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Le Mythe du Déluge Biblique: Atrahasis et Utanapishtim, les Noé mésopotamiens

Le récit du Déluge est un mythe répandu dans un grand nombre de cultures aux quatre coins du globe. Le plus célèbre d’entre eux, celui de la Genèse, est passé à la postérité grâce à la Bible. Cet épisode dramatique raconte comment Dieu usa d’un déluge cataclysmique pour laver la terre de l’impureté de sa création : l’homme. Néanmoins Dieu décida de récompenser de sa loyauté le brave Noé, en l’épargnant. Il lui ordonna de construire une arche répondant à des critères bien précis, et de s’y enfermer avec sa famille ainsi qu’avec un couple de chaque espèce animale. L’arche sauvegarderait toutes les espèces créées par Dieu sur terre pour un nouveau Commencement. Cependant, les découvertes archéologiques du XIXe siècle en Mésopotamie, et le déchiffrement des tablettes cunéiformes jetèrent un trouble dans l’étude des écrits bibliques. En effet, ils existaient des récits du Déluge très comparables à celui de la Bible, mais beaucoup plus anciens. Souvenirs ou fictions, voici les histoires, celles d’Atrahasis et d’Utanapishtim, les « Noé mésopotamiens ».

Deux mythes, mais quelles époques ?
Les récits d’Atrahasis et d’Utanapishtim nous sont parvenus par l’intermédiaire de deux œuvres littéraires majeures de l’Orient Ancien, le Mythe d’Atrahasis ou le Supersage pour le premier et l’Epopée de Gilgamesh pour le second. Les tablettes du Mythe d’Atrahasis remontent au moins au XVIIe siècle avant notre ère, tandis que celles nous narrant l’Epopée de Gilgamesh ont été retrouvées dans la très riche bibliothèque du grand roi assyrien Assurbanipal à Ninive, qui avait régné au milieu du VIIe siècle av. notre ère. Nul doute que ces deux œuvres, remarquables pour leur beauté ainsi que pour la force du message qu’elles véhiculaient, sont d’époques bien plus anciennes aux périodes de datations des tablettes. Concernant Gilgamesh, les traces du récit se perdent aux origines même de l’écriture, puisque l’on retrouve des tablettes racontant l’épopée écrites en langue sumérienne. De plus, ces mythes retracent les fondements des origines de la création de l’homme puis de peuples de Mésopotamie ; les traditions sumériennes (au sud) et akkadiennes (au nord) se rencontrant et se mélangeant pour donner naissance à des fabuleuses histoires dont Atrahasis et Utanapishtim furent des témoins privilégiés. Il est fort probable alors que ces mythes se soient d’abord transmis de génération en génération à l’oral, avant l’apparition de l’écriture vers 3200 av. notre ère.

Atrahasis, le favori d’Enki.
Le mythe d’Atrahasis raconte l’histoire de la création de l’homme et comment plusieurs fois les dieux voulurent le faire disparaître. La genèse de l’homme commence sur fond de révolution. Au commencement, les dieux étaient multiples et se composaient de deux catégories sociales : les puissants qui gouvernaient, restant oisifs et consommateurs, et les travailleurs qui produisaient la nourriture pour les puissants. Cependant, au bout d’un certain temps, peut-être plusieurs millénaires, cet ordre ne convenait plus et les dieux mineurs se révoltèrent, détruisirent leurs outils de labeurs, et assiégèrent les puissants dans leur forteresse. Les dieux puissants, pris au piège, furent contraints de se réunir, de tenir un conseil de crise et de prendre les décisions qui s’imposaient. Les idéaux de cette révolution triomphèrent, et il fut désormais admis que les dieux étaient à présent tous libres et égaux. Malheureusement se posait à présent le problème de la production de nourriture qu’il fallait produire pour nourrir cette population de dieux, plus nombreuse, gloutonne et vorace. Le dieu Enki, le plus rusé et le plus sage, eut la brillante idée de créer une race d’êtres inférieurs faite d’argile et de sang de dieux et qui aurait la même apparence que leurs créateurs. Ces êtres n’auraient pas le loisir de se révolter, puisque Enki eut l’idée d’introduire la mortalité en eux : l’homme (awilum) était né.

L’homme, mortel, n’eut pas le loisir de se révolter éternellement comme l’avait fait les anciens dieux. Aussi, satisfaits, les dieux les mirent au travail sur la terre, et récolte après récolte, ils alimentèrent leurs créateurs. Malheureusement, comme toute création, l’homme comportait des défauts qui devinrent bien vite insupportables pour les dieux et pour leur chef suprême, Enlil. En effet, les listes royales sumériennes retrouvées dans les sols brûlants des fouilles archéologiques en Iraq, révélèrent que les premiers rois de ces listes, avaient des vies longues de plusieurs centaines de milliers d’années. Les hommes se multipliaient très vite et malgré la mortalité, ils créaient un immense brouhaha assourdissant que les dieux décidèrent de stopper.

Par deux fois, le grand Enlil envoya de grands maux sur la race humaine dans le but de la détruire : une terrible épidémie d’abord puis plus tard, dans une seconde tentative, une sécheresse dévastatrice. Les hommes n’existeraient plus si Enki n’était pas intervenu. Pour sauver sa création, sans heurter les autres dieux, il alla trouver Atrahasis, littéralement « le super sage » qu’il en fit son dévot et un intermédiaire de sa parole. Pour stopper l’épidémie, Enki lui dit d’offrir à Enlil du namtar, une hypostase du destin. Enlil fut flatté et puis une fois rassasié, il suspendit son courroux. Les hommes furent sauvés de la sècheresse par Enki qui intervint directement, puisqu’il était le dieu des eaux.

On ne sait combien de temps s’écoula avant qu’Enlil reprit ses envies meurtrières. Cette fois, il allait une bonne fois pour toute en finir avec le vacarme sur terre en la noyant sous un gigantesque déluge. Il fit entériner sa décision par le conseil des dieux auquel Enki appartenait, pour ne souffrir d’aucunes contestations. Désemparé et tenu par son serment, Enki n’abandonna pourtant pas et alla trouver une fois de plus Atrahasis à qui il ordonna, par l’intermédiaire d’un message caché, de construire dans le plus grand secret un bateau hermétiquement clos et de s’y enfermer pendant le déluge. Atrahasis s’exécuta et emmena avec lui ses richesses, des animaux sauvages et domestiques ainsi qu’un grand nombre de volatiles. Finalement, Enlil fit pleuvoir son déluge et l’humanité entière fut recouverte par les eaux. Le désastre fut tel que les dieux eux-mêmes furent horrifiés du désastre. Le coût à payer pour ce massacre fut extrêmement lourd pour les dieux car Enlil, dans sa grande clairvoyance, n’avait pas anticipé que les dieux étaient nourris par les hommes, sans compter le remord et la famine qui les rongèrent bien assez vite. Atrahasis accosta, sortit et offrit une fumigation aux dieux qui se précipitèrent autour « comme des mouches ». Les dieux décidèrent en assemblée de certaines mesures pour éviter à l’avenir la surpopulation des hommes. Ils introduisirent l’infécondité, la mortalité infantile et des prêtresses à qui il serait interdit d’enfanter.

Utanapishtim, l’espoir de Gilgamesh.
Le roi d’Uruk est une légende dans la littérature mésopotamienne. Qu’il ait réellement existé ou pas, nous en sommes toujours aujourd’hui au stade des suppositions en ce qui concerne son existence, mais son épopée a traversé les frontières et les âges pour atteindre, depuis sa redécouverte au XIXe siècle de notre ère, une nouvelle forme d’éternité qu’elle avait perdu pendant ces deux derniers millénaires. Le roi, mi-dieu, mi-humain, fit face au dilemme le plus important de toute sa vie. Puissant, fort et respecté, Gilgamesh prit conscience de sa propre mortalité et donc de l’éphémère caractère de la vie, lorsque la déesse Ishtar, à qui il s’était refusé, assassina son ami Enkidu. Il abandonna alors sa ville et partit à la recherche du seul humain qui connaissait le secret de la vie éternelle, Utanapishtim – littéralement « j’ai trouvé ma vie » - qui vivait aux confins du monde. Après bien des mésaventures, Gilgamesh arriva enfin devant le vieux et sage Utanapishtim à qui il supplia de lui révéler le secret de la vie éternelle seulement réservée aux dieux. Bien qu’Utanapishtim lui recommanda de renoncer, il lui raconta comment les dieux le rendirent immortel.

Roi de la ville de Shuruppak, il fut prévenu par Ea, nom akkadien d’Enki, grâce à un message caché dans un roseau, de l’imminence d’un déluge qui allait anéantir toute l’humanité. Dans ce message Ea ordonnait à Utanapishtim d’abandonner sa maison et de construire un bateau – en forme de cube - et de s’y enfermer avec son épouse et un spécimen de chaque espèce vivante. Le bateau fut terminé en sept jours et comme on le lui avait ordonné, il s’y enferma, emmenant avec lui ses richesses, sa famille, les animaux et enfin tous les artisans de tous métiers. L’orage monta alors et la pluie commença à tomber. Le cataclysme dura six jours et sept nuits et fut d’une telle violence qu’il épouvanta les dieux eux-mêmes. Le vieux Utanapishtim raconta alors que tous les hommes étaient redevenus argile – leur matière d’origine - et que le silence prédominait. Le bateau accosta sur le mont Nimush (sans doute dans la chaine de montagne du Zagros) et Utanapishtim lâcha une colombe qui revint, puis une hirondelle qui finit par revenir elle aussi, et enfin un corbeau qui, lui, ne revint pas. Il ouvrit alors les portes du bateau et dispersa les animaux. Il offrit une offrande aux dieux affamés qui tournèrent autour comme des mouches. Les dieux décidèrent alors de ne plus jamais détruire l’humanité et offrirent à l’ancien roi de Shuruppak, ainsi qu’à son épouse, la vie éternelle. En échange, il devait quitter le monde où habitaient les hommes.

Gilgamesh n’obtiendra pas le secret de la vie éternelle et revint finalement à Uruk. Néanmoins son long voyage ne fut pas pour autant peu instructif. Ses pérégrinations lui avaient apporté la sagesse, et le texte raconte que c’est en bon berger qu’il revint à Uruk dont il allait faire une gigantesque et magnifique cité.

A la recherche du Déluge à travers ses mythes.
Le récit du Déluge biblique n’avait jamais été véritablement remis en cause jusqu’à la découverte des tablettes provenant de Ninive. Une fois traduite par l’anglais Georges Smith à la fin du XIXe siècle, le déluge de l’épopée de Gilgamesh entraîna un grand bouleversement théologique auquel les instances religieuses ne s’attendaient pas. Devant toutes les questions qui se posaient, le Vatican préféra garder le silence. Aujourd’hui le débat semble avoir trouvé une issue. Bien d’autres récits de l’Ancien Testament se retrouvent dans l’univers mésopotamien comme les récits de la tour de Babel et le mélange des langues ; aussi il est évident que le Déluge de Yahvé soit un récit influencé par les déluges du dieu Enlil dans les histoires d’Atrahasis et d’Utanapishtim.

Les archéologues, rongés par le doute et espérant trouver des traces du Déluge, se ruèrent en Iraq pour trouver des stratigraphies corroborant les dires des différents mythes. C’est à Ur que Léonard Woolley rencontra au fond d’une profonde tranchée, une stratigraphie qui montrait les traces d’une grande inondation. Puis on en découvrit d’autres dans les cités de Kish, Uruk, Shuruppak ou encore Lagash. Chacun des archéologues les interprétèrent différemment, mais les datations concordèrent toutes aux alentours du début du IIIe millénaire. Cependant, il est formellement impossible d’affirmer que toutes ces traces viennent toutes du même phénomène, encore moins d’un déluge.

Comment interpréter le/les déluge(s) ?
Des hypothèses concernant le phénomène d’un ou de plusieurs déluges peuvent être formulées aujourd’hui. La recherche archéologique, topographique et géologique sur le terrain de l’Iraq actuel nous a appris à mieux connaître ce que fut le pays des grandes civilisations de Mésopotamie. Le nom de Mésopotamie, ou mesopotamia – « la terre entre deux fleuves » - a été donné par l’historien grec Polybe pour désigner cette étroite bande de terre qui coule entre et autour des fleuves du Tigre et de l’Euphrate. Ces fleuves, contrairement à l’Egypte qui est « un don du Nil », connaissaient des crues dévastatrices qui envahissaient toutes les terres agricoles ainsi que les villes et autres villages construits à proximité. C’est pourquoi, les hommes de cette région apprirent à domestiquer, bien difficilement, les caprices de ces deux fleuves en construisant, dès le IVe millénaire, de grands canaux et des barrages qui permettaient aux villes de s’approvisionner en eau tout en s’éloignant des fleuves. Malheureusement de grandes crues survenaient régulièrement et anéantissaient tout. Aussi les récits du déluge peuvent être interprétés comme le souvenir d’une crue si dévastatrice qu’elle resta dans toutes les mémoires avant d’être, au fil du temps, racontée sous forme de mythes. On peut également voir les récits des déluges d’Atrahasis ou d’Utanapishtim comme les souvenirs lointains où leurs ancêtres voyaient les fleuves dévaster leurs maisons et leurs récoltes.

Les observations sur le terrain des précipitations rarissimes mais dévastatrices, dans les couches archéologiques et dans la vie de chantier de tous les jours, amenèrent certains archéologues à élaborer une autre théorie, tout aussi crédible, à savoir la tombée régulière, dans des laps de temps plus ou moins long, de grandes précipitations de pluies. L’architecture mésopotamienne étant faite à base d’argile et de terre, les pluies lorsqu’elles étaient trop fortes devaient absolument tout détruire.
Aujourd’hui, les spécialistes du climat et les assyriologues s’interrogent sur le possible lien entre le fameux discours du Déluge et la fin de la dernière ère glaciaire – glaciation de würm – vers -10000 av. notre ère. Ainsi, la terre se réchauffant progressivement, l’eau serait montée envahissant tout le golfe persique, détruisant inexorablement les constructions humaines. Des recherches dans ce sens montrent que les villes d’Ur, Uruk et Lagash auraient même été entre le Ve et le début du IIIe millénaire des cités côtières, alors que les sites sont aujourd’hui au milieu du désert. Alors est-ce que la thèse du réchauffement climatique – très en vogue de nos jours – est crédible ? Peut-être, si l’on considère qu’un récit pouvait être transmis par oral de générations en générations pendant plusieurs millénaires, jusqu’à ce qu’il soit enfin retranscrit sur tablette. Des tribus nomades continuent aujourd’hui encore sur la base de l’oral à transmettre l’Histoire de leurs ancêtres. A titre d’exemple, c’est comme si aujourd’hui nous nous transmettions par oral pourquoi les hommes, qui vivaient dans le Morbihan il y a 4000-5000, ans avaient dressé les menhirs de Carnac.



Qu’il y ait eu un ou plusieurs déluges, il n’en reste pas moins que le récit de la Genèse a été très fortement inspiré par les deux œuvres mésopotamiennes, à savoir le Mythe d’Atrahasis et l’Epopée de Gilgamesh. Atrahasis et Utanapishtim sont les premiers Noé de l’histoire, du moins littéraire. Les ressemblances sont si frappantes entre les différents textes que la question de l’origine d’un tel déferlement d’histoires, semblables dans les différentes mythologies et religions du monde, posent le problème sur un autre débat : celui de la diffusion des mythes mésopotamiens dans le monde oriental et méditerranéen.





Annexes

Récit du Déluge dans la Genèse.
Dieu regarda la terre et la vit corrompue, car toute chair avait perverti sa conduite sur la terre. Dieu dit à Noé : « Pour moi la fin de toute chair est arrivée ! Car à cause des hommes la terre est remplie de violence, et je vais les détruire avec la terre (…)
Fais-toi une arche de bois résineux. Moi, je vais faire venir le Déluge c’est-à-dire les eaux sur la terre, pour détruire sous les cieux toute créature animée de vie (…)
Entre dans l’arche, toi, et avec toi, tes fils, ta femme, et les femmes de tes fils. De tout être vivant, de toute chair, tu introduiras un couple dans l’arche pour les faire survivre avec toi ; qu’il y ait un mâle et une femelle ! (…)
Sept jours passèrent et les eaux du Déluge submergèrent la terre. (…)
La pluie se déversa sur la terre pendant 40 jours et 40 nuits. (…)
L’arche reposa sur le mont Ararat. (…)
Il lâcha le corbeau qui s’envola, allant et revenant, jusqu’à ce que les eaux découvrent la terre ferme. Puis il lâcha la colombe (…) Mais la colombe ne trouva pas où poser la patte (…)
(Noé) lâcha à nouveau la colombe hors de l’arche. Sur le soir elle revint à lui, et voilà qu’elle avait au bec un frais rameau d’olivier ! Noé sut ainsi que les eaux avaient baissé sur la terre. Il attendit encore sept autres jours et lâcha la colombe qui ne revint plus vers lui.
Mythe d’Atrahasis.
Douze cents ans ne s’étaient pas écoulés
Que le territoire se trouva élargi et la population multipliée.
Comme un taureau, le pays tant donna de la voix
Que le dieu-souverain fut incommodé par le tapage.
« La rumeur des humains est devenue trop forte:
Je n’arrive plus à dormir, avec ce tapage !
Commandez donc que leur vienne l’Épidémie (…)
Et Enki, rouvrant la bouche,
S’adressa derechef aux dieux, ses frères :
« Pourquoi voulez-vous me lier d’un serment ?
Puis-je porter la main contre mes créatures ?
Et ce Déluge dont vous parlez,
Qu’est-ce que c’est ? Je l’ignore !
Est-ce à moi de le produire ? (…)

Jette à bas ta maison, pour te construire un bateau !
Détourne toi de tes biens,
Pour te sauver la vie !
Le bateau que tu dois construire (…)
Et, le Déluge déchaîné,
L’Anathème passa comme la guerre sur les hommes !
Personne ne voyait plus personne :
Nul n’était discernable dans ce carnage ! (…)
Le fracas du Déluge
Epouvantait même les dieux. (…)
Ainsi Nintu gémissait-elle,
Exhalant son émoi,
Et les dieux, avec elle, déploraient la terre.
Soûlée de désespoir,
La déesse avait soif de bière (…)
Il (Atrahasis) dispersa aux quatre-vents tout ce que portait le bateau,
Puis servit un repas-sacrificiel
Pour subvenir à la nourriture des dieux,
Et il leur fit une fumigation orodante.
Humant la bonne odeur, les dieux
S’attroupèrent autour du banquet, comme des mouches!

L’Epopée de Gilgamesh.
Utanapistim expliqua donc à Gilgamesh :
« Gilgamesh, je vais te révéler un mystère,
Je vais te confier un secret des dieux!(…)
C’est là que prit aux grands-dieux l’envie de provoquer le Déluge. (…)
Ô roi de uruppak, fils d’Ubar-Tutu,
Démolis ta maison pour te faire un bateau. (…)
Le bateau que tu dois fabriquer
Sera une construction équilatérale :
A largeur et longueur identiques. (…)
Le lendemain matin, tout ce que je possédais, je l’en chargeai :
Tout ce que j’avais d’argent,
Tout ce que j’avais d’or,
Tout ce que j’avais de spécimens d’êtres-vivants.
J’embarquai ma famille et ma maisonnée entières,
Ainsi que gros et petits animaux-sauvages, et tous les techniciens.(…)
Et [l’Anathème] passa comme la guerre sur les hommes.
Personne ne voyait plus personne.(…)
Les dieux étaient épouvantés par ce Déluge(…)
Six jours et sept nuits durant,
Bourrasques, pluies-battantes, ouragans et Déluge ne cessèrent de ravager la terre.
Le septième jour arrivé, Tempête, Déluge et hécatombe stoppèrent. (…)
C’était le mont Nimush, où le bateau accosta.(…)
Lorsque arriva le septième jour,
Je pris une colombe et la lâchai.
La colombe s’en fut, puis revint :
N’ayant rien vu où se poser, elle s’en retournait.
Puis je pris une hirondelle et la lâchai :
L’hirondelle s’en fut, puis revint :
N’ayant rien vu où se poser, elle s’en retournait.
Puis je pris un corbeau et le lâchai.
Le corbeau s’en fut, mais ayant trouvé le retrait des eaux,
Il picora, il croassa, il s’ébroua, mais ne s’en revint plus.(…)
Et, en retrait, (je) versai dans le brûle-parfums cymbo, cèdre et myrte.
Les dieux, humant l’odeur,
Humant la bonne odeur,
S’attroupèrent comme des mouches autour du sacrificateur ! (…)






Commentaires

  1. Benjamin Sacchelli12 décembre 2011 à 23:23

    On retrouve le déluge également dans les mythologies précolombiennes. Les dieux noient la Terre, afin de se débarrasser des premiers hommes réalisés en glaise, et devenus peu productifs au gout des dieux. Ils sont remplacés ensuite par l'Homme moderne, fait de chair et de sang.

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  2. Le mythe se retrouve également en Inde et dans la mythologie grecque où Zeus fait noyer l'humanité. La portée du récit mésopotamien a traversé les mers et/ou les diverses cultures ont été un jour touchées par une catastrophe similaire.

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  3. Bonjour,

    c'est intéressant mais vous ne précisez pas vos source, comme par exemple, l'origine des textes traduits

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    1. Mais l'antériorité de l'Epopée sur l'Ancien Testament va-t-elle de soi ? La copie traduite par George Smith en 1872 n'est, après tout, pas si vénérable. Elle a été retrouvée dans la bibliothèque royale de l'Assyrien Assurbanipal qui, depuis Ninive - l'actuelle Mossoul -, règne vers 650 avant notre ère sur tout le Proche-Orient. De nombreux savants considèrent que les cinq livres de la Bible hébraïque ont commencé à être fixés vers la fin du VIIe siècle avant notre ère, sans doute sous le règne du roi de Juda Josias (vers 640-609 avant J.-C.). Mais Assurbanipal aimait à thésauriser des tablettes que lui-même, à son époque, considérait comme des antiquités. La "série de Gilgamesh" conservée dans son palais est attribuée à un certain Sinleqe'unenni, "exorciste". Pour l'assyriologue Daniel Arnaud (Ecole pratique des hautes études-Sorbonne), ce grand lettré aurait vécu "vers 1 200 avant notre ère".

      Voilà qui nous emmène déjà quelques siècles au-delà du règne d'Assurbanipal. Ce n'est pas tout. Au début du XXe siècle, les découvertes des archéologues font remonter plus loin encore dans le temps. De nouvelles tablettes sont exhumées et rapportent d'autres versions, plus anciennes, de la même histoire. D'autres versions, en d'autres langues. L'édition retrouvée à Ninive vers 1850, dans le palais d'Assurbanipal, est rédigée en langue akkadienne. Cette antique cousine de l'arabe et de l'hébreu était parlée dans le sud de l'Irak, jusqu'au Ier millénaire avant notre ère. Ailleurs au Proche Orient et jusqu'en Asie mineure, dans l'actuelle Turquie, on retrouve des traductions de l'Epopée en langues locales - en hittite, en hourrite. Une manière de best seller avant l'heure. Et avec quelle longévité ! Il existe des séries de courtes fables inscrites dans l'argile autour de 2 000 avant l'ère chrétienne, dont le héros est un certain Gilgamesh.Elles sont composées en langue sumérienne - la langue de ce peuple qui, autour de 3 000 avant notre ère, invente l'écriture cunéiforme dans le sud de l'Irak.

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  4. Passionnant ! Merci pour ce bel article

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Vous connaissez mon amour inconditionnel pour Alexandre le Grand. Aussi, aujourd'hui je vais vous conter un des épisodes qui m'a toujours marqué dans la vie du Macédonien : sa rencontre avec le célèbre philosophe cynique Diogène. De son entrevue, je crois, Alexandre en a retenu une leçon de vie qu'il essaiera, avec plus ou moins de bonheur ou de réussite, de s'appliquer tout au long de sa courte vie : l'humilité. Nous sommes en 335 avant notre ère. Alexandre n'est pas encore Alexandre le Grand et il n'a pas encore vingt-un ans. Pourtant, il est déjà craint par les Grecs... Bientôt par les Perses. En attendant, le jeune roi macédonien vient d'épater tous ceux qui doutaient encore de lui. Voilà quelques mois, son père Philippe mourrait sous les coups de couteaux de Pausanias - amant blessé - et la Grèce soumise décide alors de se révolter sous l'égide du meneur Démosthène et de la cité d'Athènes. Alexandre, fou de rage devant tant de traîtrise,

Hypatie d'Alexandrie, une femme seule face aux chrétiens

Alexandrie, ville de savoir ; ville de délices ; ville de richesses ! Et pourtant parfois, ville décadente et théâtre des pires atrocités faisant ressortir le vice animal, dénué de toute philosophie civilisatrice. En 415 de notre ère, cette Alexandrie, cité révérée et donnée en exemple, va connaître les premiers signes de sa décadence : elle assassine une des plus grandes savantes et philosophes de l’histoire de l'humanité, la belle et intelligente Hypatie. Née vers 370, Hypatie a environ dix ans lorsque l’empereur Théodose proclame la foi chrétienne comme étant la religion officielle de l’empire. Théodose met fin à un millénaire de stabilité religieuse et installe une religion qui tend à la prédominance   et qui, par l’intolérance qu’elle exerce, met l’empire en proie à des révoltes incessantes.  Moins d’un siècle suffira à le faire définitivement chuter ! Les chrétiens avaient été plusieurs fois massacrés – souvent injustement – servant de boucs émissaires quand la situation l’i

Le destructeur du nez du sphinx

Voilà bien longtemps que les hommes de la riche et nourricière terre d’Egypte le contemple. On vient également de loin pour se recueillir devant lui. Le Sphinx, cet être gigantesque que les plus grands hommes révèreront comme un dieu est un porte bonheur ! Né de la volonté du pharaon Khéphren, ce mastodonte taillé dans la roche garde depuis 2500 av. notre ère environ le plateau de Guizèh et ses somptueuses tombes : les pyramides de Khéops, Khéphren et Mykérinos. Le Sphinx parcourt les siècles avec aisance bien qu’il faille régulièrement le déterrer car le sable, inlassablement, vient le recouvrir jusqu’aux épaules. La chrétienté puis l’islam passent et le culte du dieu lion à tête d’homme s’éteint progressivement sans toutefois totalement disparaître. Les musulmans d’Egypte le considèrent tel un génie et l’admirent comme une œuvre d’art défiant la nature et rendant grâce au génie humain voulu par Dieu. Malheureusement, les belles heures théologiques, bien souvent plus intellectuelles