De la foire à la pipe : L'Histoire méconnue de l'expression "Tête de Turc"
Dans le tumulte des foires du XIXe siècle, une étrange attraction attirait les curieux. Un mannequin à l'effigie d'un Turc, coiffé d'un turban, attendait patiemment que les plus forts viennent tester leur puissance en frappant sa tête de bois avec un marteau. C'est de cette image que naquit l'expression "tête de turc", désignant aujourd'hui une personne victime de moqueries ou de méchancetés.
Mais une autre origine, plus poétique, pourrait être susceptible. Loin des foires bruyantes, dans le calme des ateliers d'Istanbul, des artisans façonnaient depuis le XVe siècle de magnifiques pipes en écume de mer. Cette pierre calcaire, abondante dans le Bosphore et la Mer Noire, était prise des fumeurs pour sa capacité à adoucir le tabac tout en absorbant la nicotine. Les pipes étaient ornées de divers motifs, mais l'un d'eux revenait fréquemment : une tête de Turc enturbannée.
Ces pipes étaient de véritables œuvres d'art. Certaines pourraient atteindre 120 cm de hauteur et deux mètres de long, si l'on y ajoutait un tuyau de cuir par lequel la fumée se frayait un chemin, se refroidissant au contact de l'eau. Elles étaient remplies d'un tabac spécial, le tömbeki, cultivé sur les rives de la Mer Noire, qui dégageait un arôme puissant et salé. Autrefois, ces pipes étaient le centre des cafés où les hommes se retrouvaient pour discuter, jouer ou boire du thé.
Aujourd'hui, l'usage de ces pipes est en déclin, concurrencé par la cigarette. Pourtant, dans les ruelles sinueuses du grand bazar d'Istanbul, il est encore possible de trouver ces chefs-d'œuvre d'artisanat, à un prix bien plus abordable qu'en France. Alors, la prochaine fois que vous entendez l'expression "tête de turc", pensez à ces artisans d'Istanbul et à leur savoir-faire séculaire.
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