haute trahison. Les preuves sont accablantes. Toutes les
lettres codées de Marie ont été interceptées, décodées et recopiées par les
services de la reine dirigés par Francis Walsingham. Le verdict tombe. Marie
est déclarée coupable d’avoir comploté contre la vie de la reine d’Angleterre
et contre la sécurité du royaume.
J’espère que ces éléments te seront utiles pour la grande
œuvre historique à laquelle tu t’es attelé avec zèle. Je reste ton éternel abonné.
Ben Sacks
Londres, ce 12 février 1587
Sources :
Texte :« Marie
Stuart, reine trois fois maudite », Historia,
n°850, octobre 2017, pp24-46.
Image :
Matthieu
Ignace van Brée, « Marie Stuart conduite au supplice », 1819,
Musée du Louvre (http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/matthieu-ignace-van-bree_marie-stuart-conduite-au-supplice_huile-sur-toile_1819)
Bonjour,
RépondreSupprimerCe petit mot pour vous signaler l'auto-édition de Horatio, le bras armé de Shakespeare (chapitre.com, 2019), ma pièce de théâtre écrite pour illustrée le suicide du héro et la prise du pouvoir par la fille de Marie Stuart. Une hypothèse de travail qui m'a conduit à écrire la suite du Hamlet de Shakespeare. Un travail de 4 années que j'ai eu envie avant tout de partager.
Qu'on se le dise!
Sylvain Couprie