En route vers Richmond !



Après son échec pour s’emparer de Spotsylvania, Ulysse Grant poursuit sa route au Sud. Il espère que Robert Lee, voyant qu’une menace pèse sur Richmond, sortira de ses défenses pour l’affronter en terrain découvert. Ainsi, les Nordistes franchissent la North Anna River le 23 mai 1864. Après une série d’accrochages, ils parviennent à créer une tête de pont sur la rive sud de la rivière. Le lendemain, Lee positionne ses forces tel un entonnoir composé de tranchées et de barricades et attend que les Yankees reprennent la route. Ces derniers s’engouffrent dans le piège sans imaginer ce qui les attend. Pire, ils pensent que les Rebelles ont fui. Ils ne doivent leur survie qu’à un malaise de Lee causé par une extrême fatigue. Alité, le général sudiste ne peut donner ses directives et aucun de ses subordonnées ne prend l’initiative. Le piège ne se referme pas sur Grant qui découvre la supercherie. Il réorganise ses forces et contourne ce traquenard.

L’objectif du commandant unioniste est le carrefour de Cold Harbor. En se déplaçant assez rapidement, il pourrait prendre par surprise le flanc droit de son adversaire. Lee est bien conscient de ce risque. Il a déjà envoyé sa cavalerie se positionner à Old Church pour défendre Cold Harbor. Le 31 mai, les cavaliers de Philippe Sheridan et de Fizburgh Lee s’affrontent. Les Rebelles battent en retraite. Les fantassins arrivant en renfort, se débandent en voyant leurs collègues fuir. Sheridan informé de l’arrivée de l’infanterie ennemie quitte Cold Harbor. Grant lui ordonne d’y retourner. Constatant que la place est libre, Sheridan installe ses quartiers.
Le 1er juin, les Confédérés se sont remobilisés et chassent les Nordistes. Ils construisent sans tarder des fortifications. Cette position est excellente pour la défense grâce à ses marais, ses rivières, ses ravines et ses bois. De plus, la topographie des lieux empêche une attaque simultanée sur l’ensemble de la ligne de front et la végétation réduit la visibilité. Les Nordistes fatigués par les combats des jours précédents se déplacent avec lenteur. Lorsqu’ils arrivent le 3 juin, le système de défenses confédérées est bien en place, qui brise l’assaut des tuniques bleues. En fin de journée, les soldats refusent d’obéir. 7.000 d’entre eux ont péri ou ont été blessés en quelques heures. Le lendemain, les deux généraux s’accordent une trêve pour récupérer les blessés qui n’avaient pas pu être évacués et enterrer les morts.

Grant comprend qu’il ne sert à rien de tenter un nouvel assaut contre Cold Harbor. Avant de reprendre sa route, il envoie la cavalerie de Philippe Sheridan combattre l’armée d’Early dans la vallée de la Shenandoah. Le 13 juin, Grant contourne Richmond par l’Est et traverse la James River, dans le but d’attaquer la capitale par le Sud et de s’emparer de Petersburg véritable nœud ferroviaire et point de ravitaillement de Richmond. Lee ne connaît pas exactement la position de son adversaire. Trois choix s’offrent à lui : se replier en abandonnant la capitale, rester sur place au risque d’être assiégé, ou sortir pour combattre en étant en infériorité numérique. Privé de cavalerie et donc de renseignements, il préfère attendre et voir.

Le 15 juin, l’avant-garde fédérale approche de Petersburg. Les Nordistes trouvent une position solidement fortifiée. Des parapets de six mètres d’épaisseur surplombent des fossés de quinze mètres de profondeur. Se souvenant de Cold Harbor, George Meade rechigne à lancer un assaut sans une préparation pointilleuse. Sans le savoir, il vient de perdre l’opportunité de prendre la ville. Le général sudiste Pierre Beauregard dispose à peine de 14.000 hommes pour défendre la place. Les 80.000 tuniques bleues auraient pu s’emparer de la ville. Ce répit permet aux Rebelles de consolider leurs défenses et à Lee, qui sait maintenant où se trouve Grant, de se mettre en mouvement. Le 18 juin, les Fédéraux butent sur les défenses confédérées. Les soldats se montrent très vite réticents à monter à l’assaut.
Fin juin, Grant ordonne le creusement de tranchées pour faire exploser un fort. Les ingénieurs creusent un tunnel de 150 mètres pour y entasser la poudre. Le bataillon de soldats noirs, qui devait conduire la charge après l’explosion, est remplacé à la dernière minute par un bataillon de soldats blancs inexpérimentés. Lorsqu’ils se lancent à l’assaut, les soldats descendent dans le cratère au lieu de le contourner et sont massacrés. Cet épisode reste dans l’histoire sous le nom de bataille du cratère. Après ce nouvel échec, les tuniques bleues exténuées refusent de combattre. Grant se résout à faire le siège de Petersburg.

La marche de Grant vers Richmond, appelée la campagne de l’Overland, marque un tournant dans la manière de combattre. Depuis le début du conflit, les batailles sont espacées dans le temps et menées sur des espaces dégagés. Dorénavant, les combats sont quasi incessants. Les belligérants construisent des fortifications et creusent des tranchées pour se protéger des tirs d’artillerie et repousser les assauts. Le conflit entre dans une guerre de siège où règne l’immobilisme et dans laquelle les nerfs des soldats sont mis à rude épreuve. En ce sens, la guerre de Sécession préfigure les combats de la Première guerre mondiale.


Sources
Texte :
- Mc PHERSON James, La Guerre de Sécession, Robert Laffont, Paris, 1991, 952p.
- KEEGAN John, La Guerre de Sécession, Perrin, Paris, 2013
- DOOM Logan, « La campagne de l’Overland», 24 août 2016,
 https://laguerredesecession.wordpress.com/2016/08/24/la-campagne-de-loverland/

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