L'épopée de Ounamon : L’odyssée de cèdre pour la gloire de Pharaon
En l’an 1070 avant notre ère, sous la XXIe dynastie, l’Égypte n’est plus l’empire conquérant qu’elle était sous les règnes de Ramsès II ou Thoutmosis III. Le pays est divisé entre le pouvoir des pharaons à Tanis, dans le delta du Nil, et celui des grands prêtres d’Amon, qui règnent en maîtres à Thèbes, dans le sud. C’est dans ce contexte de déclin politique que commence l’histoire d’Ounamon, un simple fonctionnaire envoyé en mission diplomatique en Phénicie, dans le but d’obtenir du bois de cèdre pour le temple d’Amon. Le bois de cèdre, prisé depuis des siècles pour sa robustesse et sa beauté, est essentiel à la construction des barques sacrées qui transportent les dieux dans leurs sanctuaires. Thèbes, berceau du culte d’Amon, doit importer cette précieuse ressource de Byblos, une cité-État prospère située sur la côte phénicienne (dans le Liban actuel). Mais ce qui devait être une mission relativement simple va se transformer en une véritable odyssée marquée par des tempêtes, des humiliations et des moments de désespoir.
En quittant Thèbes, Ounamon embarque sur un navire de taille modeste, probablement une felouque ou un bateau de transport équipé de rames et d’une grande voile triangulaire. Chargé de présents et de lettres officielles, il vogue sur le Nil jusqu’à la mer Méditerranée. Les vents d’été soufflent fort, propices à une traversée rapide, mais aussi imprévisibles. Alors qu’il longe la côte du Levant, une tempête éclate. La mer, habituellement paisible sous le soleil éclatant, devient un chaos déchaîné. Les vagues s’élèvent comme des montagnes liquides, frappant la coque du navire. Les marins hurlent pour ajuster les voiles, mais le vent les emporte. Sous un ciel noir déchiré par des éclairs, Ounamon, agrippé à un mât, ressent pour la première fois le véritable danger de cette mission. Chaque craquement du bois sous ses pieds semble annoncer la fin. Après une nuit interminable, l’orage finit par s’apaiser, laissant le bateau et ses passagers épuisés mais en vie.
Dor, une ville côtière de Canaan, est une étape stratégique sur le chemin de Byblos. Mais pour Ounamon, elle devient rapidement synonyme de mésaventures. À peine arrivé, il découvre qu’un de ses marins s’est enfui, emportant avec lui une partie du trésor destiné à acheter le bois de cèdre. Désespéré, Ounamon cherche l’aide du prince local, Beder, espérant que celui-ci pourra récupérer les biens volés. Cependant, les relations entre l’Égypte et les villes cananéennes ne sont plus ce qu’elles étaient. Autrefois vassales de l’empire égyptien, ces cités se sont émancipées, et leurs dirigeants n’ont aucune obligation de répondre aux demandes d’un fonctionnaire étranger. Ounamon est laissé seul, humilié et sans ressources pour poursuivre sa mission. Le sable chaud de Dor, qui brûle ses pieds fatigués, contraste avec l’indifférence glaciale des autorités locales.
Après des jours de navigation supplémentaires, Ounamon atteint enfin Byblos, la destination ultime de sa mission. La ville apparaît à l’horizon, bordée par des collines couvertes de forêts de cèdres. Les troncs massifs de ces arbres majestueux, droits comme des colonnes, semblent toucher le ciel. Byblos est un port animé, où se croisent des marchands phéniciens, chypriotes, et peut-être même mycéniens. Les quais regorgent de vie : des marchandises s’entassent dans un désordre organisé, des pêcheurs déchargent leurs filets, et l’air est saturé de l’odeur du poisson, du goudron, et des épices. Mais l’effervescence de la ville ne masque pas la froideur de l’accueil réservé à l’émissaire égyptien. Pendant plusieurs jours, Ounamon est laissé à l’extérieur du palais du roi Zakar-Baal, contraint d’attendre qu’on daigne lui accorder une audience. Le soleil phénicien est implacable, et chaque journée d’attente est une humiliation supplémentaire. En Égypte, les diplomates étaient reçus avec tous les honneurs ; ici, il n’est qu’un homme parmi d’autres, perdu dans une ville qui ne respecte plus la grandeur passée de son pays. Quand il est enfin reçu, le roi de Byblos ne cache pas son mépris. Conscient de la position affaiblie de l’Égypte, il exige une compensation disproportionnée pour les troncs de cèdre. Ounamon se retrouve acculé : s’il refuse, sa mission échoue ; s’il accepte, il risque de ne pas pouvoir rentrer chez lui avec les ressources nécessaires.
Face à cette impasse, Ounamon se tourne vers sa foi. Une nuit, il se rend sur une plage isolée, face à la mer calme, et implore Amon, le dieu de Thèbes, de le guider. Il lève les bras vers les étoiles, cherchant un signe dans le vaste ciel noir. Soudain, une étoile filante traverse la voûte céleste, laissant derrière elle une traînée lumineuse. Pour Ounamon, c’est une réponse divine. Le lendemain, il retourne au palais, déterminé à conclure les négociations. C’est alors qu’un événement imprévu se produit. Un navire chypriote accoste à Byblos, transportant un prince de Chypre. Curieux des affaires d’Ounamon, ce dernier décide d’intervenir. Peut-être voit-il dans cette alliance une opportunité politique ; peut-être est-il simplement touché par le sort du diplomate. Quoi qu’il en soit, le prince chypriote convainc Zakar-Baal de livrer le bois à Ounamon, mettant fin à des semaines de tensions.
Alors qu’il supervise le chargement des précieux troncs de cèdre, un nouveau problème surgit. Des représentants d’autres ports apparaissent à Byblos, accusant Ounamon de ne pas avoir réglé ses dettes lors de ses escales précédentes. Le bois est confisqué, et l’émissaire se retrouve une fois de plus au bord de l’échec. Mais grâce au soutien du prince chypriote, il parvient à échapper à ses accusateurs et à repartir en mer avec sa précieuse cargaison.Le retour en Égypte est teinté d’amertume. Ounamon, marqué par les épreuves, comprend que son pays a perdu son aura d’antan. À Thèbes, il remet le bois au temple d’Amon, mais son récit est celui d’un homme brisé, d’un diplomate confronté à un monde où l’Égypte doit désormais quémander ce qu’elle imposait autrefois par la force.
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