Histoire abrégée du Portugal (2/2)
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Une indépendance politique mais pas économique
Les Français soutiennent les
nobles dans leur révoltes contre l'Espagne. Le 1er décembre 1640, les Portugais
envahissent le palais du gouverneur et proclament roi le duc de Bragance sous le
nom de Jean IV. L'Espagne est prise dans la Guerre de Trente ans et subit des
révoltes en Catalogne. Sa contre attaque en 1644 se solde par un échec.
Plusieurs guerres se déroulent. Les Portugais reçoivent l'appui de la France et
de l'Angleterre. Le 23 juin 1661,
l 'Angleterre et le Portugal signent un traité. En
échange d'une autorisation pour les Anglais de commercer librement dans les
possessions portugaises, ces derniers s'engagent à défendre militairement le
Portugal et ses colonies. Ce traité est la première pierre de la dépendance
portugaise via à vis de l'Angleterre. En 1668, le traité de Lisbonne reconnait
l'indépendance du Portugal et le tracé des frontières. Ces conflits ont ruiné
l'empire colonial. Les Portugais conservent le Brésil et quelques comptoirs en
Asie du sud-est.
Le pays s'efforce de restaurer
son prestige. Le roi tente de créer des manufactures, mais la découverte d'or
au Brésil ruine le projet. Le Portugal privilégie à nouveau les importations de
produits manufacturés anglais. Le pays accroit son retard industriel et sa
dépendance vis à vis de l'Angleterre. Le 27 décembre 1703, les Anglais
obtiennent l'autorisation de fonder au Portugal des maisons de négoce et la
baisse des taxes d'exportation sur le vin de Porto. L'aristocratie freine toute
modernisation du pays. Elle vit dans le luxe et le gaspillage. Ce mode de vie
se ressent sur l'architecture et la statuaire. Le pays s'appuie exclusivement
sur le Brésil à l'heure où l'Asie lui échappe au profit des Anglais, Français,
Hollandais. Le Brésil est une source de métaux précieux et un moyen pour le
peuple de trouver un travail que la métropole ne peut lui offrir. La diminution
des réserves d'or affaiblit le pays et la monarchie.
Le ministère de Pombal
Le tremblement de terre de
Lisbonne de 1755 permet au marquis de Pombal, premier ministre de Joseph Ier
de prendre le pouvoir. La famille royale a fui la capitale. Ce désastre permet
d'attaquer la puissance des Jésuites. Jouant sur l'effet de punition divine et
accusés de complot envers l'État, ils sont expulsés du pays et de ses colonies
en 1759.
Pombal reconstruit Lisbonne dans
l'esprit des Lumières dans un style néoclassique prônant la simplicité et la
fonctionnalité. Il encourage le développement des manufactures. Sa politique
économique permet de rétablir la balance commerciale. Il réforme l'enseignement
scolaire en excluant les jésuites et les universités. Il met en place les
fonctionnaires d'État. Le Portugal se modernise. La justice seigneuriale est
abolie. L'administration est uniformisée sur tout le territoire. Les idées des
Lumières pénètrent au Portugal avec la création de l'Académie des sciences et
le développement de la presse. Parallèlement, Pombal instaure les théories de
la monarchie absolue, de la centralisation et censure et lutte contre toutes
les oppositions au régime. En 1777, il est écarté du pouvoir après la mort du
roi.
Époque Contemporaine
Les guerres napoléoniennes
En 1793, sous la pression
anglaise, le Portugal rejoint la coalition anti-française. Arrivé au pouvoir,
Napoléon Bonaparte encourage les Espagnols à annexer le Portugal. Après la
défaite de Trafalgar, le Portugal est sommé d'interdire l'accès de ses ports
aux navires anglais. Deux choix s'offrent à Jean VI : accepter en s'attirant
les foudres des Anglais ou refuser et se voir envahir par la France. Le roi
essaye de gagner du temps, mais le 20 novembre 1807, l 'armée française
pénètre dans le pays. La famille royale s'enfuit au Brésil avant que Lisbonne
ne soit prise. La résistance s'organise, ce qui facilite le débarquement
anglais dans la péninsule. Le général Beresford chasse les Français.
Le Portugal est ruiné et dévasté.
Jean VI hésite à rester à Rio de Janeiro. Durant cet exil (1808-1822), le
Brésil se modernise et se dote d'une structure politique et administrative. En
1810, le pays n'est plus considéré comme une colonie et donne toujours des
richesses au Portugal.
La révolution libérale de 1820
Vivant dans la nostalgie de leur
glorieux passé, la bourgeoisie espère d'importants changements. Elle est
réceptive aux théories libérales. En
revanche dans les milieux populaires, le libéralisme est associé aux ingérences
étrangères.
Le 24 août 1820, la Junte
provisoire du gouvernement suprême du royaume assure l'intérim et convoque une
assemblée pour rédiger une constitution. Les nobles veulent un retour de la
monarchie, tandis que les bourgeois souhaitent une monarchie libérale. Tandis que
Jean VI regagne le Portugal, l'Assemblée approuve une constitution très
progressiste. Les pouvoirs sont séparés. Le roi a une simple fonction
symbolique. Le législatif revient à un parlement élu au suffrage direct. Les
privilèges sont supprimés et la liberté de la presse garantie. Le nouveau
régime trop progressiste et anticlérical ne rencontre pas le soutien populaire.
Le 7 septembre 1822, le Prince
Pierre, resté au Brésil, refuse de rentrer au Portugal. Son refus marque
l'indépendance du Brésil. En 1824, Jean VI mate une révolte absolutiste avec
l'aide des Anglais. Profitant de ce mouvement, il juge le régime trop libéral
et le réforme. Il est soutenu par le peuple.
Le retour de l'absolutisme
Michel Ier gouverne de façon très
autoritaire. De nombreuses révoltes éclatent opposants les libéraux et les
absolutistes. En 1834, Marie monte sur le trône et met en place un gouvernement
conservateur. La situation économique se dégrade. De nombreux paysans quittent
leur terre. Des citadins les rachètent à bas prix sans pour autant les
exploiter. En septembre 1836,
l 'armée et les classes moyennes se révoltent.
En 1842, Costa Cabral arrivé au
pouvoir dirige le gouvernement d'une main de fer et met en place de nombreuses
réformes. L'opposition profite d'une loi interdisant les enterrements dans les
églises pour monter un soulèvement populaire. Le peuple supporte déjà mal la
pression fiscale et le service militaire. La monarchie menacée demande
l'intervention des Anglais. La rébellion est matée.
La régénération et le rotativisme
Le 1er mai 1851, Costa Cabral est
renversé et remplacé par Saldanha qui voit le retour des idées libérales. Le
gouvernement développe l'agriculture, l'industrie et le commerce. Les
politiques de grands travaux (voies ferrées, télégraphe) permettent de
désenclaver certaines régions. La classe moyenne grandit. Le tourisme se
développe. Cependant si la consommation augmente, elle se fait au profit de
produits étrangers. Les industries nationales ne trouvent des débouchés que
localement.
Les étudiants de l'université de
Coimbra remettent en cause l'ordre bourgeois, les institutions politiques et le
poids de l'Église. Ils cherchent à ouvrir le pays à de nouveaux courants de
pensées (socialisme, communisme...) lors des conférences du Casino. Cherchant à
rénover leur pays, ils débattent des problèmes du pays et des solutions à y
apporter.
L'échiquier politique se compose
de deux partis le Parti régénérateur et le Parti historique qui alternent tour
à tour l'exercice du pouvoir, d'où le terme employé par les historiens de
rotativisme. De nouveaux partis voient le jour : le Parti républicain en 1876
et le Parti socialiste en 1873.
La domination britannique
Avec la perte du Brésil, le
Portugal se tourne à nouveau vers l'Afrique. Le Portugal espère reconstituer un
nouvel empire, mais se heurte aux autres puissances colonisatrices. En 1890,
les Britanniques exigent que les Portugais retirent leurs troupes entre le
Mozambique et l'Angola. Le gouvernement est obligé de céder. Un sentiment
antibritannique nait. Les produits venant de l'empire britannique sont
boycottés. Le roi est critiqué car il a humilié ses sujets. Le pays marque son
attachement à son empire colonial.
La République
Les républicains jouent sur le
mécontentement populaire pour progresser. Le 3 octobre 1910, le républicain
Miguel Bombarda est assassiné. Une révolte éclate. Les insurgés, soutenus par
la population, prennent d'assaut le palais. La république est proclamée.
Un nouveau drapeau et un nouvel
hymne sont créés. L'État est réorganisé en optant pour la décentralisation et
l'autonomie des colonies. Le pays se dote d'une nouvelle monnaie l'escudo. La
formation des enseignants est améliorée. La scolarité rendue obligatoire
jusqu'à 10 ans. Les universités de Lisbonne et de Porto sont créées.
L'assistance publique et la protection de l'enfance se développent. Le droit de
grève est reconnu. Le jour de repos hebdomadaire est instauré.
Cependant, la laïcisation est mal
acceptée par la population profondément catholique. L'enseignement religieux est
interdit, les congrégations expulsées, les biens de l'Église nationalisés, le
mariage civil et le divorce instaurés.
La première guerre mondiale
Le Portugal entre en guerre du
côté de l'Entente pour protéger son empire colonial et se démarquer de l'Espagne
alliée de l'Allemagne. Pourtant les monarchistes et les cléricaux éprouvent
plus de sympathie pour ces pays plutôt que pour une Grande-Bretagne libérale et
laïque lorgnant sur ses colonies. A la demande de la Grande-Bretagne, le
Portugal s'empare des navires allemands mouillant dans ses eaux déclarant de
fait la guerre à l'Allemagne en mars 1916. La victoire de l'Entente permet aux
Portugal de conserver ses colonies.
L'effort de guerre aggrave la
crise économique. Le désordre régnant à cause de la crise et de l'épidémie de
grippe espagnole, favorise les mouvements autoritaires. Le 5 décembre 1917,
Sidonio Pais arrive au pouvoir par un coup d'État. Il dissout l'assemblée, renforce
les pouvoirs du président et la presse est censurée. Il instaure un régime fort
et catholique. Pais est assassiné en 1918.
Des juntes militaires se
disputent le pouvoir et luttent contre le retour de la République et prônent le
retour de la monarchie. Le 19 octobre 1921, lors de la nuit sanglante,
plusieurs personnalités républicaines sont assassinées. L'armée et les
officiers jouissent du prestige de la guerre. Le 28 mai 1926, le général Gomes
da Costa s'empare du pouvoir et instaure un régime fort sur le modèle fasciste
italien. Il reçoit l'appui de la population, considérant que seul un régime
fort peut mettre un terme aux crises économiques et politiques du pays.
L'ordre nouveau de Salazar
Antonio de Oliveira Salazar,
nommé ministre des finances du nouveau gouvernement, met en place un plan
économique. Ayant le contrôle sur toutes les décisions budgétaires, il accroit
son pouvoir. Le Portugal apporte son soutien à Franco et renoue ses liens avec
le Vatican. Durant la seconde guerre mondiale, bien que favorable à l'Axe, le
Portugal reste neutre. La fin de la guerre n'amène pas de mouvements
démocratiques de masse. Les États-Unis apportent leur soutien au régime dans la
lutte contre l'expansion communiste. Le Portugal intègre l'OTAN en 1949 et
l'ONU en 1955.
Le massacre de colons portugais
en Angola en 1961 marque le début des guerres d'indépendance. Les pressions
internationales poussent Salazar vers une décolonisation pacifique. Ce dernier
suit l'opinion publique toujours fortement attachée à l'empire. Il fait taire
les critiques en autorisant les investissements étrangers et en développant
l'éducation dans les colonies.
La révolution des Œillets
Impliqués en Afrique, les
militaires se rendent compte qu'il est absurde de vouloir garder à tout prix
l'empire colonial. Le 25 avril 1974, le général Antonio de Spinola renverse le
pouvoir. Les divergences politiques sur les suites à donner sont à l'origine
d'une période de deux ans appelée le processus révolutionnaire en cours marqué
par des attentats. Les partis d'extrême gauche prennent de plus en plus
d'importance, tandis qu'un triumvirat de militaires prend en charge les
affaires courantes.
La constitution de 1976 fait du
Portugal une démocratie sociale. Une révision en 1982 limite le rôle des
militaires et le pouvoir du Président. Le pays est touché par une série
d'attentats organisés par l'extrême gauche.
L'Union européenne
En 1986, le Portugal entre dans
la Communauté européenne. Cette adhésion
impose au pays de profonds ajustements pour rattraper son retard économique. Le
Portugal bénéficie des fonds européens pour se moderniser. Le gouvernement
d'Anibal Cavaco Silva mène une politique de libéralisation et privatise les
entreprises. L'entrée dans l'euro impose la poursuite de la rigueur économique.
L'exposition universelle de
Lisbonne en 1998 est un moment de communion nationale. Les Portugais retrouvent leur fierté, malgré la rétrocession de Macao à la Chine en 1999. En 2004, le
pays organise la coupe d'Europe de football.
Les élections de 2009 confirment
les socialistes au pouvoir. La crise de 2011 impose au premier ministre José
Socrates un nouveau plan d'austérité. Son plan est rejeté et il doit
démissionner. Le Portugal demande l'aide de l'UE en échange d'un plan d'austérité
drastique (privatisations, baisse des salaires de la fonction publique,
plafonnement des aides sociales, augmentations des taxes).
Source
Texte :
OLIVEIRA, Marins Joaquim Pedro
de, Histoire du Portugal, La
Différence, 2994, 460p.
BLOCH-PUJO Nathalie, Portugal avec Madère et Açores,
Hachette, Paris, 2011, 480p
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